Éditos

Non à la suppression de la qualification

Appel aux membres de la Société Française de Littérature Générale et Comparée par Anne-Gaëlle Weber, Présidente de la section 10 du Conseil National des Universités.

Le Sénat a examiné le projet de loi de programmation de la recherche dans la nuit du 28 au 29 octobre. Il a validé un amendement (amendement 150) supprimant la procédure de qualification par le Conseil National des Universités des candidats aux fonctions de Maîtres de conférences et de Professeurs des Universités. Les établissements pouvaient déjà, à la suite d’un examen en Commission de Recherche, dispenser ponctuellement certains candidats de l’obtention de la qualification. Le nouvel amendement érige ces cas particuliers en loi.

La dixième section du CNU a à plusieurs reprises proclamé sous la forme de motions son opposition au projet de loi de programmation de la recherche (LPPR devenue LPR). La suppression de la procédure de qualification confirme les conséquences désastreuses de l’application de ce projet qui avaient été anticipées par ses membres.

L’examen des dossiers de qualification n’est pas la répétition d’un jury de thèse comme le prétendent les détracteurs de cette procédure, il est la seule occasion collégiale et nationale d’évaluer les capacités des candidats à enseigner, à former les étudiants à la recherche et à mener des travaux scientifiques au sein de structures collectives. Sa suppression témoigne du manque de considération accordée à la formation et l’enseignement, c’est-à-dire à des tâches essentielles au métier d’enseignant-chercheur.

La qualification par le Conseil National des Universités (CNU) est la seule garantie d’une expertise équitable sur le sol national. Elle est un rempart contre le recrutement local, dans un contexte où les postes d’enseignants-chercheurs sont rares.

Supprimer la qualification revient à porter atteinte au statut national d’enseignant-chercheur, indispensable au bon fonctionnement d’un service public d’enseignement supérieur d’égale qualité sur tout le territoire et à nier la liberté académique nécessaire au développement de la recherche. En effet, cette suppression va de pair avec l’autorisation accordée aux Universités de recruter du personnel administratif et scientifique sur des « chaires » ou des projets à durée déterminée.

Enfin, la procédure de qualification est l’examen des travaux, formations et expériences par des enseignants-chercheurs relevant de la même discipline, ce qui n’est pas toujours le cas des membres des comités de sélection. Elle est indispensable à l’évolution et à la définition de la Littérature Générale et Comparée, car elle favorise une réflexion méthodologique et scientifique collective. Elle est également indispensable à la survie de notre discipline dans des universités souvent pluridisciplinaires où ses représentants sont peu nombreux et minoritaires dans les instances politiques.

Je vous invite donc, en tant que Présidente de la section 10 du CNU, à faire part de votre opposition à ce projet de loi et à l’amendement 150 en joignant votre signature aux pétitions et en vous adressant aux députés et sénateurs qui décident en ce moment du destin de notre métier et de notre discipline.