Littérature et Arts Visuels
Le lien entre l'art théâtral et la littérature est à la fois de l’ordre de l’évidence et d’une forme d’impensé. Entre textualité et théâtralité, cette dualité s'exacerbe très vite en une polémique qu'il faut dépasser pour comprendre les enjeux de cette relation. Le théâtre ajoute un auteur, le metteur en scène, et mêle la critique à la création en forçant les gens de théâtre à choisir pour créer une « œuvre seconde ». Après avoir dressé un état des lieux de ces rapports, en usant d’une approche à la fois historique et esthétique, il s’agit de proposer une réflexion méthodologique pour l'analyse de l'œuvre théâtrale, par essence en mouvement et éphémère : au-delà d’une approche structurelle, sémiologique, narratologique, sociologique, linguistique ou psychanalytique, il est aujourd'hui nécessaire d’articuler les approches des chercheurs en études littéraires et celles issues des études théâtrales pour les décloisonner et proposer une démarche qui inclue l'analyse dramaturgique d’un hypotexte, de son hypertexte et du travail de plateau. Il s'agit donc de penser de manière inter- et transdisciplinaire pour dessiner les passages et les relations qui, entre texte et scène, travaillent pour créer le propos du spectacle.
Drama and literature are connected in ways that to this day remain natural and yet ignored. Its dual nature combining textuality and theatricality is often the source of controversies which need to be laid to rest if one wants to understand what is at stake there. Theatre introduces the stage director as another author and mixes criticism with creation as it forces its practitioners to make choices and create a follow-up work. After examining where these relations stand today from a standpoint both historical and aesthetic, the objective will be to present a precise, relevant method for analysing the essentially mobile and fleeting theatrical productions. Beyond structural, semiotic, narratological, sociological, linguistic and psychoanalytical approaches, it is now necessary to combine the methods used by researchers in literature and those used by researchers in theatre studies. The approach that will be proposed includes the dramaturgical analysis of the hypotext, that of the hypertext and that of stage work. The reflection will have to be inter- and cross-disciplinary so that the passages and relations can be delineated as they work between text and stage to create the purpose of the performance.
ARTICLE
Trace fragile de l’émotion immédiate et partagée, le patrimoine théâtral occidental incarne de façon emblématique une double appartenance : à la présence vécue et à la littérature [1] .
« Le théâtre est double par nature : art du spectacle et littérature [2] ». Perçu comme objet purement littéraire, le théâtre est analysé avec des outils littéraires et des modèles d’analyse textuelle, ceux issus notamment de la philologie ou des études de réception. Compris dans sa dimension spectaculaire, coexistent diverses démarches méthodologiques : les études sémiologiques qui envisagent la production et la réception du spectacle comme des systèmes complexes de signes, les études sociologiques du spectacle, l’anthropologie ou l’histoire des codes pour laquelle la philosophie et l’esthétique prolongent les questionnements.
Aujourd’hui, les territoires de ces disciplines sont de plus en plus perméables. Importer des méthodologies d’autres domaines disciplinaires dans sa propre discipline est de plus en plus fréquent. Il faut donc assumer de ne pas chercher à « réduire l’inconnu au connu, de ne [pas] considérer comme objet d’analyse légitime que ce qui relève de données stables », et s’efforcer de travailler dans « une démarche respectueuse de la complexité » [3] .
À ce titre, continuer à distinguer les études littéraires des études théâtrales ne fait pas sens, et la littérature comparée, en accueillant ces nouveaux enjeux, peut être à même de proposer un véritable renouveau dans l’approche méthodologique. Déjà en 2007, Hélène Laplace-Claverie regrettait que les études théâtrales fussent dissociées des études littéraires du théâtre, « un absurde partage des tâches » : « Aux spécialistes du spectacle dit vivant le "vrai" théâtre, incarné dans des corps (si possible muets) et dévoreur d’espace ; aux littéraires le théâtre mort, enfoui sous la poussière des bibliothèques » [4] . Ce faisant, elle anticipait la demande de Guy Ducrey qui appelait quelques années plus tard
à une « approche littéraire du spectaculaire » qui, restituant au texte sa part méritée, considère aussi les visions, les mouvements et la musique de la scène, et a pour principe cette vérité : « Il existe un spectacle de la parole, comme à l’inverse une poésie de la scène [5] ». Il se pourrait donc, après tout, que la parole relève, elle aussi, de l’opsis, et que le texte doive être pris en compte pour comprendre le plateau. Le poéticien aurait donc son mot à dire dans l’analyse d’un spectacle ? Oui, à condition qu’à son tour il sache se faire esthéticien du théâtre et ne rechigne pas à la matérialité de la scène, de son arrangement, des mouvements qui s’y déroulent [6] .
L’apparition de nouvelles formations au sein des universités en « Littérature et théâtre » ou « Théâtre et littérature » met en exergue ce possible renouvellement des approches dramaturgiques et scéniques. Pour Ana Clara Santos, qui a observé ce phénomène au Portugal, il permet d’ailleurs à la littérature d’être « relancée par le biais de l’étude de la littérature comparée ou de la Littérature et des Arts » [7] .
Dépasser le débat sur les rapports entre texte et scène et construire du sens par une approche expérimentale d’ensemble du théâtre est donc un impératif. Car malgré les possibilités offertes par toute forme d’analyse, il subsiste toujours un « noyau infracassable résistant à l’interprétation [8] ». Procéder en termes binaires et chercher des frontières à l’objet théâtre n’est donc plus d’actualité et il s’agit aujourd’hui de dépasser cette opposition et d’envisager davantage les passages, espaces de dialogue et relations entre le théâtre et la littérature en assumant le postulat suivant, volontairement formulé comme une provocation : le théâtre a quelque chose à nous apprendre de la littérature.
Les études d’intermédialité, qui ne se limitent pas au domaine théâtral, ont déjà montré leur bien-fondé [9] , pour explorer cette voie, et le comparatisme peut devenir le terrain qui accueille ces nouvelles perspectives. Ce que dit Daniel-Henri Pageaux de la recherche comparatiste récente doit en effet pouvoir être élargi aux relations entre texte et scène, puisqu’elle
accentue un processus de déconstruction des anciennes binarités ici / ailleurs, étranger / national, centre / périphérie, à partir du moment où la frontière entre deux cultures, entre le Je et l’autre ne sont plus extérieures à l’œuvre, mais intérieure aux textes retenus, aux cultures abordées et où s’affirment hybridité, hétérogénéité, dialogisme, polyphonie, nomadisme, autant de données qui changent les bases de l’interrogation comparatiste par excellence sur le « fait différentiel », la dimension étrangère d’un texte, la production d’étrangeté. C’est un « déplacement » qui s’esquisse depuis cette dimension étrangère, constitutive de nos interrogations, vers une réflexion portant sur une « autreté » [10] .
Comme il en va de la responsabilité de « chacun de relancer [la recherche] en ne cessant d’imaginer d’autres questions [11] », je voudrais défendre ici la nécessité qu’il y a à renouer les liens entre le théâtre et la littérature, en présentant les évolutions de notre discipline dans son rapport aux arts du vivant (notamment du théâtre), avant de plaider pour la reconnaissance d’un statut pour l’art théâtral et de réfléchir à la manière dont se nouent les relations et les passages entre le texte et la scène, tout en interrogeant de possibles approches méthodologiques pour les études de littérature générale et comparée.
Renouer les liens entre théâtre et littérature
Le dernier ouvrage de synthèse sur la discipline comparatiste, La Littérature comparée. Histoire, domaines, méthodes[note id=note12][/note], consacre tout un sous-chapitre à la question « Littérature et arts » au sein du chapitre « Littérature comparée et interdisciplinarité » ; les notions « intermédialité » et « arts vivants » apparaissent dans la table des matières : une première française ! Pourtant, la place des arts est acquise en littérature comparée depuis de nombreuses années, comme de nombreux travaux de recherche en témoignent.
Le colloque international « Littérature comparée et correspondance des arts » (Strasbourg, 2011 [12] ) a montré que la littérature comparée « est capable de proposer une lecture féconde et inédite du dialogue entre la littérature et les arts (musique, peinture, architecture, photographie, danse, cinéma) [13] ». Et si la correspondance entre littérature et arts vivants n’apparaît pas dans cette liste, certaines problématiques posées ne lui sont pas étrangères :
Y a-t-il des arts (par exemple l’opéra et le cinéma) qui sont tout particulièrement des accélérateurs d’un échange de substance entre la littérature et les autres arts ? Y a-t-il des limites aux rapprochements, aux correspondances, voire aux fusions entre la littérature et les arts ? […] Et enfin, question majeure : le but de la correspondance des arts est-il seulement esthétique ou aussi éthique [14] ?
Auparavant, deux colloques organisés par la Société française de littérature générale et comparée (Aix en Provence, 1986 [15] et Valenciennes, 2005 [16] ) s’étaient employés à redéfinir liens et rapports entre littérature et arts, ce que rappelle le second [17] « livre blanc » de la recherche en littérature générale et comparée (2007) [18] dans une partie qui leur est dédiée. En travaillant sur les contours du « territoire du comparatisme [19] », ce second livre blanc développe deux axes au cœur de cette réflexion : « d’une part, les interactions avec les arts et avec d’autres champs disciplinaires, et d’autre part, les réflexions théoriques sur le statut, les formes et les frontières du littéraire [20] ».
Pour autant, ni en 1986, ni en 2005, ni même en 2011, les communications n’ont porté sur l’art théâtral en particulier, qu’il s’agisse de mises en scène de textes du répertoire, de créations contemporaines ou de performances, ce que semblent regretter Jean Molino et Roger Bozzetto dès 1986 dans leur conclusion provisoire du colloque :
Le temps n’est plus où les comparatistes aidaient à découvrir des œuvres, des styles, des civilisations, des arts étrangers. Qu’en est-il des rapports aux arts neufs ? […] Quelle image nous donne le congrès de l’état de la recherche en ce qui concerne les méthodes et les perspectives ? Apparaît d’abord un certain logocentrisme : les analyses font la part belle au langage, à l’écriture et n’accordent le plus souvent qu’un statut annexe au son et à l’image. Ce privilège est naturel, si l’on se souvient que le comparatiste est homme de mots plus que de figures ; mais est-il pour autant justifié ? Il est permis de penser qu’un important progrès serait accompli si le comparatiste s’obligeait à passer par la voie étroite des techniques spécifiques les plus assurées qui sont seules en droit d’analyser des formes [21] .
Comment expliquer cette absence de recherche sur les liens entre littérature et théâtre au sens de « spectacle théâtral » ? Est-ce parce que, pendant longtemps, le théâtre a été « considéré comme un genre spécifique, relevant du seul domaine de la littérature [22] » et non comme un art à part entière, que ce questionnement est difficile et donc de facto inexistant ?
I. Vers une lente reconnaissance d’un statut pour l’art théâtral
Le choix du terme « correspondance des arts » (colloques de 2005 et 2011) n’est pas anodin. Il ancre l’analyse sur les plans à la fois philosophique et esthétique, en faisant explicitement référence à l’expression utilisée par le philosophe spécialiste d’esthétique Étienne Souriau [23] , lequel a œuvré pour développer une esthétique comparée en pensant au-delà des disciplines artistiques [24] . Dans son ouvrage, il distingue, selon leurs caractéristiques sensorielles, sept classes d’arts qu’il subdivise chacune en deux groupes, arts du premier et arts du second degré : lignes (dessin et arabesque), volumes (sculpture et architecture), couleurs (peinture représentative et peinture pure), luminosités (photographies – cinéma et projections lumineuses), mouvements (pantomime et danse), sons articulés (littérature – poésie et prosodie pure), sons musicaux (musique dramatique ou descriptive et musique) [25] . Un premier constat s’impose : le théâtre en tant que spectacle est le grand absent de ce système. Pourtant, en poursuivant la lecture, et notamment le chapitre qui répertorie les « principales correspondances artistiques », on s’aperçoit que Souriau est parfaitement conscient des limites de son schéma lorsqu’il évoque cette forme de correspondance « qui résulte de la médiatisation par l’unité d’une œuvre de synthèse » dont le théâtre, « dans ses formes les plus riches […] offre mille exemples » [26] , mais il ne l’aborde pas.
Quatre ans après Souriau, le philosophe de l’art Charles Lalo propose une nouvelle classification [27] s’appuyant sur la Gestaltheorie[note id=note29][/note] formulée en Allemagne, selon laquelle les processus de perception et de représentation envisagent les phénomènes non comme des éléments isolés, mais comme des formes, des structures globales. Sept « supra-structures » sont définies comme étant spécifiques aux Beaux-Arts : l’audition, la vision, le mouvement, l’action, la construction, le langage et enfin la sensualité. Le théâtre fait son apparition dans cette classification, non – comme on aurait pu s’y attendre – dans les supra-structures du langage, mais dans celles de l’action dont le sous-titre est assez évocateur : « Contrepoint de personnages, c’est-à-dire essentiellement de volontés supposées plus ou moins libres ou contraintes dans des conflits intérieurs ou extérieurs [28] ». « Les arts de littérature » sont en revanche classés dans les supra-structures du langage. Se voit donc opposée ici l’action dialoguée, envisagée comme une action vivante en présence d’un public, à la poésie et à la prose perçues comme le « contrepoint de phonèmes, sémantèmes et liens syntaxiques d’une langue parlée ou écrite [29] ». Littérature et théâtre n’appartiennent donc pas, pour Lalo, à la même supra-structure.
Deux ans après la publication de cet article, Lalo découvre les travaux du philosophe américain de l’art Thomas Munro. Enthousiasmé, il entreprend de faire traduire et publier son ouvrage en français. Dans Les Arts et leurs relations mutuelles [30] , Munro s’inscrit dans une perspective résolument comparatiste en analysant les relations entre les arts au prisme des matériaux, des moyens d’expression, des techniques et de la nature des productions. Il s’interroge sur les caractéristiques des différents arts pour finalement passer en revue « quelques arts importants d’aujourd’hui et de demain [31] », et, entre « Danse et ballet » et « Cinéma », on découvre « Drame et Théâtre [32] ». Après avoir rappelé les trois sens du mot théâtre, Munro souligne que chacune de ces notions renvoie à un art différent : à l’« architecture », à une « branche de la littérature » et à la « mise en scène ». à l’issue de ce chapitre, il propose une définition des « Arts du théâtre » :
Ils comprennent les arts de l’acteur, du directeur, du metteur en scène, du costumier, du maquilleur, de l’éclairagiste, du musicien, du danseur et du cinéaste, dont les compétences peuvent collaborer et concourir à la production de l’ensemble [33] .
Dans sa définition, la dimension littéraire de l’art théâtral est donc absente. Pour lui, la littérature est un art à part entière [34] , tout comme les « arts du théâtre » existent en toute indépendance. Mais que l’on ne se méprenne pas : il ne s’agit pas pour lui de vouloir cloisonner les différents arts, au contraire. En essayant de les caractériser au plus près, il interroge leurs relations dans un espace mouvant qui nécessite d’être sans cesse redéfini : « parler d’un art est une façon plus ou moins arbitraire de circonscrire une zone particulière à l’intérieur du contexte homogène et changeant de la culture sociale [35] ». Le théâtre, dans sa double composante littéraire et spectaculaire, habite donc un espace en mouvement et éphémère qui se renouvelle et se métamorphose au cours du temps.
Ce « dialogue des arts » se prolonge plus tard dans les recherches transesthétiques de Bernard Vouilloux, qui a beaucoup œuvré à la diffusion de la pensée de Nelson Goodman. Distinguer « arts autographiques » et « arts allographiques » [36] s’avère particulièrement utile pour repenser les rapports entre littérature et théâtre et même les dépasser. Par « art autographique », Goodman envisage une œuvre d’art pour laquelle « la distinction entre l’original et une contrefaçon a un sens [37] ». Dans cet « art à une phase [38] », le peintre n’a par exemple pas achevé le tableau, celui-ci n’existe pas en tant qu’œuvre d’art. Par opposition, l’art n’est allographique que « dans l’exacte mesure où il est justiciable d’une notation [39] » et Goodman d’évoquer la musique, mais aussi l’architecture, et de montrer le rôle fondamental d’une notation définie, qu’il s’agisse de signes, de caractères, de notes de musique sur une portée ou bien encore de plans de bâtiments. Cette notation permet alors d’entrer dans une deuxième phase, celle de l’exécution de l’œuvre. C’est dans cet esprit qu’il qualifie l’art allographique d’« art à deux phases [40] ». Chaque exécution de la notation devient donc une œuvre aussi originale que celle de la première phase. Ces définitions posées, Goodman établit un lien tout à fait original entre la musique, l’architecture et l’art dramatique :
L’architecture et l’art dramatique sont plus directement comparables à la musique. Tout bâtiment qui se conforme aux plans et aux spécifications, toute représentation du texte d’une pièce qui est en accord avec les indications scéniques, sont des exemples aussi originaux de l’œuvre que n’importe quels autres [41] .
L’art dramatique, un « art à deux phases » ? Une première, la création du texte dramatique sur la base d’une notation faite de signes et de caractères, et une deuxième lors de la représentation scénique ? Goodman opère en sus une distinction très précise entre deux types de textes au sein de l’œuvre littéraire dramatique : « Le dialogue, […], un système quasi-notationnel », et « les indications scéniques, les descriptions de décor, etc., […] des scripts dans un langage qui n’obéit à aucun des réquisits sémantiques pour la notationalité » [42] . La représentation scénique du texte dramatique, au sens « d’exécution » du dialogue, constituerait « l’œuvre » de la deuxième phase, les éléments du script, quant à eux, les indications scéniques, ne seraient pas à considérer comme « partition », le langage du script ne permettant pas de véritable identification, d’assimilation, et pouvant ainsi prêter à interprétation, et donc à des choix singuliers et spécifiques, ce que confirme Vouilloux en notant que
la plupart des auteurs s’accordent à reconnaître aux didascalies un caractère « facultatif » ; autrement dit, les agents d’exécution ont toute licence de suivre ou de ne pas suivre l’injonction, ou encore d’en modifier le contenu propositionnel [43] .
En réalité, cette analyse du rôle du « script » au sens goodmanien nous amène à discuter la définition même du mode dramatique au sens aristotélicien, car la seule détermination par le mode (hôs), telle qu’on la trouve dans la Poétique d’Aristote [44] , ne répond pas aux enjeux posés par le texte dramatique.
C’est sans doute parce qu’Aristote entrevoit que le recours au seul paramètre de l’énonciation ne rend pas compte de la spécificité théâtrale qu’il réintroduit la catégorie du spectacle (opsis), dont il ne cesse d’affirmer dans le même temps que c’est « ce qu’il y a de plus étranger à l’art ». Cette catégorie est nécessaire pour donner toute sa pertinence à la notion de mode dramatique, mais se voit dénier toute dignité théorique en tant qu’elle incombe à l’art du fabricant d’accessoires [45] .
On peut s’étonner, comme ne manque d’ailleurs pas de le faire Hélène Laplace-Claverie [46] , que, dans cette discussion sur l’autonomisation du théâtre, les travaux d’Henri Gouhier n’aient pas davantage retenu l’attention des chercheurs, notamment son ouvrage Le Théâtre et les arts à deux temps, qui distinguent, dans les traces de Goodman, deux types d’œuvres d’art : « celles qui sont créées en une seule fois, et celles qui, pour être pleinement elles-mêmes, doivent être recréées [47] ». Entre l’œuvre « à deux phases » et l’œuvre « à deux temps », il n’y a pourtant qu’un pas ; mais ce pas franchi est un grand pas, car il nous permet de préciser avantageusement ce pas-de-deux : si pour Goodman, la notation (première phase) précède l’exécution (deuxième phase) – chaque exécution entraînant la naissance d’une œuvre originale – Gouhier préfère envisager le processus en termes de création (premier temps correspondant au temps de l’écriture) et de « re-création [48] » (deuxième temps, celui du passage à la scène), un terme-clé comme nous le verrons.
Par conséquent, si le théâtre est à entendre comme objet hybride et à analyser, non pas dans sa seule composante dialogiale, mais bien comme « art dramatique allographique à deux phases », ou plus précisément comme « art à deux temps » – le théâtre comme genre littéraire serait « le premier temps [du] schéma [49] », celui dans sa dimension spectaculaire, le second – alors la littérature comparée, dans sa « position de carrefour » à l’égard de l’objet d’étude, « un corpus représentant une hétérogénéité [50] », ne doit pas reculer devant la mission de s’emparer du débat sur la tension entre texte et scène.
II. (Ré)interroger le théâtre
Si, comme le disait déjà Yves Chevrel, « accepter de sortir de notre propre espace […] est […] la condition qui permet de comprendre vraiment cet espace [51] », alors il est nécessaire d’abandonner pour quelque temps l’espace du texte de théâtre, non pas par méfiance ou pour le nier, mais pour le réinterroger dans ses rapports au présent, c’est-à-dire, pour parler avec Alain Badiou, dans le but « d’éclairer notre existence et notre situation historique [52] ». Il s’agit donc de réinterroger l’objet théâtral depuis un autre espace, un espace hybride et relationnel, qui seul permettra de dialoguer de manière ouverte et critique avec ce qui est Autre, et donc
d’inventer une intersémiotique capable de décrire deux systèmes différents ou une transsémiotique susceptible d’analyser les éléments en commun, [avec pour objectif de] penser à la fois l’interrelationnel et le différentiel, lequel se définit comme une suite de transpositions [53] .
Il nous faut quitter cet espace du texte, pour mieux revenir ensuite à la littérature, en interrogeant cet entre-deux théâtral, où « le texte [reste] la garantie ultime que le théâtre n’est absorbé ni par la danse ni par l’image » [54] , tout en gardant à l’esprit que « parler du théâtre, c’est précisément continuer le jeu, prolonger ce dialogue entre une œuvre et notre société, qui de la scène a gagné la salle – ou l’anticiper [55] ».
Le comparatiste se doit d’accepter d’être, comme l’avait défini le regretté Edward Saïd, out of place… Une situation qui n’est pas exempte de risques, de déboires et d’incompréhension, mais qui doit se changer en un défi intellectuel et existentiel permanent [56] .
Cet out of place, véritable écho à l’out of joint shakespearien [57] , nous voilà donc dans un espace disjoint, à la temporalité elle-même disjointe, dans un véritable espace entre qui va devenir le lieu de rencontre entre l’écriture scénique et l’écriture littéraire, entre deux créateurs (l’auteur et le metteur en scène), mais aussi entre la scène et la salle, entre le théâtre et le monde. Travailler à partir du même texte, cet espace riche et dense, pourra donner ainsi lieu à de multiples (re-)créations théâtrales [58] . Si, avec Barthes, on insiste sur la pluralité des sens lors de l’interprétation d’un texte [59] ; c’est alors dans cet espace dense et pluriel que se nouent les enjeux du texte dramatique, de sorte qu’il n’y a jamais de répétition dans le travail de mise en scène, puisque, par définition, les mises en scène sont à chaque fois différentes. La mise en scène implique en effet « la prise de pouvoir et sa gestion par un artiste qui l’assume [60] ». Ou, pour dire les choses autrement, si l’écrivain assume le geste d’écriture de son texte, le metteur en scène assume lui son geste créatif au plateau.
Le théâtre entre texte et scène
I. Théâtre et théâtralité
« Qu’est-ce que le théâtre ? » Cette question « incongrue [61] » est celle que pose Alain Viala en introduction à son ouvrage Le Théâtre en France. Et la réponse n’est visiblement ni évidente, ni systématique :
Cette question posée en ouverture ne peut pas recevoir de réponse univoque, du genre « le théâtre, c’est… ». Le théâtre est une réalité complexe et évolutive, il n’y a pas le théâtre en un bloc homogène ; il y a du théâtre [62] .
Le théâtre est en effet un véritable espace pyramidal : à la fois espace architectural, genre littéraire et art du spectacle combinatoire, il donne lieu à une représentation en procédant d’un texte de théâtre ou en donnant lieu à son écriture. Il est aussi l’espace dans lequel se déploie la théâtralité, qualité première que l’on reconnaît au théâtre en tant que sa « nature profonde [63] ».
Pourtant, la théâtralité n’est qu’une « préoccupation récente », à la diffusion tout aussi récente qui fait même « oublier une histoire plus lointaine puisque la notion de théâtralité peut être retracée dans les premiers textes de Evreinov (1922) [64] ». Le terme français est d’ailleurs assez nouveau : introduit en France par Roland Barthes en 1954 dans son essai Le Théâtre de Baudelaire, il le reprend ensuite dans les Essais critiques.
Pour Barthes, la théâtralité, « c’est le théâtre moins le texte, c’est une épaisseur de signes et de sensations qui s’édifie sur la scène [65] ». Cette « épaisseur de signes », entendue au sens de simultanéité et de polyphonie, s’oppose à ce qu’il a appelé, quelques années plus tard, la « monodie littéraire [66] » où seule la voix du texte retentit. Mais une fois la soustraction opérée, que reste-t-il effectivement ? Un espace, un seuil, un passage, dont on pressent déjà les difficultés méthodologiques inhérentes à sa définition et à son analyse. On comprend mieux pourquoi Michel Bataillon, à l’issue d’une table ronde qui avait pourtant duré une heure et demie, pensait avoir tout juste commencé « à délimiter un domaine tout à fait imprécis » et « à saisir, au moins pendant un instant, ce savon mouillé [67] ». Si Josette Féral définit la condition sine qua non de la théâtralité comme « la création d’un autre espace où peut surgir la fiction [68] », elle souligne également que le jeu d’acteur est « porteur de la théâtralité [69] », tout comme le rapport de la fiction au réel : « la théâtralité apparaît […] comme l’imbrication d’une fiction dans une représentation dans l’espace d’une altérité qui met face à face un regardant et un regardé [70] ».
Voilà qui renvoie à une zone dense, profonde et riche dans laquelle s’opère le passage du littéraire au théâtral, du texte de théâtre à la représentation. En ce sens, la position de Barthes remet en question l’idée que l’analyse théâtrale est avant tout une étude des signes. Elle « ouvre la voie à un questionnement plus radical sur les modalités de la complexité sémiotique. La polyphonie théâtrale suppose un mode de réception susceptible d’affronter l’opacité des signes [71] ».
II. De représentation à mise en scène
Si le terme représentation pose moins de difficultés de compréhension que celui de théâtralité, il n’en reste pas moins que cette notion, son histoire, les attentes et les enjeux qu’elle représente, ont beaucoup évolué au fil du temps, et sans vouloir se livrer à un exposé exhaustif, il est indispensable de contextualiser l’emploi de ce terme afin de ne pas rester dans un flou terminologique.
Dans son Dictionnaire du théâtre, à l’entrée « représentation théâtrale », Patrice Pavis montre pourquoi il est utile de recourir à d’autres langues pour définir ce qu’il appelle dans un premier temps « la présentation théâtrale de l’œuvre [72] ». En français, le terme représentation théâtrale revêt deux aspects, comme deux faces d’une même médaille : à la fois « répétition d’une donnée préalable », c’est-à-dire « d’une chose qui existe déjà (sous une forme textuelle notamment, et comme objet des répétitions) avant de s’incarner sur une scène », et « création temporelle de l’événement scénique [73] ». En anglais, le terme theatrical performance insiste davantage sur « l’idée d’une action accomplie dans l’acte même de la présentation [74] », ce qui engage à la fois la scène et la salle de théâtre. En allemand, les particules spatiales dans les mots composés Vorstellung, Darstellung ou Aufführung, ancrent la notion dans l’espace, au sens de poser là pour donner à voir – au sens de rechercher l’effet visuel –, soulignant ainsi la dimension spectaculaire de la représentation théâtrale.
L’idée de la représentation, qualifiée de « classique », selon laquelle le texte dramatique et la scène de théâtre restent tout à fait indépendants l’un de l’autre – la représentation étant perçue comme « la partie extérieure et secondaire du texte [75] » – existe depuis Aristote et perdure jusqu’au XXe siècle d’après la datation de Pavis. Un point intéressant à noter : dans son court article, il n’évoque – comme d’autres théoriciens et historiens du théâtre ont pourtant coutume de le faire – ni André Antoine, ni le Duc de Meininger, ni Constantin Stanislavski, ni Edward Gordon Craig, ni Vsevolod Meyerhold, ni Max Reinhardt…, mais cite longuement un extrait de Lettres sur le langage d’Antonin Artaud paru en 1938 :
Tant que la mise en scène demeurera, même dans l'esprit des metteurs en scène les plus libres, un simple moyen de présentation, une façon accessoire de révéler des œuvres, une sorte d'intermède spectaculaire sans signification propre, elle ne vaudra qu'autant qu'elle parviendra à se dissimuler derrière les œuvres qu'elle prétend servir. Et cela durera aussi longtemps que l'intérêt majeur d'une œuvre représentée résidera dans son texte, aussi longtemps qu'au théâtre – art de la représentation, la littérature prendra le pas sur la représentation appelée improprement spectacle, avec tout ce que cette dénomination entraîne de péjoratif, d'accessoire, d'éphémère et d'extérieur [76] .
Voilà qui prouve qu’au milieu des années 1930, la domination littéraire du théâtre est toujours bien d’actualité, cinquante ans après les premières mises en scène d’André Antoine [77] . Dans son article sur « la querelle sur les origines de la mise en scène », Alice Folco rappelle que la figure d’Antoine, pourtant perçue comme pionnière dans « l’avènement du metteur en scène », ne prend en réalité une place significative qu’à partir des années 1960 et que « la multiplicité des origines revendiquées pour la naissance de la mise en scène moderne au cours de ces dix dernières années incite, à elle seule, à la plus grande prudence [78] ».
Les contributions, depuis vingt ans, ont en effet été si nombreuses et si riches, qu’il n’est pas possible de les citer de manière exhaustive, mais on peut au moins ajouter l’ouvrage très complet de Mara Fazio et Pierre Frantz, La Fabrique du théâtre. Avant la mise en scène (1650-1880) [79] , dans lequel on découvre le rôle important de figures de régisseurs parfois considérées elles-aussi comme pionnières. Mais dans le fond, Folco a raison lorsqu’elle insiste sur le fait que, « finalement, la mise en scène n’a probablement été inventée nulle part, et par personne – ou partout en Europe, par de nombreuses personnes, au choix – et qu’elle a évolué par étapes, en franchissant en permanence des micro-seuils [80] ».
L’essentiel est ailleurs : au-delà des questions de datation, il y a un point de passage [81] après lequel le théâtre existe avec mais aussi en dehors de la littérature. Didier Souiller montre que « l’histoire littéraire du texte théâtral va dans le sens de sa perte d’autonomie [82] ». Cette autonomisation est à l’origine de la possibilité même que le théâtre soit perçu comme un art à part entière. Mais peut-on pour autant aller jusqu’à penser, comme Dario Fo, que le théâtre n’a pas de compte à rendre à la littérature et n’existe qu’en dehors d’elle ?
[Il faudrait] ôter de la tête des acteurs que le théâtre ne serait que de la littérature mise en scène, ornée de décors, et jouée au lieu d’être lue. Le théâtre n’a rien à voir avec la littérature, quoi qu’on fasse pour l’y réduire [83] .
Ce qui est certain, c’est qu’au tournant du XXe siècle, on assiste au passage de la représentation « classique » à une représentation « moderne », usuellement désignée par « mise en scène [84] », ce qui engage à la fois un changement de terminologie, mais aussi la remise en cause de la perspective textocentriste, définie par Jean-Marie Thomasseau comme une « attitude humaniste qui consiste à croire que toute pièce écrite par un auteur cèlerait en son sein une mise en scène idéale à dévoiler [85] ». Le rapport aux didascalies en a longtemps été le symptôme : respectées d’abord à la lettre, elles n’ont aujourd’hui plus de rôle injonctif et les metteurs en scène les considèrent (ou non) avec une liberté assumée. Ils renoncent donc à une conception hégélienne du théâtre, pour qui « l’art théâtral se borne à la récitation, à la mimique et à l’action, c’est la parole poétique qui reste l’élément déterminant et dominant [86] ». En effet, la représentation ne serait rien d’autre qu’une forme d’extériorisation du texte, de sorte qu’il ne pourrait y avoir qu’une seule mise en scène légitime, réalisée à partir d’une simple lecture du texte. D’ailleurs, comme le souligne Catherine Naugrette, si Hegel reconnaît
que le théâtre réclame une exécution autre que celle de la poésie épique ou lyrique, une exécution spécifique et extérieure, c’est pour mieux affirmer la supériorité du texte sur l’exécution, voire séparer, comme chez Aristote, la poésie dramatique de l’art de la représentation [87] .
Pourtant, en ce qui concerne Hegel, les choses ne sont pas si simples. Les extraits cités par Pavis et Naugrette – issus de la fin de l’introduction au chapitre II du volume La Poésie de son Esthétique : « De l’exécution extérieure de l’œuvre d’art dramatique » – ne disent rien de la fin du même chapitre, où l’on découvre ce passage surprenant dans lequel l’acteur est élevé « à son degré de perfection le plus élevé, une nature géniale, richement douée » :
C’est que l’acteur ne doit pas seulement se pénétrer de l’esprit du poète et du rôle qu’il est chargé de jouer et y adapter, tant intérieurement qu’extérieurement, sa propre individualité, mais il doit encore savoir, par ses propres moyens, compléter son rôle, combler des lacunes, trouver des transitions, bref interpréter le poète par son jeu, nous révéler ses intentions les plus secrètes, faire monter à la surface des perles qui se cachent dans la profondeur [88] .
À la fin de sa démonstration, Hegel semble donc avoir dépassé, au sens hégélien même de aufheben, une conception de la représentation comme simple « exécution extérieure » du texte dramatique, pour en souligner la dimension heuristique et critique. En « interprétant », c’est-à-dire en jouant un rôle, le comédien traduit l’auteur, rend compréhensible ce qui est dense, donne un sens personnel parmi d’autres possibles.
La rupture dont je parlais et dont on comprend qu’elle a été une somme de micro-seuils, parfois même oubliés des critiques, permet en tout état de cause à la mise en scène de prendre son envol et d’affirmer que ce sont « la mise en scène et la représentation qui donnent son sens au texte [89] » : « La diversité des représentations imaginables multiplie le sens du texte qui n’est plus le centre fixe de l’univers théâtral, comme on l’a longtemps cru [90] ». Les termes mise en scène et représentation ne peuvent donc plus être de simples synonymes, celui de mise en scène ne renvoyant non au produit final mais bien au processus de création.
Pour autant, il n’est pas question de renoncer au texte littéraire ni même de le dévaloriser, et encore moins de se livrer « à un véritable fétichisme de la scène [91] ».
On peut ainsi être frappé par la mise en avant de la dimension littéraire du théâtre chez ceux qui, les premiers, vont rénover la mise en scène : c’est au nom du respect des auteurs que certains ont voulu changer les pratiques scéniques. […] Il ne s’agit plus de se contenter de situer l’action dramatique dans des décors souvent assez neutres pour être réutilisés, mais bien de réfléchir au sens profond de l’œuvre avant d’en réaliser la mise en scène [92] .
Mais avant de poursuivre, arrêtons-nous quelques instants sur le couple particulier, et souvent polémique, que forment texte et scène.
III. Le débat entre texte et scène
Retour sur une polémique
On le sait, « le conflit entre gens de théâtre et gens de lettres dure depuis toujours [93] ». Déjà dans la Poétique, Aristote tranche sans hésitation en faveur de la supériorité des poètes et de la fable sur le spectaculaire.
Quant au spectacle, qui exerce la plus grande séduction, il est totalement étranger à l’art et n’a rien à voir avec la poétique, car la tragédie réalise sa finalité même sans concours et sans acteurs. De plus, pour l’exécution technique du spectacle, l’art du fabricant d’accessoires est plus décisif que celui des poètes [94] .
Après sa redécouverte au cours du XVIe siècle par les humanistes, la Poétique ne cessera d’ailleurs d’être au cœur de la réflexion sur le théâtre, et, aujourd’hui encore, elle est toujours source de discussions et de conflits. L’ouvrage de Florence Dupont paru en 2007, Aristote ou le vampire du théâtre occidental, n’a laissé personne indifférent dans sa dénonciation d’« une véritable mystification en édifiant à partir de la Poétique d’Aristote, regonflée et musclée au miracle grec, une doctrine universaliste et littéraire du théâtre des origines et des origines du théâtre [95] », et d’une invention d’un « théâtre littéraire, élitiste, austère, sans corps ni musique ni dieu : un théâtre de lecteurs [96] » au détriment d’un théâtre du rituel et du jeu. Cette critique s’inscrit au cœur de la polémique née au Festival d’Avignon 2005 [97] entre texto- et scénocentristes, mettant en lumière la nécessaire « révolution intellectuelle rest[ant] à faire [pour] change[r] les termes du débat, afin qu’on sorte […] du conflit qui n’a pas lieu d’être, entre théâtre à texte et théâtre du corps [98] ».
Cet ouvrage de Florence Dupont a tellement secoué la critique française que le jury de lettres de l’École Normale Supérieure Ulm a fait d’une citation de l’autrice le sujet de composition française de 2008 (filière B/L) et justifié ainsi son choix : « Les propos de Florence Dupont énoncent une idée provocante pour des littéraires : le théâtre ne serait qu’une performance d’acteurs et de metteurs en scène, sans relation avec ce qu’on appelle communément la littérature [99] ». Par ailleurs, le fait que Denis Guénoun fasse paraître dans Le Monde des livres en octobre 2007 un article sous le titre « Merci Aristote [100] », dans lequel il fustige le propos général de l’ouvrage de Florence Dupont, illustre très bien l’émotion suscitée.
L’ambition est de s’en prendre au récit, à la Fable (dont Brecht chanterait la dictature), au drame, à la fiction, et surtout au Texte, dont Aristote aurait imposé la supériorité littéraire. […] On pourrait croire que, depuis un siècle, beaucoup a été fait par les metteurs en scène, et quelques philosophes, pour soustraire les planches à l’hégémonie étroite d’une parole. Ou que le procès a été instruit, et jugé, des dérives intellectualistes d’un brechtisme de fin d’époque. Mais non : l’invention de la mise en scène n’est elle-même qu’une excroissance du littéraire, qui traite la scène comme un livre. […] Le propos n’est donc pas de corriger des excès, ou d’en appeler à une meilleure prise en compte de la pratique scénique. Ce qui est mis en branle, c’est une opération générale de liquidation [101] .
À ce stade de l’analyse, dépassons les polémiques pour un temps et revenons au nœud central de ce débat entre le texte et la scène pour voir s’il est possible, dans les pas de Guy Ducrey, d’espérer, « après tout, […] échapper à ces dilemmes infernaux – le geste ou la parole ; le cirque ou le théâtre ; le spectacle ou le livre [102] ».
Texte écrit/texte joué
Notre tradition européenne, profondément « texto-centrique », a toujours considéré le texte comme le centre de l’activité théâtrale – le texte dans sa dimension écrite, et strictement littéraire. Or, le théâtre n’est pas toujours né des livres ! La littérature quand elle arrive au théâtre, est souvent seconde, dérivée, produite par ce qui s’est passé dans la représentation. Dans le théâtre de Shakespeare, de Goldoni, de Marivaux, et évidemment de Molière, le texte n’était pas un point de référence fixé avant le passage à l’acte des spectacles [103] .
Bruno Tackels a raison de rappeler ce qui devrait être pourtant une évidence : on oublie encore trop souvent que Shakespeare le premier a donné à entendre ses pièces sur la scène, bien avant que le public ne dispose de la version écrite. Dans son cas, ce sont même des versions écrites dont il n’a pas toujours été facile/possible de trancher laquelle s’avérait « la bonne ». Cette pratique n’a jamais disparu, c’est encore très souvent le cas sur la scène contemporaine, notamment pour ce que l’on a coutume de nommer les écritures de plateau [104] . Il faut donc distinguer l’analyse de textes écrits au plateau puis publiés, de « la transmutation du phénomène littéraire en phénomène spectaculaire [105] ».
Pour ce faire, le sémiologue Tadeusz Kowzan propose une classification sous forme d’un diptyque. Le premier volet du diptyque « rapports texte écrit/représentation », analyse « la transformation d’un texte fixé par l’écriture en texte oral », et Kowzan note, non sans pertinence, que ce phénomène est « le plus banal et le plus universel » et qu’il pourrait expliquer « la prédominance de l’approche "littéraire" dans la réflexion théorique sur le théâtre, jusqu’au XXe siècle ». Il distingue une première catégorie fort classique selon laquelle, « tout texte interprété oralement peut être considéré comme une sorte de spectacle ». La deuxième examine « le passage du texte écrit à une représentation sans paroles ». Spectacle (partiellement) muet ou « parties du texte transposées en signes non verbaux ». Le deuxième volet du diptyque s’attache à analyser le passage « de la représentation au texte écrit ». Là aussi, deux catégories sont à distinguer : une première dans laquelle « un texte oral est noté a posteriori au moyen de l’écriture et devient un texte écrit ». Si cette pratique se rencontre dès l’Antiquité et ponctuellement au fil de l’histoire, Erwin Piscator est, au XXe siècle, « le précurseur » des écrivains de plateau « qui confient à l’espace scénique le soin d’écrire le spectacle » avant de le mettre par écrit. Et une deuxième catégorie, celle « d’une représentation sans paroles inspirant un texte écrit ».
Même si cette classification se veut parfois simplificatrice, elle a le mérite de reposer les termes du débat de manière claire : dans ces rapports entre texte écrit et représentation, « quelles sont les conditions indispensables pour qu’il y ait spectacle » ? Et la réponse, appelée « transcodification » ou « transcodage », indique que « du texte écrit à la représentation, on passe d’une couche unique de signes à deux, trois ou plusieurs couches de signes superposés » [106] . Ce qui n’est pas sans rappeler à nouveau la définition de la théâtralité de Barthes, que Kowzan ne manque d’ailleurs pas de convoquer dans sa conclusion.
Mais c’est la formulation qui suit la référence à Barthes qui doit retenir toute notre attention : « Un texte écrit, celui d’avant la représentation comme celui d’après, a rarement des correspondances avec toutes les couches de signes exploitées dans le spectacle ». Puisque le texte, en tant qu’ensemble des énoncés linguistiques écrits, ne correspond pas en totalité au spectacle théâtral qui utilise la « multiplicité des supports matériels et des systèmes signifiants propres à l’art théâtral » [107] , il est indispensable de s’interroger sur la nature du processus à l’œuvre dans les points de passage, mais aussi sur les enjeux de ce passage. Car, « le passage, lui, n’assure pas la transition d’un lieu à un autre : il fait apparaître un nouveau lieu, une configuration jusqu’ici impensée [108] ». Celui qu’il faut donc appréhender.
IV. Le point de vue du metteur en scène
Si l’on acte que « la représentation théâtrale constitue réellement une œuvre autonome – une œuvre qui a pour auteur le metteur en scène [109] », comment le dialogue entre texte et scène, entre auteur et metteur en scène, entre œuvre littéraire et œuvre d’art dramatique, peut-il alors s’organiser ? Car, ce qui intéresse le metteur en scène n’est plus
ni le texte en soi, ni la mise en scène pour elle-même, mais les rapports qui les unissent et le sens que va prendre l’œuvre au contact du plateau et par l’entremise des acteurs devant un public donné, dans des circonstances historiques et sociales déterminées [110] .
Cette question des rapports qui se nouent de l’un à l’autre, et réciproquement, donc de la relation dynamique qu’entretiennent texte et scènes, est conçue comme le postulat de cette proposition théorique, sous-tendu par l’idée que la question du sens ne se pose que dans l’interaction, dans le mouvement, dans la mise en relation.
Théoriquement, il est possible d’affirmer qu’il y a autant de choix de mises en scène que de metteurs en scène ; pourtant, il existe malgré tout deux manières principales de se confronter au texte : il y a les metteurs en scène qui cherchent à « avoir un regard sur », c’est-à-dire qui développent un point de vue souverain (et même parfois surplombant) sur la pièce, et puis il y a ceux qui travaillent en « ayant des égards avec » [111] , au sens d’égards pour le texte ou le réel – compris au sens des matériaux qui président à l’écriture –, et développent alors un point de vue en relation. Ce qui apparaît en tout cas avec évidence, c’est qu’on ne peut plus nier aux metteurs en scène un statut de véritables auteurs.
Entre réalité augmente et médiation
En tant qu’auteurs, les metteurs en scène seraient donc ceux qui augmentent le texte, puisque le terme auteur, formé à partir du latin auctor, lui-même issu du verbe augeo, augere – faire croître –, signifie que l’auteur est celui qui vient ajouter quelque chose, augmente l’existant. Barthes, en proclamant La Mort de l’auteur il y a un peu plus de cinquante ans, constate à la fois l’avènement du lecteur, mais aussi celui de l’idée que l’écriture est infinie et qu’on ne peut « imposer à un texte un cran d’arrêt [112] ». Et si l’on considère que le texte est bien « un espace à dimensions multiples », « un tissu de citations issues des mille foyers de la culture », et que « tout texte est écrit éternellement ici et maintenant [113] », alors il devient assez évident que le metteur en scène, en tant qu’écrivain d’un objet en soi, augmente le texte dramatique, dont la place n’est pourtant jamais ravie ; elle se voit seulement augmentée.
En ce sens, le travail du metteur en scène ne doit pas nécessairement « se payer de la mort de l’Auteur [114] » ; il est le médiateur, « la médiation nécessaire entre un texte et un spectacle [115] ». Pour autant, le terme médiation supposant une dose de tensions entre le texte et le spectacle, les choses ne semblent pas aller d’elles-mêmes : quelles sont donc ces forces à l’œuvre entre le texte et le spectacle ? La tension ressentie est liée, à la fois, à un équilibre toujours précaire lors de la représentation, mais aussi au travail de mise en scène qui articule le travail critique et la création scénique autour de la question du point de vue, dans lequel s’exprime « expérience personnelle, vécue, et discours sur cette expérience [116] » du metteur en scène : il travaille en effet sur des « décalages dans l’espace et dans le temps » et « opère des déplacements dans l’ordre des choses, introduit d’autres rapports, d’autres relations [117] ».
Entre critique et création
Cette notion de point de vue n’est pas sans présenter une difficulté pour l’analyse, car les mises en scène sont par définition éphémères. Même si les captations vidéo peuvent rendre des services inestimables, aucune ne peut rendre ce qui se passe dans la salle de spectacle, et de ce fait, pour le spectateur, tout se joue toujours en un éclair. S’il paraît assez évident que chaque metteur en scène défend un point de vue, il est plus étonnant de découvrir, que, par exemple, pour Thomas Ostermeier, les textes du répertoire peuvent l’amener à défendre des points de vue différents, pas nécessairement opposés, mais qui ne permettent pas une simultanéité de traitement sur scène. La question du choix se pose donc à nouveau ici. Ostermeier dit notamment qu’il pourrait mettre en scène quatre ou cinq versions d’Hamlet, car il voit dans la pièce plusieurs noyaux différents, et, dans chacune de ses mises en scène, il ne peut travailler que sur un seul de ces noyaux [118] . L’interprétation ici est donc plurielle.
Pouvoir dire cela, signifie qu’il procède en amont à un véritable travail d’analyse et d’interprétation critique du texte de théâtre, et en ce sens, « le metteur en scène accomplit avec les instruments dont il dispose un travail d’analyse qui n’est pas sans rappeler celui accompli par la critique universitaire [119] ". Création et critique peuvent ou, plus exactement, doivent être pensées conjointement, l’espace théâtral étant peut-être le lieu privilégié de leur pas de danse. Bernard Dort, l’un des piliers de l’approche des relations entre texte et scène [120] , l’a d’ailleurs souligné il y a bientôt soixante ans :
Mettre en scène une œuvre, n’est-ce pas en effet la soumettre à la critique de la scène, puis à celle de la salle ; vérifier si elle peut encore fonctionner aujourd’hui ? […] Il y a convergence entre le travail du critique qui consiste à nous dire l’œuvre dans un autre langage, et celui du metteur en scène et de ses collaborateurs, qui est précisément d’en trouver l’équivalent sinon dans un autre langage (peut-on parler du langage de la scène ?), du moins dans les formes de la représentation théâtrale : l’espace de la scène, le corps et la parole des comédiens… Dans l’un et l’autre cas, il s’agit de redonner à l’œuvre du sens à travers une forme nouvelle ou ce qu’on appelle un « méta-langage » et d’en permettre ainsi une compréhension toujours renouvelable [121] .
Le texte : un crible pour la mise en scène ?
Dans cet esprit, le texte apparaît finalement comme une trame, « une forme dans un tissage, dans une texture, qui demande, à chaque fois, qu’on en retraverse les effets de composition », selon la jolie formule de Marie-José Mondzain [122] . Si donc le texte est à envisager comme un crible, deux questions se posent alors à nous : qu’est ce qui s’y trouve retenu ? Et quelle est la nature de ce qui passe au travers ? Cette notion a énormément retenu l’attention de l’excellent lecteur de Platon qu’est Jacques Derrida, alors même que cette figure du crible lui résiste dans sa lecture du Timée :
Il y a là, dans le Timée – continue-t-il –, une allusion figurale [il faut comprendre ici l’allusion au crible] que je ne sais pas interpréter et qui me paraît pourtant décisive. Elle dit quelque chose comme le mouvement, la secousse […], le séisme au cours duquel une sélection des forces ou des semences a lieu, un tri, un filtrage là où pourtant le lieu reste impassible, indéterminé, etc. [123] .
Pour Derrida, la khôra est le lieu de tous les possibles, à la fois « réceptacle, porte-empreinte, mère ou nourrice [124] », et c’est aussi ce dont la philosophie ne peut pas parler directement, ce qui justifie son intérêt marqué durant de longues années.
Mais le théâtre n’est pas dans cette résistance ou même dans cette impossibilité face à la khôra : c’est même peut-être elle qui lui permet de justement définir cet espace entre le texte et la scène en tant que « lieu qui témoigne du caractère à la fois nécessaire et fictif de toute frontière et de toute sélection [125] ». En effet, qu’il s’agisse de pièces du répertoire classique ou du théâtre contemporain, lorsque le texte dramatique reste au cœur de la mise en scène, le texte en tant qu’objet littéraire se superpose, s’entrecroise, s’entrechoque même parfois avec le plateau.
L’œuvre de théâtre se met, d’une certaine façon, à dialoguer avec elle-même hors de la volonté de celui que l’on pourrait appeler son proto-créateur. […] L’un et l’autre [le texte et la mise en scène] sont continuellement en osmose et les échanges et les incessants va-et-vient qui les font conjointement se définir, sont tout aussi déterminants pour l’expression théâtrale que les éléments stables qui établissent la nature propre de chacun. C’est dans cette double aimantation que se joue le phénomène théâtral plus que dans l’idée d’habillages successifs et variés d’un texte immobile qui ne serait perçu que comme un mannequin à vêtir [126] .
En d’autres termes, le texte est une des épaisseurs du théâtre, dont les contours ne sont pas strictement limités, et si je ne souscris pas à l’affirmation de Didier Plassard qui défend l’idée que « l’art du théâtre et celui de l’écrivain relèvent de deux sphères distinctes [127] », je partage en revanche celle qui veut que « leurs rapports so[ie]nt féconds [128] ». La nature du texte de théâtre est fondamentalement spectrale, en ce sens qu’elle est la trace de ce qui a été, la trace qui persiste de quelque chose qui n’est plus et que le metteur en scène cherche à faire revivre, l’une des épaisseurs de la représentation théâtrale. Comme l’avait déjà écrit Souriau en son temps, « pour la musique, la danse, les arts dits du temps, la loi structurale essentielle est le glissement du point Je, l’impossibilité d’une contemporanéité du témoin et de toute l’œuvre [129] ».
Approches méthodologiques
I. L’éphémérité : un enjeu méthodologique
« Le spectacle théâtral, par définition éphémère, n’est ni (techniquement) reproductible ni répétable ni notable », ce qui lui confère une « singularité énonciative propre au spectacle vivant [130] ». Voilà qui pose la question du principe de notation qui préside à toute analyse : comment analyser un objet dont on n’a pas de traces ? Quels sont les outils à la disposition du chercheur ?
L’expérience de la représentation en présentiel, expérience – lorsqu’on la répète – qui permet de mesurer que le théâtre est un art toujours en mouvement, un art de l’ici et du maintenant, est le premier. Il existe aussi des techniques d’archivage, qui, au théâtre, sont de trois ordres : 1/ les descriptions verbales de la représentation (dans les recensions de critiques) et tout ce qui est de l’ordre de l’appareil paratextuel (cahiers de mise en scène, notes, programmes, dossiers de presse…) ; 2/ les photographies dont on comprend facilement la limite car elles ne restituent qu’un instant figé, mais elles peuvent malgré tout permettre de réactiver un souvenir effacé ; 3/ les captations vidéo, très utiles car elles ne font pas disparaître le côté vivant, en mouvement, mais parfois, « en fonction du nombre de caméras, de leur emplacement, de leur mouvement », la vidéo reflète davantage « une écriture-caméra que le rythme propre de la représentation [131] ».
Faut-il alors déplorer « le caractère éphémère de la trace qui érige l’entreprise de notation théâtrale en geste désespéré [132] » ? Non, car la parfaite reproduction du spectacle ne pourrait qu’être synonyme de sa disparition, la dimension vivante lui étant première. Cela étant, ce constat peut expliquer les difficultés pour les chercheurs en littérature, à étudier en profondeur les liens entre l’objet littéraire et l’objet scénique. Si les travaux de Guy Ducrey ont marqué l'entrée de la danse dans le champ d'étude des comparatistes et permis de passer de l’analyse « de l’œuvre d’art aux arts vivants [133] », avant eux, seules les œuvres immuables aux traces tangibles étaient l’objet d’analyses et de recherches. Aujourd’hui, il est devenu possible d’envisager une œuvre comme quelque chose qui passe et ne reste pas [134] . Aux chercheurs donc de définir, mobiliser ou imaginer des outils permettant d’étudier ces œuvres éphémères.
Et il y a des raisons d’être optimiste. Il existe notamment en France depuis le milieu des années 2000, des recherches et publications en génétique théâtrale dont Françoise Simonet-Tenant a recensé les plus importantes [135] . Et le développement de ces recherches est un atout fort pour sensibiliser auteurs, metteurs en scène, public et institutions à la nécessité de mettre en œuvre les conditions pour que la conservation des archives théâtrales devienne une évidence [136] , même si ces archives ne remplaceront jamais l’expérience du théâtre vivant.
Associer expérience spectaculaire, différents types d’archives et travail sur le texte de la représentation et/ou le texte dramatique permet donc de travailler au cœur de cette zone seuil où il y a tant à apprendre, lieu de la « dialectique de l’accompli et de l’inaccompli », qui interroge le rapport entre la réussite d’un geste théâtral ponctuel et la possibilité de revenir au texte-source » [137] .
Cet espace complexe est un véritable « défi pour les chercheurs qui courent après ces œuvres en mouvement [138] » dont les scripteurs « participent soit du pôle de l’écrit des dialogues et de ses discours d’accompagnement, soit de celui de la création scénique sans toutefois qu’entre ces deux extrêmes ne cesse une interaction toujours décisive [139] ».
Si le texte dramatique « n’est qu’une partie d’un ensemble qui est à la fois un spectacle et un art, et qui, de plus, appartient à la "littérature" [140] », on comprend mieux ce qui oppose le théâtre et le cinéma, l’œuvre théâtrale et le film, et les questionnements méthodologiques qui en découlent. Lorsque nous allons au cinéma, nous allons voir le film d’un réalisateur, basé sur un scénario, lequel est foncièrement différent de l’œuvre cinématographique qu’est le film. Or, les choses sont bien plus ambiguës au théâtre en raison du statut du texte théâtral et de la perception qu’on en a. Si « le film est une œuvre qui s’apparente au genre littéraire, puisque comme le roman ou le poème, il est immuable », le texte dramatique existe à la fois en-dehors de toute scène et dans ses multiples possibles actualisations scéniques, à la différence du scénario qui n’a pas d’existence propre. Le texte théâtral est en effet toujours de l’ordre d’un « en puissance », d’un virtuel en attente de s’actualiser ; en ce sens, il n’est pas un texte comme un autre. Ce paradoxe se décline d’ailleurs encore sur un autre mode, au sens où « le texte théâtral est [le plus souvent] la production d’un seul », alors que « la représentation est l’œuvre d’une collectivité (metteur en scène, comédiens, praticiens divers et public) » [141] .
Lorsque la création repose sur un texte, il n’est donc pas envisageable de séparer texte et mise en scène dans l’analyse du théâtre, et cela implique d’être en mesure d’analyser un certain nombre d’opérations dramaturgiques sur le texte qui engagent notamment l’adaptation et la traduction du texte initial. Pour lever tout malentendu, le terme dramaturge/ie est entendu ici au sens allemand du terme : le dramaturge n’est pas l’auteur du texte dramatique, mais celui que l’on appelle aujourd’hui en France un conseiller littéraire, souvent collaborateur d’un metteur en scène. De sorte que ce qui nous intéresse ici est ce que Joseph Danan nomme « la fonction nommée dramaturgique » que l’auteur et le dramaturge « incarnent ainsi qu’à la charge théorique et pratique de cette notion » [142] .
Mais rendre compte « des ondes circulaires nées de l’impact d’une représentation théâtrale [143] » impose également un lien direct et étroit avec les études de réception, car, on ne peut oublier que l’œuvre théâtrale « arrivée ou non à représentation, après l’impulsion initiale donnée par un ou plusieurs auteurs puis relayée par divers créateurs, demeure en mouvement, suscite elle-même, sans jamais être altérée par ce jeu énergétique des écritures, les conditions de ses possibles re-créations [144] ».
II. Repenser le texte au théâtre
Pour Thomasseau,
une pièce peut se présenter comme la traduction d’un texte étranger, l’adaptation par diverses manipulations, d’une autre pièce dans la même langue, ou l’ajustement pour la scène d’un texte romanesque ou d’une autre nature [145] .
Cette dimension triple de l’adaptation théâtrale, à la fois traduction (dont on se souvient qu’il signifie « conduire à travers » et souligne ainsi la dynamique du passage vers la scène), adaptation « par manipulation » ou « ajustement » d’un texte d’une autre nature que théâtrale est essentielle, pour saisir le « caractère polymorphe, instable et erratique [146] » du texte.
Le terme adaptation ne semble, à première vue, poser aucun problème de compréhension, c’est un phénomène ancien : déjà les tragédies grecques adaptent les mythes en les dramatisant et Shakespeare crée la tragédie historique à partir de chroniques [147] ; Racine, pourtant érigé en modèle de la perfection de la dramaturgie classique française, a également adapté les tragédies d’Eschyle ou d’Euripide, ce que souligne très justement François Regnault :
Quand Racine écrit Phèdre, c’est, si je puis dire, pour éviter qu’on représente l’Hippolyte d’Euripide ou la Phèdre de Sénèque, qu’il est pourtant le premier à admirer. Mais d’une certaine façon, sa Phèdre liquide les Phèdre du passé, l’Amphitryon de Molière est fait pour qu’on n’ait pas besoin de représenter celui de Plaute. Shakespeare de même prend des modèles du passé pour écrire des pièces présentes qui les remplacent et les embellissent. Le problème du statut d’une pièce de théâtre ne se pose pas jusqu’à l’époque moderne […] C’est au XXe siècle qu’on commence à s’interroger sur la représentation des pièces du passé. C’est précisément au moment où la mise en scène contemporaine apparaît qu’elle se pose la question du passé, que d’une certaine façon la pièce devient un « chef d’œuvre », un trésor qui irradie dans l’ombre et qu’on peut remettre dans la lumière [148] .
Tout se passe donc en fait comme si, pendant longtemps, l’adaptation avait été la norme. Et pourtant, pendant une période tout aussi longue, l’adaptation en tant que processus est restée un territoire largement inexploré. C’est seulement depuis quelques années qu’ont été menées des recherches théoriques permettant de décrire et d’analyser avec précision ce processus. La revue de questions théoriques d’André Petitjean et Armelle Hesse-Weber publiée en 2011 [149] offre un très bon état de la question. Dans leur approche sémiologique , les auteurs distinguent quatre apports théoriques essentiels, et notamment ceux des théoriciens de « l’adaptation comme forme d’intertextualité et pratique hypertextuelle [150] », en particulier Gérard Genette, dont les deux auteurs proposent un « tableau récapitulatif des transformations observées [151] , complété par les analyses de Gérard-Denis Farcy « L’adaptation dans tous ses états » [152] note154, qui a pour objectif de définir le phénomène mais aussi de proposer « une terminologie cohérente et spécifique [153] ». Confrontons ces éléments aux définitions apportées par deux grands spécialistes du théâtre que sont Patrice Pavis et Michel Corvin.
Pavis distingue trois sens du terme adaptation. 1/ « transposition ou transformation d’une œuvre, d’un genre dans un autre », processus qu’il qualifie de « dramatisation », « d’opération sémiotique de transfert [154] » ; 2/ « travail dramaturgique à partir du texte destiné à être mis en scène » qui met en œuvre un certain nombre de « manœuvres textuelles » ; 3/ l’adaptation est comprise au sens de traduction, mais « la frontière entre les deux pratiques » n’est pas facile à tracer :
Il est remarquable que la plupart des traductions s’intitulent aujourd’hui adaptations, ce qui tend à accréditer le fait que toute intervention, depuis la traduction jusqu’au travail de réécriture dramatique est une recréation [155] .
Anne-Françoise Benhamou (en charge de la notice adaptation dans le Corvin) ne distingue que la « transformation d’un texte non dramatique en texte pour la scène » de « la traduction d’une œuvre dramatique, surtout quand elle vise, plus qu’une fidélité purement littéraire, à retrouver, ici et maintenant, l’efficacité théâtrale du texte original ». La dimension de travail dramaturgique sur un texte dramatique ne transparaît que lorsqu’elle évoque des exemples comme Brecht et Peter Brook, mais n’est pas explicitée comme chez Pavis. Cela étant, dans la droite lignée de ce dernier, Benhamou note qu’« écriture, traduction et adaptation ont aujourd’hui partie liée » [156] .
Ajoutons également que le terme « actualisation » parfois usité dans certaines recensions ou articles de revue pour parler d’adaptation, n’est pas pertinent, puisque dans le cas d’une actualisation, en tant qu’opération sur un texte, « seuls la datation et éventuellement le cadre de l’action sont modifiés [157] ».
Cela étant, deux évidences s’imposent lors de l’analyse d’un texte dramatique référent ou adapté. 1/ Une des choses qui différencient le texte dramatique du roman et de la poésie, c’est la présence de ce que l’on nomme didascalies, indications scéniques ou « paratexte théâtral [158] » et qui ont à voir, non avec le « contenu de la communication », mais avec le « contexte de cette communication ». Cette particularité du texte de théâtre permet de mettre à jour « une autre voix qui s’exprime, non assimilable à la voix d’un personnage, mais non assimilable non plus à celle d’un narrateur ou de l’auteur » [159] , ce que Souiller a appelé « la voix du didascale ». Il montre d’ailleurs avec acuité comment cette voix « formule une toute première étape de la mise en scène » et peut se trouver en conflit avec la voix du metteur en scène dès lors que le texte de régie devient « le lieu d’affrontement de deux volontés », car « la voix du metteur en scène s’élabore dans une relation problématique avec celle des didascalies » [160] . Le paratexte compris comme « lieu d’intersections et de passages où les signes se mêlent et se superposent [161] », comme « un espace dynamique qui offre une signification indécidable à parcourir sans fin [162] » doit donc être au cœur de l’analyse.
2/ Le texte dialogué est à juste titre « considéré comme la forme fondamentale et exemplaire du drame [163] » et nécessite une analyse approfondie, dans la mesure où « le langage dramatique constitue, par nature, un compromis entre deux langages, l’écrit et le dit [164] », et ce compromis, que l’on peut aussi envisager comme un nouvel espace entre, mérite toute notre attention, d’autant que dans le texte adapté, le texte dialogué peut se voir modifié, et ainsi « commence son errance en se prêtant déjà à toutes les refontes possibles [165] ». Et il est vrai que le texte de certaines adaptations (texte scénique) ne correspond pas toujours exactement à ce qui est dit par les comédiens sur scène. Ce qui entraîne un double décalage, une double transposition en quelque sorte, entre d’une part le texte référent et le texte adapté, mais aussi entre le texte scénique adapté et le texte joué ; décalage que Thomasseau désigne comme
un affrontement singulier entre le comédien et les dialogues qu’il devra savoir « par cœur » ou qu’il aidera à composer, à recomposer et à mettre en espace dans une aire définie, avec des présupposés esthétiques arrêtés à l’avance ou qui surgiront du travail en cours [166] .
Reste donc la question des péritextes qu’il convient de distinguer : il existe les programmes officiels des théâtres où la pièce est créée, qui contiennent souvent une note d’intention du metteur en scène, mais aussi les programmes rédigés et publiés par l’ensemble des théâtres qui co-produisent ou programment la pièce. Il faut également prendre en compte les écrits de réception, j’entends par là les recensions des pièces ainsi que les billets et articles publiés dans la presse, et ils sont souvent légion. Enfin, bien sûr, lorsqu’ils existent, il est essentiel de réserver une place de choix aux textes théoriques dans lesquels le metteur en scène a pu formaliser sa recherche esthétique, car,
depuis que le metteur en scène a acquis un statut de créateur à part entière, les manuscrits dans lesquels il a formalisé ses théories et ses croyances esthétiques prennent la configuration d’une œuvre dont les mises en scène ne seraient en somme que la partie émergée, la démonstration visible [167] .
III. Les outils d’analyse du texte théâtral
L’idée même de se poser cette question peut sembler étrange, tant les outils d’analyse sont à la fois nombreux et connus. Je souhaiterais ici me focaliser sur ceux développés au sein des études théâtrales, moins connus des littéraires, et notamment les modèles d’analyse de Souiller et Pavis.
Dès le premier chapitre de son ouvrage L’Analyse des textes dramatiques de Sarraute à Pommerat, Pavis note que,
si l’étude des textes dramatiques a été si négligée au cours de la seconde moitié du XXe siècle, c’est probablement que, par réaction aux études littéraires, on a voulu affirmer la spécificité de l’écriture dramatique, en insistant sur son état transitoire, en attente de représentation et, depuis la fin du XIXe siècle, de la mise en scène [168] .
Souiller insiste quant à lui sur la pluralité des approches possibles, dépendant de la situation du lecteur/spectateur et de la nature du texte théâtral, tout en rappelant que ces « orientations différentes ne s’excluent nullement et peuvent se compléter, en fonction des caractéristiques propres à telle œuvre particulière [169] ».
Méthode d’analyse pour le texte théâtral de Didier Souiller et al.
Souiller et ses collègues distinguent six orientations possibles pour l’analyse du texte théâtral : les éléments de dramaturgie, l’analyse sémiologique, le modèle narratologique, l’analyse sociologique, l’apport de la linguistique et la psychanalyse.
Concernant la dramaturgie, Souiller se réclame tout autant de Jacques Scherer qui l’envisage comme l’étude de la structure interne d’une pièce par celle de sa structure externe [170] et de Michel Autrand dont la conception est « plus restrictive […], puisqu’il refuse de prendre en considération le rapport du texte aux contingences de la représentation ». Puis il tranche – au moins dans cet ouvrage – en faveur d’une analyse dramaturgique qui étudie « quelques données purement dramaturgiques » [171] : les didascalies, l’espace scénique et le personnage.
Dans son approche sémiologique du théâtre, Souiller relève que « la sémiologie appliquée au théâtre a ainsi longtemps fait l’objet de réticences ou de méfiance, voire de controverses [172] ». Mais comprise comme la possibilité de produire « une réflexion orientée [non] vers la signification du spectacle, mais vers le processus d’élaboration de son sens », elle permet de travailler sur le réseau de signes inhérent au théâtre, et c’est justement parce que les signes sont multiples et divers, à des niveaux d’épaisseur différents, qu’il est possible d’en faire des lectures tout aussi multiples et diverses, et « d’intégrer l’étude de la réception à une sémiologie du spectacle » [173] . Je me range bien volontiers à ce point de vue.
Le modèle narratologique développé dans le contexte du structuralisme des années 1960 et 1970, peut être aussi convoqué lorsque l’on cherche à analyser un texte dramatique, même s’il s’adresse prioritairement aux textes romanesques, notamment lorsque le théâtre a une dimension narrative, ce qui n’est pas toujours le cas. Si « cette méthode d’analyse peut paraître aujourd’hui un peu datée », elle a néanmoins permis de « libérer du psychologisme et [d’]encourager une lecture qui prenne en compte les déterminations historiques et idéologiques de l’œuvre [174] » ; en d’autres termes, ce schéma « met en évidence l’illusoire autonomie du sujet, dont l’action n’a de sens que dans un cadre plus large, le contexte sociohistorique et idéologique qui surdétermine son désir [175] ».
L’analyse sociologique du théâtre est une quatrième méthode possible. Après avoir rappelé l’avertissement de Viala, « on ne séparera donc pas les analyses techniques, l’esthétique et le politique, l’idéologie et l’art [176] », Souiller explicite sa pensée en ces termes :
Une pièce de théâtre, non seulement appartient à la « littérature » et se donne comme la création consciente d’un auteur, mais son interprétation passe par un récepteur complexe : le ou les acteur(s) qui la jouent et le public, masse collective, ensemble de sujets individualisés dont les réactions sont différentes de celles de chacun pris séparément [177] .
Pour autant, ancrer l’analyse d’un spectacle dans le contexte sociologique n’est pas aisé car « les études théâtrales requièrent en premier lieu la construction de leur objet, […] ce qui revient à dire que l’objet de la recherche n’est pas donné tel quel au départ [178] ».
Les deux dernières méthodes convoquées par Souiller empruntent à la linguistique d’une part et à la psychanalyse de l’autre. Le théâtre, en tant que lieu de la « parole active [179] », appelle une approche linguistique, ce que de très nombreux auteurs ont illustré ces cinquante dernières années [180] , notamment au regard de la situation particulière au théâtre de la « double énonciation » qui implique « deux couches textuelles distinctes, l’une qui a pour sujet de l’énonciation immédiat, l’auteur, […] l’autre qui a pour sujet de l’énonciation médiat un personnage [181] ». Quant à la psychanalyse, dans la mesure où « toute mise en scène est mise en scène de l’inconscient [182] » il est absolument pertinent, dans certains cas, d’analyser les processus psychologiques en jeu sur scène.
Le modèle d’analyse textuelle de Patrice Pavis
Dans un esprit de synthèse, Pavis choisit de développer dans son livre [183] un « modèle d’analyse textuelle », inspiré de celui de Umberto Eco dans Lector in fabula, mais adapté au théâtre et qui « se place résolument du côté de la réception [184] ».
Cette réception formalise l’ensemble des opérations cognitives effectuées, elle est aux antipodes d’une méthode génétique qui se consacre à la genèse de l’œuvre, à ses sources, à la méthode du travail de l’auteur.
Le schéma réalisé par Pavis comporte cinq niveaux d’analyse et deux colonnes qui se répondent, celle du monde fictionnel qui a trait au seul texte dramatique et celle du monde de référence du lecteur/spectateur, c’est-à-dire du « lieu concret d’où le lecteur, voire le spectateur, interprète, questionne la fiction à travers le texte dramatique qu’il met donc en jeu, soit concrètement dans une mise en scène, soit imaginairement dans l'acte de lecture ».
Ce modèle d’analyse se construit entre la face visible de la surface du texte (la matière des mots, les types de parole, le lexique, la cohérence, l’intertexte) et la face invisible de l’idéologie, de l’inconscient, celle du sens, deux faces que Pavis qualifie de deux « extrêmes ».
Entre ces deux extrêmes, on trouve le trinôme de la dramaturgie au sens large, et donc de l’analyse dramaturgique : l’intrigue et la thématique, la fable, l’action et les actants [185] .
C’est parce qu’il s’agit d’un parcours ouvert et non d’« un parcours imposé où tous les instruments seraient nécessairement à utiliser [186] », que ce modèle d’analyse me semble pertinent pour éviter de cloisonner les entrées et chercher à faire entrer systématiquement ses analyses dans des cases. Ce sont bien plutôt des « passerelles [qu’il faut aménager] entre elles [187] ». Ouvrir, créer des ponts, une bien belle manière de sonder l’espace qui se situe dans l’entre-deux du texte et de la scène.
IV. Les outils de l’analyse de la mise en scène
Voilà une tâche complexe et risquée. Pavis, pourtant éminent spécialiste de cette question, s’en explique :
L’analyse du spectacle se donne une tâche démesurée qui dépasse peut-être les compétences d’une seule personne. […] C’est donc avec la plus grande humilité, et surtout la plus élémentaire prudence, que nous devons avancer sur le terrain du spectaculaire, terrain miné par les théories les plus contradictoires et les soupçons méthodologiques les plus insidieux, champ en friche qui n’a pas encore vu se développer de méthode satisfaisante et universelle. Il faut donc prendre le risque de sauter sur une mine en scène si nous voulons faire un bilan et surtout une prospective des méthodes de l’analyse de la mise en scène [188] .
La multiplicité des points de vue et la diversité des méthodes dans le champ si vaste des arts de la scène rend en effet les choses très complexes. Il faut reconnaître que, d’une part, l’histoire de la mise en scène [189] est relativement récente et, que, d’autre part, très vite après 1945 et de plus en plus – le phénomène connaissant une expansion exponentielle –, ce terme va recouvrir une multiplicité de réalités qui rendent son appréhension complexe.
Le terme de mise en scène désigne donc des pratiques extrêmement diverses, et ce, d’autant plus que les créations ne cessent de se nourrir de formes venant du monde entier grâce à l’émergence de divers festivals ou à l’ouverture de plus en plus grande des programmations régulières [190] .
Par ailleurs, analyser un spectacle peut se faire au service de deux objectifs distincts. Pavis distingue « l’analyse-reportage [191] » qui a pour fonction de restituer le spectacle de l’intérieur en s’efforçant de conserver les impressions premières qu’il dégage, et « l’analyse-reconstitution [192] » qui se consacre à l’étude des conditions extérieures de la représentation – analyse des spectateurs, du lieu de la représentation – ce qui revient à la perspective sémiologique dont Pavis choisit de dresser un bilan critique.
Critique de l’approche sémiologique et propositions
Une fois vérifiée l’hypothèse d’un « signe théâtral [193] », la sémiologie théâtrale s’est établie « comme méthodologie universitaire dominante des années 1970 [194] », mettant l’accent sur la scène et délaissant le texte. Depuis, la pratique sémiologique a été sous le joug de la critique postmoderne : elle est notamment accusée d’avoir pactisé avec les idéologues marxistes, et aujourd’hui, certains y voient un champ de « ruines de l’idéologie et de la pensée critique et militante [195] », ce que Pavis conteste, tout en concédant aussi ses limites, par exemple lorsqu’en établissant des catégories de signe, « les subdivisions figent plus la représentation qu’elles ne l’éclairent [196] », ce qui nécessite par conséquent d’imaginer d’autres approches et « des outils transversaux permettant de dépasser une vision morcelée du spectacle [197] ».
La tendance actuelle de l’analyse du spectacle est ainsi à un retour aux réalités matérielles et concrètes de la scène, à un retour désublimé au corps de la représentation, ce qui rompt avec l’idée abstraite de la mise en scène comme sublimation du corps scénique, comme schéma abstrait idéal […] Il y a, on le voit, une double exigence de la description de spectacle : revenir au corps même de la représentation, mais aussi s’en abstraire et en dessiner les contours et le parcours du point de vue désirant de l’observateur [198] .
Pour disposer d’un « modèle [d’analyse] plus souple du fonctionnement des signes et de leurs vecteurs », qui permette d’ouvrir le spectacle « à des regards contradictoires [199] », Pavis dégage cinq propriétés. Il s’agit à la fois de développer un modèle au sein duquel production et réception soient combinées, pour éviter « de retomber dans le débat de l’intentionnalité de l’artiste-producteur et de la subjectivité du spectateur-récepteur [200] », mais aussi de davantage prendre en compte le contexte, au sens socio-économico-culturel du terme, dans la mesure où les spectateurs sont les destinataires du spectacle, c’est-à-dire que le milieu récepteur, « bâtit le sens et [est] donc engagé herméneutiquement dans l’élaboration de ce sens [201] ». La dimension de l’interculturalité devrait également être davantage prise en compte et permettrait de gagner en distance et de changer de point de vue [202] , tout comme celle d’une perception davantage productive et interactive, au sens de Hans-Georg Gadamer lorsqu’il écrit que « la compréhension n’est pas une attitude uniquement reproductive, mais aussi et toujours une attitude productive [203] ». Tous ces principes devraient donc concourir à une « vision d’un réseau ouvert, mais cohérent », dans lequel la sémiologie garde sa place naturelle, mais mérite d’être enrichie « par une étude des mécanismes du besoin (sociologique) et du désir (psychanalytique) dans la perspective d’une anthropologie de l’acteur et du spectateur [204] ».
Pour une approche dramaturgique
On s’en souvient, les premiers pas de l’analyse du spectacle théâtral sont descriptifs, qu’il s’agisse de décrire le jeu des acteurs ou les effets de mise en scène. Ils remontent à la fin du XVIIIe siècle avec Diderot et Lessing [205] . La tradition allemande du Dramaturg en est un écho fort et le dramaturge a réussi à se faire une place en dehors des frontières allemandes. C’est cette approche que des critiques comme Barthes ou Dort vont choisir pour leurs « analyse[s] dramaturgique[s] [206] ». Et nous aurions tout intérêt à nous inscrire dans leurs traces pour analyser la scène contemporaine, en distinguant trois étapes : l’analyse dramaturgique du texte, celle de l’adaptation/traduction et le travail au plateau.
- L’analyse dramaturgique du texte
Le terme analyse, du grec άνάλυσις (étymologiquement « résoudre, délier [207] ») nous invite à déplier les différents éléments qui constituent le texte dramatique, à mener une « réflexion sur les structures du texte (ses virtualités théâtrales) », processus que Dort qualifie de « dramaturgie du texte » [208] . Analyser la « composition d’une pièce » signifie donc dénouer le cœur du drame qui n’est autre que l’action, ce qui n’est pas toujours chose aisée au théâtre puisque, à la différence du roman, « les différentes actions ne peuvent être lues/perçues qu’au travers des dialogues des personnage/acteurs ». Et comme le rappelle Bernd Stegemann avec beaucoup d’acuité, « il n’est pas rare qu’à l’issue d’une soirée théâtrale réussie, la discussion initiée ne tourne au début qu’autour de la difficile reconstruction de l’action qui a été jouée » [209] . L’analyse dramaturgique a donc pour mission de rendre cette action lisible/visible et signifiante pour le spectateur d’aujourd’hui. Antoine Vitez l’a dit en son temps : « Chaque fois que l’on joue une pièce de théâtre ancienne, il faut se demander quel pouvait en être le sens le premier jour où elle a été donnée [210] ». Mais attention, ce travail dramaturgique a souvent bien moins à voir avec un processus d’élucidation du sens qui viserait à lever les zones d’ombre, qu’avec l’idée de « faire apparaître des zones de non-compréhension, d’incertitude, des terres non cartographiées (et peut-être non cartographiables par la simple analyse textuelle [211] ».
- L'analyse de l’adaptation/traduction
Une fois la dramaturgie du texte établie, il s’agit de déterminer la version du texte sur laquelle les comédiens vont travailler.
Lorsque le travail repose sur un texte, il s’agit d’abord de déterminer la version de ce texte sur laquelle s’appuyer, d’effectuer des coupes, des réécritures, ou bien une traduction nouvelle qui répondra ou anticipera des choix de mise en scène [212] .
La réécriture peut donc aussi être couplée à une (re)traduction du texte, traduction dans une autre langue, mais également passage « d’une culture à l’autre ou d’une époque à l’autre [213] », ce qui nous renvoie à la question de la nécessaire actualisation du texte : il s’agit là de rendre le texte signifiant pour le public d’aujourd’hui, sur le plan culturel, en gommant les traces d’un contexte peut-être méconnu, et sur le plan historique, en parlant depuis ici et maintenant. De sorte que la frontière entre la traduction et la dramaturgie n’est pas facile à établir.
Où commence la dramaturgie du texte ? Où s’arrête le travail du traducteur et où devient-il celui d’un dramaturge dès lors que la scène entre dans le champ de ses possibles ? Dans l’horizon sonore et pratique du texte ? Aux abords du plateau ? Dans l’élaboration d’une version scénique faite de compromis et d’aménagements [214] ?
- Le travail au plateau
Le passage du texte à la scène se fait par définition pendant les répétitions, ce qui explique les appellations qu’on lui donne, que ce soit travail au plateau ou dramaturgie de plateau. Mais la distinction entre « dramaturgie du texte » et « dramaturgie de plateau » ne doit pas laisser entendre qu’elles seraient hermétiques l’une à l’autre.
Il s’agit toujours de confronter une dramaturgie du texte et une dramaturgie de la représentation. D’instituer un va-et-vient entre une réflexion sur les structures du texte (ses virtualités théâtrales) et les modes possibles (sans prétendre jamais les épuiser) de mise en jeu de ce texte [215] .
Et de cette confrontation, qui n’est autre qu’« une forme de réflexion dramaturgique mise en acte [216] », naît un espace de travail dans lequel tous les acteurs du monde théâtral, metteur en scène, dramaturge, comédiens, scénographe, costumier, éclairagiste, musiciens, artistes plasticiens… peuvent interagir. Il incombe alors au metteur en scène de déterminer l’amplitude et l’étendue de l’espace de parole. Ce « passage du texte à la scène » se voit ensuite prolongé par un « passage de la scène à la salle [217] » : la rencontre avec le public, au sens propre comme au sens figuré, implique que le travail dramaturgique a aussi un effet direct sur l’espace de réception des spectateurs. Cette analyse du plateau nécessite en tout état de cause une méthode fiable.
Comment s’y prendre concrètement ? Vade-mecum [218]
- Savoir si l’on conduit l’analyse dans le cas de l’expérience théâtrale (d’un spectacle auquel on assiste une fois) ou de la reconstitution qui implique de réitérer l’expérience.
- Procéder à une description verbale, souvent à l’issue du spectacle, tout en se souvenant qu’elle ne sera jamais exhaustive et qu’elle participe d’un « projet de sens [219] », comme si nous cherchions à convaincre notre interlocuteur.
- Prendre des notes au cours du spectacle, ce qui peut se faire sous forme de dessin, de schéma ou de mots.
- Utiliser des questionnaires dont il existe différentes versions. Citons-en déjà trois : celui d’Anne Ubersfeld, celui d’André Helbot celui de Patrice Pavis [220] .
- Étudier programmes, livrets de mise en scène, dossiers de presse, mais aussi photographies et captations vidéo.
- Ne pas confondre les discours d’intention du metteur en scène (c’est-à-dire l’analyse des péritextes) et le résultat sur scène, ne pas assimiler les impressions ressenties lors d’une expérience avec celles que produit le fait de revoir un spectacle par exemple grâce à un enregistrement mécanique.
- Travailler sur un découpage du spectacle ni texto-centriste, ni purement scénique, mais l’envisager dans « son rythmeglobal », « celui des actions physiques et de la composition musicale de la mise en scène [221] ».
- Ne pas faire preuve d’une attitude « scolaire (selon le mot impitoyable de Hans-Thies Lehmann [222] ) », c’est-à-dire ne pas juger la réalisation scénique à partir du texte dramatique ; il est urgent de « dépasser cette fausse opposition [223] ».
- Avoir recours à l’analyse narratologique, non sous l’angle de la mimesis, mais sous celui de la diegesis, l’acteur peut lui aussi raconter, ce n’est pas le privilège du personnage et en ce sens, « la narratologie rendrait de grands services à la dramaturgie [224] ». Le recours aux concepts stanislavskiens peut notamment être très productif.
- Ne pas éliminer totalement le regard subjectif que l’on peut porter sur un spectacle, en utilisant le langage cinématographique pour analyser : « point de vue, distance, échelle de plans, cadrages, raccords grâce au montage, associations libres du montage dans le plan, etc. [225] »
- Prendre en compte également ce qui est du domaine du « non-représentable », qu’on exprime parfois avec le terme énergie:
L’acteur ou le danseur dégagent, par leur présence, leur mouvement, leur phrasé, une énergie qui atteint le spectateur de plein fouet. On sent bien que c’est cette qualité-là qui fait toute la différence et participe à l’expérience esthétique tout entière autant qu’à l’élaboration du sens [226] .
- Dernier conseil de Pavis : adopter une attitude à la fois prudente et courageuse, c’est-à-dire « s’éloigner des instruments purement mécaniques de notation, faire davantage confiance à la mémoire, à l’intuition », pour mettre en œuvre « un dialogue avec l’œuvre scénique », et travailler à un « questionnement plus qu’à un questionnaire [227]
Conclusion provisoire [228]
Pour éviter « l’éternelle comparaison du texte et de la scène [229] » qui ne fait que creuser le fossé existant entre études littéraires et études théâtrales, il faut plus que jamais penser de manière inter- et transdisciplinaire et réfléchir à de nouveaux outils, de nouveaux schémas pour les articuler de manière constructive et fructueuse.
En formulant l’hypothèse d’un texte théâtral « troué [230] », Anne Ubersfeld avait eu une vraie intuition. André Helbo la reprend en proposant une « approche interstitielle du spectacle vivant [231] » :
Nous désignons par-là les conditions dans lesquelles une interface peut se construire au creux des disciplines pour prendre en charge des thématisations qui sollicitent différents modèles, telles l’expérience, notamment cognitive, du sensible [232] .
Il importe de prolonger ces pistes et de penser l’espace entre texte(s)et scène(s) en termes de relations et de passages. Le texte est enclos dans le livre mais s’actualise sur la scène, dans la re-création critique qu’en produisent metteurs en scène et acteurs. Il s’enrichit de tout un ensemble d’éléments scéniques, visuels et sonores qui contribuent à l’interpréter, dans tous les sens de ce terme capital. Le spectacle de la représentation est éphémère mais s’imprime dans les mémoires de celles et ceux qui l’ont vu. Tous ces aspects sont profondément indissociables : il s’agit de les prendre et de les tenir ensemble, de les com-prendre (cum – prendere) pourrait-on dire, sans quoi toute approche du théâtre demeure incomplète, imparfaite et mutilée.
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Souriau, Étienne, La Correspondance des arts : éléments d’esthétique comparée, Paris, Flammarion, 1947.
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Outils pour penser
Badiou, Alain, Images du temps présent, Paris, Fayard, 2014.
Barthes, Roland, « La Mort de l’auteur », dans Œuvres complètes. Tome III, 1968-1971, Paris, Le Seuil, 2002.
Barthes, Roland, S/Z, Paris, Le Seuil, 1970.
Barthes, Roland, Essais critiques, Paris, Le Seuil, 1964.
Derrida, Jacques, Khôra, Paris, Galilée, 1993.
Derrida, Jacques, Psyché : inventions de l’autre, Paris, Galilée, 1987.
Gadamer, Hans-Georg, Vérité et méthode : les grandes lignes d’une herméneutique philosophique, trad. Paul Ricœur, Paris, Le Seuil, 1976.
Hernandez, Marta, « La khôra du Timée : Derrida, lecteur de Platon », Appareil, 11|2013 [https://journals.openedition.org/appareil/1780].
Proust, Françoise, Point de passage, Paris, Kimé, 1994.
Notes
- [1]
André Helbo, Le Théâtre : texte ou spectacle vivant ?, Paris, Klincksieck, 2007, p. 11.
- [2]
Alain Viala, Le Théâtre en France, Paris, Presses universitaires de France, 2016, p. 1.
- [3]
André Helbo, Le Théâtre : texte ou spectacle vivant ?, op. cit., p. 51-52.
- [4]
Hélène Laplace-Claverie, La Page et la Scène. Pour une approche littéraire du spectaculaire (XIXe-XXe siècles), Note de synthèse HDR sous la direction du Pr. Jeanyves Guérin, Université Paris 3 Sorbonne Nouvelle, 2007, p. 3.
- [5]
Ibid., p. 9.
- [6]
Guy Ducrey, Tout pour les yeux : littérature et spectacle autour de 1900, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2010, p. 14.
- [7]
Ana Clara Santos, « Littérature et théâtre ou l’entre-deux. De la dramaturgie à la génétique théâtrale », Carnets, Cultures littéraires : nouvelles performances et développement, n° spécial, automne/hiver 2009, p. 223.
- [8]
André Helbo, Le Théâtre : texte ou spectacle vivant ?, op. cit., p. 15.
- [9]
Cf. Caroline Fischer (éd.), Intermédialités, Nîmes, Lucie éditions, coll. « Poétiques comparatistes », SFLGC, 2015.
- [10]
Daniel-Henri Pageaux, « La « dimension étrangère » comme champ de recherches en littérature générale et comparée », dans Ana Clara Santos et Maria de Jesus Cabral, L’Étranger, Paris, Éditions le Manuscrit, coll. « Exotopies », 2016, p. 38.
- [11]
Yves-Michel Ergal et Michèle Finck (éds.), Littérature comparée et correspondance des arts, op. cit., p. 11.
- [12]
Bernard Franco, La Littérature comparée : histoire, domaines et méthodes, Paris, Armand Colin, 2016, p. 254-271.
- [13]
Yves-Michel Ergal et Michèle Finck (éds.), Littérature comparée et correspondance des arts, Strasbourg, Presses universitaires, 2014.
- [14]
Ibid., p. 6.
- [15]
Ibid.
- [16]
Art et Littérature. Actes du Congrès de la Société Français de Littérature Générale et Comparée, Aix-en-Provence 24-25-26 septembre 1986, Aix-en-Provence, Université de Provence, SFLGC, 1988.
- [17]
Arnaud Huftier, Chris Rauseo et Karl Zieger, Correspondances : vers une redéfinition des rapports entre la littérature et les arts/XXXIIIe Congrès de la SFLGC, 28-30 septembre 2005 à Valenciennes, Valenciennes, Presses universitaires, 2007.
- [18]
Le premier livre blanc est celui coordonné en 1983 par Daniel-Henri Pageaux, La Recherche en littérature générale et comparée : aspects et problèmes, Paris, SFLGC, 1983.
- [19]
Anne Tomiche et Karl Zieger (éds.), La Recherche en littérature générale et comparée : bilan et perspectives. Actes de la journée d’étude du 18 novembre 2006 organisée par la SFLGC, Valenciennes, Presses universitaires, 2007.
- [20]
Formule initiale de Daniel-Henri Pageaux dans La Recherche en littérature générale et comparée : aspects et problèmes, op. cit., p. 4.
- [21]
Anne Tomiche et Karl Zieger (éds.), La Recherche en littérature générale et comparée : bilan et perspectives. op. cit., p. 14.
- [22]
Art et Littérature. Actes du Congrès de la Société Français de Littérature Générale et Comparée, Aix-en-Provence 24-25-26 septembre 1986, op. cit., p. 630.
- [23]
Matthieu Mével, (dir.), La Littérature théâtrale : entre le livre et la scène, Montpellier, L’Entretemps, 2013, p. 7.
- [24]
Étienne Souriau, La Correspondance des arts : éléments d’esthétique comparée, Paris, Flammarion, 1947.
- [25]
Étienne Souriau poursuit ici en réalité la théorie de la correspondance de la littérature avec les arts et la correspondance des arts entre eux, formulée par les Romantiques et reprise par Baudelaire dans son poème « Correspondances ».
- [26]
Étienne Souriau, La Correspondance des arts, op. cit., p. 97.
- [27]
Ibid., p. 107.
- [28]
Charles Lalo, « Esquisse d’une classification structurale des Beaux-Arts », Journal de psychologie normale et pathologique, 44e année, 1951, p. 9-37.
- [29]
« Psychologie (ou théorie) de la forme ». L’article fondateur de Christian von Ehrenfels date de 1890 et sera repris ultérieurement par Merleau-Ponty. Cf. Christian von Ehrenfels, « Über Gestaltqualitäten », Vierteljahresschrift wissenschaftlicher Philosophie, n° 14, p. 249-292 & Maurice Merleau-Ponty, La Structure du comportement, Paris, PUF, 1942.
- [30]
Charles Lalo, « Esquisse d’une classification structurale des Beaux-Arts », op. cit., p. 23.
- [31]
Ibid., p. 27.
- [32]
Thomas Munro, Les Arts et leurs relations mutuelles, trad. Jean-Marc Dufrenne, Paris, PUF, 1954.
- [33]
Titre du Chapitre X, p. 369-421.
- [34]
Thomas Munro, Les Arts et leurs relations mutuelles, op. cit., p. 411-413.
- [35]
Ibid., p. 413.
- [36]
Chapitre « Littérature ; prose, vers, poésie », dans Thomas Munro, Les Arts et leurs relations mutuelles, op. cit., p. 392-405.
- [37]
Ibid., p. 431.
- [38]
Nelson Goodman, Langages de l’art : une approche de la théorie des symboles, trad. Jacques Morizot, Paris, Librairie Arthème Fayard, 1990.
- [39]
Ibid., p. 147.
- [40]
- [41]
Ibid., p. 154.
- [42]
Ibid., p. 148.
- [43]
Ibid., p. 153-154.
- [44]
Ibid., p. 249.
- [45]
Bernard Vouilloux, Langages de l’art et relations transesthétiques, Paris, L’éclat, coll. « tiré à part », 1997, p. 63-64.
- [46]
Notamment au chapitre 6.
- [47]
- [48]
Hélène Laplace-Claverie, La Page et la Scène. Pour une approche littéraire du spectaculaire (XIXe-XXe siècles), op. cit., p. 86.
- [49]
Henri Gouhier, Le Théâtre et les arts à deux temps, Paris, Flammarion, 1989, p. 14.
- [50]
Ibid., p. 17.
- [51]
Ibid., p. 234.
- [52]
Bernard Franco, La Littérature comparée, op. cit., p. 352.
- [53]
Yves Chevrel, La Littérature comparée, Paris, PUF, coll. « Que sais-je ? », 2009, p. 11.
- [54]
Alain Badiou et Nicolas Truong, Éloge du théâtre, Paris, Flammarion, 2016, p. 20.
- [55]
Ibid., p. 293-294.
- [56] Ibid., p. 58.
- [57]
Bernard Dort, Théâtres : essais, Paris, Le Seuil, 1986, p. 19.
- [58]
Daniel-Henri Pageaux, « Préface – Comparatismes à travers le monde. I », Revue de littérature comparée, vol. 4, no 352, 2014, p. 392.
- [59]
Même si l’out of place n’a pas besoin d’être « rejointé » comme dans Hamlet.
- [60]
Dans cet essai qui engage les textes du répertoire, le cas des écrivains qui écrivent et mettent en scène leurs propres textes ne sera pas étudié. Cela étant, aujourd’hui, et alors qu’ils sont toujours vivants et que leurs spectacles sont encore programmés, on a pu voir par exemple Incendies de Wajdi Mouawad mis en scène par Stanislas Nordey à Strasbourg lors de la saison 2015-2016, ou Ça ira (I), fin de Louis de Joël Pommerat, sur les scènes allemandes, à Münster par exemple en avril/mai 2017 sous le titre La Révolution – Wir schaffen das schon. Ce qui montre que cet espace entre peut aussi se penser dans ce cas particulier.
- [61]
Roland Barthes, S/Z, Paris, Le Seuil, 1970, p. 11 : « Interpréter un texte, ce n’est pas lui donner un sens (plus ou moins fondé, plus ou moins libre), c’est au contraire apprécier de quel pluriel il est fait. »
- [62]
Georges Banu, Le Théâtre ou le défi de l’inaccompli, Besançon, Les Solitaires Intempestifs, 2016, p. 38.
- [63]
Alain Viala, Le Théâtre en France, op. cit., p. 3.
- [64]
Ibid., p. 41.
- [65]
Josette Féral, « La Théâtralité. Recherche sur la spécificité du langage théâtral », Poétique : revue de théorie et d’analyse littéraire, vol. 19, no 75, 1988, p. 347.
- [66]
Ibid., p. 348. Pour des références historiques plus précises sur l’introduction de ce concept, on pourra se référer aux notes 5, 6 et 7 p. 359 à la fin de l’article.
- [67]
Roland Barthes, « Le Théâtre de Baudelaire », dans Essais critiques, Paris, Le Seuil, 1964, p. 44-45.
- [68]
Roland Barthes, « Littérature et signification », dans Essais critiques, op. cit., p. 267.
- [69]
Assises de la traduction littéraire, Traduire le théâtre, Arles, ATLAS : Actes Sud, 1990, p. 69.
- [70]
Josette Féral, « La Théâtralité. Recherche sur la spécificité du langage théâtral », op. cit., p. 352.
- [71]
- [72]
Ibid., p. 358-359.
- [73]
André Helbo, Le Théâtre : texte ou spectacle vivant ?, op. cit., p. 30.
- [74]
Patrice Pavis, Dictionnaire du théâtre, Paris, Dunod, 1996, p. 302.
- [75]
Patrice Pavis, Dictionnaire du théâtre, op. cit., p. 302.
- [76]
Ibid.
- [77]
Ibid.
- [78]
Antonin Artaud, Le Théâtre et son Double, suivi de Le théâtre de Séraphin, Paris, Gallimard, 1964, p. 164.
- [79]
Les premières mises en scène d’André Antoine datent de mars1887 au moment de l’ouverture du Théâtre-Libre. Cf. Jean-Pierre Sarrazac et Philippe Marcerou, Antoine, l’invention de la mise en scène: anthologie des textes d’André Antoine, Arles, Actes Sud, 1999, p. 261.
- [80]
Alice Folco, « La Querelle sur les origines de la mise en scène moderne et les enjeux mémoriels autour de la figure d’Antoine », dans Marion Denizot (dir.), L’Écriture de l’histoire du théâtre et ses enjeux mémoriels, no 1, septembre 2013, p. 52. À ce sujet, on pourra aussi lire Béatrice Boisson, Alice Folco et Ariane Martinez, La Mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, Paris, Presses universitaires de France, 2015.
- [81]
Mara Fazio et Pierre Frantz (éds.), La Fabrique du théâtre : avant la mise en scène, 1650-1880, Paris, Éd. Desjonquères, coll « L’Esprit des Lettres », 2010.
- [82]
Alice Folco, « La Querelle sur les origines de la mise en scène moderne », op. cit., p. 53.
- [83]
J’emploie ici le titre qu’a donné Françoise Proust à son ouvrage, majeur dans ma réflexion, Point de passage, Paris, Kimé, 1994.
- [84]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, Presses universitaires de France, coll. « Quadrige », 2005, p. 518.
- [85]
Dario Fo, Le Gai Savoir de l’acteur, trad. Valeria Tasca, Paris, L’Arche, 1990, p. 258.
- [86]
Cf. article « Mise en scène », dans Patrice Pavis, Dictionnaire du théâtre, op. cit., p. 210-215.
- [87]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », Littérature. Théâtre : le retour du texte ?, no 138, 2005, p. 97.
- [88]
Georg Wilhelm Friedrich Hegel, Esthétique 8, La poésie, t.I, trad. Samuel Jankélévitch, Paris, Aubier-Montaigne, 1965, p. 357.
- [89]
Catherine Naugrette, L’Esthétique théâtrale, Paris, Nathan, 2000, p. 39.
- [90]
Georg Wilhelm Friedrich Hegel, Esthétique 8, La poésie, op. cit., p. 308.
- [91]
- [92]
- [93]
Bernard Dort, Théâtres : essais, op. cit., p. 10.
- [94]
Béatrice Boisson, Alice Folco et Ariane Martinez, La Mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, op. cit., p. 37.
- [95]
Dario Fo, Le Gai Savoir de l’acteur, op. cit., p. 259.
- [96]
Aristote, Poétique, trad. Roselyne Dupont-Roc et Jean Lallot, Paris, Le Seuil, 1980, p. 57.
- [97]
Florence Dupont, Aristote ou Le vampire du théâtre occidental, Paris, Flammarion, 2007, p. 22.
- [98]
- [99]
Cf. Georges Banu et Bruno Tackels (dir.), Le Cas Avignon 2005 : regards critiques, Vic-la-Gardiole, L’Entretemps, 2005.
- [100]
Florence Dupont, Aristote ou Le vampire du théâtre occidental, op. cit., p. 17.
- [101]
« Le théâtre n’a rien à voir avec la littérature, quoi qu’on fasse pour l’y réduire ». http://www.ens.fr/IMG/file/concours/2008/BL/francais_epreuve_commune_ecrit.pdf. Ces propos de Florence Dupont prennent d’ailleurs appui sur une citation de Dario Fo, dans l’ouvrage cité précédemment, Dario Fo, Le Gai Savoir de l’acteur, op. cit., p. 258.
- [102]
Denis Guénoun, « Pour le théâtre, merci Aristote », Le Monde des livres, supplément du Monde, 26 octobre 2007, p. 2.
- [103]
Ibid.
- [104]
Guy Ducrey, Tout pour les yeux, op. cit., p. 13.
- [105]
Bruno Tackels, « Les Écrivains de plateau, en quelques mots », dans Matthieu Mével, La Littérature théâtrale entre le livre et la scène, op. cit., p. 47.
- [106]
Cf. Bruno Tackels, Les Écritures de plateau, Besançon, Les Solitaires intempestifs, 2005.
- [107]
Tadeusz Kowzan, « Texte écrit et représentation théâtrale », Poétique : revue de théorie et d’analyse littéraire, vol. 19, no 75, 1988, p. 364-367.
- [108]
Ibid., p. 370.
- [109]
Ibid., p. 371.
- [110]
Françoise Proust, Point de passage, op. cit., p. 29.
- [111]
Bernard Dort, Théâtre public : 1953-1966, Paris, Le Seuil, 1967, p. 278.
- [112]
Ibid.
- [113]
Ibid., p. 77.
- [114]
Roland Barthes, « La Mort de l’auteur », dans Œuvres complètes. Tome III, 1968-1971, Paris, Le Seuil, 2002, p. 44.
- [115]
Ibid., p. 43.
- [116]
Ibid., p. 45.
- [117]
Patrice Pavis, Dictionnaire du théâtre, op. cit., p. 213.
- [118]
Daniel-Henri Pageaux, « La « dimension étrangère » comme champ de recherches en littérature générale et comparée », op. cit., p. 21.
- [119]
Ibid., p. 22.
- [120]
Thomas Ostermeier, « Le Théâtre, une rébellion contre la déception de la vie, entretien avec Georges Banu », dans Le Théâtre et la Peur, Arles, Actes Sud, 2016, p. 39.
- [121]
Didier Plassard, « L’auteur et le metteur en scène : aperçus d’un combat », voxpoetica.com, 28 janvier 2017, p. 11.
- [122]
Cf. Sylvie Chalaye et Daniel Urrutiaguer, « Naissance et constitution d’un champ autonome d’enseignement et de recherches interdisciplinaires et interculturelles », Registres. Revue des études théâtrales, no 18, 2015, p. 122-131.
- [123]
Bernard Dort, Théâtres : essais, op. cit., p. 20.
- [124]
Sans cible (éd.), La Représentation 2, Paris, Éd. de l’Amandier, 2004, p. 27.
- [125]
Jacques Derrida, Psyché : inventions de l’autre, Paris, Galilée, 1987, p. 502.
- [126]
- [127]
Marta Hernandez, « La khôra du Timée : Derrida, lecteur de Platon », Appareil, [En ligne], 11|2013[https://journals.openedition.org/appareil/1780].
- [128]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 117.
- [129]
- [130]
Didier Plassard, « Texte événement, texte monument », dans Revue d’Histoire du Théâtre, n° 245-246, 1er et 2e trimestre 2010, p. 5-16.
- [131]
Étienne Souriau, La Correspondance des arts, op. cit., p. 266.
- [132]
André Helbo, Le Théâtre, op. cit., p. 25.
- [133]
Ibid., p. 24.
- [134]
Ibid., p. 26.
- [135]
Bernard Franco, La Littérature comparée, op. cit., p. 263-264. Cf. note 6 et Guy Ducrey, Corps et Graphie. Poétique de la danse et de la danseuse à la fin du xixe siècle, Paris, Champion, coll. « Romantisme et Modernités », 1996.
- [136]
Les travaux de Georges Didi-Huberman ont notamment joué dans ce cadre un rôle décisif.
- [137]
Françoise Simonet-Tenant, « Introduction : génétique et théâtre », Continents manuscrits, [En ligne], 7 | 2016 [http://journals.openedition.org/coma/688].
- [138]
Ana Clara Santos, « Littérature et théâtre ou l’entre-deux. De la dramaturgie à la génétique théâtrale », op. cit., p. 229. Cf. les travaux collectifs de Delphine Lemonnier-Texier, Sophie Lucet et Sophie Proust (dir.) Mémoires, traces et archives en création dans les arts de la scène, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017.
- [139]
Georges Banu, Le Théâtre ou le défi de l’inaccompli, op. cit., p. 66.
- [140]
Ana Clara Santos, « Littérature et théâtre ou l’entre-deux. De la dramaturgie à la génétique théâtrale », op. cit., p. 229.
- [141]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 118.
- [142]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 425.
- [143]
Ibid., p. 511.
- [144]
Joseph Danan, Qu’est-ce que la dramaturgie ?, Arles, Actes Sud – Papiers, 2017, p. 6.
- [145]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 113.
- [146]
Ibid., p. 118.
- [147]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 108.
- [148]
Ibid., p. 117.
- [149]
Michel Corvin (éd.), Dictionnaire encyclopédique du théâtre à travers le monde, Paris, Bordas, 2008, p. 34.
- [150]
Alain Badiou, Images du temps présent, Paris, Fayard, 2014, p. 244
- [151]
André Petitjean et Armelle Hesse-Weber, « Pour une problématisation sémiologique de la pratique de l’adaptation », Écho des études romanes. Revue semestrielle de linguistique et littératures romanes, VII, no 2, Métamorphoses du texte, 2011, p. 5-20.
- [152]
- [153]
- [154]
Gérard-Denis Farcy, « L’Adaptation dans tous ses états », Poétique : revue de théorie et d’analyse littéraire, n°96, 1993, p. 387-414.
- [155]
André Petitjean et Armelle Hesse-Weber, « Pour une problématisation sémiologique de la pratique de l’adaptation », op. cit., p. 10.
- [156]
- [157]
- [158]
Michel Corvin (éd.), Dictionnaire encyclopédique du théâtre à travers le monde, op. cit., p. 33.
- [159]
- [160]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 101.
- [161]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 513.
- [162]
- [163]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 102.
- [164]
Anne-Marie Christin, L’Espace et la Lettre : écritures, typographies, Cahiers Jussieu, 3, Université Paris 7, Paris, Union générale d’éditions, coll. « 10-18 », p. 249 (citée par Ibid., p.103).
- [165]
- [166]
Pierre Larthomas, Le Langage dramatique : sa nature, ses procédés, Paris, Presses universitaires de France, 2016, p. 25 .
- [167]
Jean-Marie Thomasseau, « Les Manuscrits de théâtre. Essai de typologie », op. cit., p. 106.
- [168]
Ibid.
- [169]
Ibid., p. 114.
- [170]
Patrice Pavis, L’Analyse des textes dramatiques de Sarraute à Pommerat, Paris, Armand Colin, 2016, p. 11.
- [171]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 427.
- [172]
Cf. le chapitre « Les formes de la pièce et de l’acte » dans Jacques Scherer, La Dramaturgie classique en France, Paris, Armand Colin, 2014, p. 285-311.
- [173]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 428.
- [174]
- [175]
- [176]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 448.
- [177]
Ibid., p. 448-449.
- [178]
Cf. préambule à Alain Viala, Le Théâtre en France, op. cit.
- [179]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 452.
- [180]
- [181]
Anne Ubersfeld, Lire le théâtre. III, Le Dialogue de théâtre, Paris, Belin, 1996, p. 11.
- [182]
Pour appréhender les approches valorisant l’outil linguistique, en cherchant à décrire cette « grammaire théâtrale dans son équilibre », cf. Claire Despierres, Hervé Bismuth, Mustapha Krazem et Cécile Narjoux, La Lettre et la Scène : linguistique du texte de théâtre, Dijon, Éditions universitaires de Dijon, 2009.
- [183]
Anne Ubersfeld, Lire le théâtre. I, Paris, Belin, 1996, p. 187-188.
- [184]
Didier Souiller et al., Études théâtrales, op. cit., p. 464.
- [185]
Patrice Pavis, L’Analyse des textes dramatiques de Sarraute à Pommerat, op. cit.
- [186]
Umberto Eco, Lector in fabula : le rôle du lecteur ou la coopération interprétative dans les textes narratifs, trad. Myriem Bouzaher, Paris, Librairie générale française, 1985, p. 12. Idem pour les deux citations qui suivent.
- [187]
- [188]
Patrice Pavis, L’Analyse des textes dramatiques de Sarraute à Pommerat, op. cit., p. 15.
- [189]
Ibid., p. 31.
- [190]
- [191]
Le mot lui-même date de 1800 d’après le Grand Robert de la langue française.
- [192]
Béatrice Boisson, Alice Folco et Ariane Martinez, La Mise en scène théâtrale de 1800 à nos jours, op. cit., p. 154.
- [193]
Ibid., p. 13-14.
- [194]
Ibid., p. 14-16.
- [195]
- [196]
- [197]
Ibid., p. 17.
- [198]
- [199]
- [200]
- [201]
- [202]
- [203]
- [204]
Cf. Patrice Pavis, Le Théâtre au croisement des cultures, Paris, Corti, 1990.
- [205]
Hans-Georg Gadamer, Vérité et méthode : les grandes lignes d’une herméneutique philosophique, trad. Paul Ricœur, Paris, Le Seuil, 1976, p. 136.
- [206]
Patrice Pavis, L’Analyse des spectacles, op. cit., p. 35.
- [207]
Ce que l’on retrouve dans les textes de Denis Diderot, De la poésie dramatique, 1758, et de Gotthold Ephraim Lessing, Hamburgische Dramaturgie, 1767.
- [208]
- [209]
- [210]
Bernard Dort, « L’État d’esprit dramaturgique », dans Théâtre Public, n° 67, février 1986, p. 9.
- [211]
Bernd Stegemann, Lektionen 1, Dramaturgie, Berlin, Theater der Zeit, 2009, p. 10. Je traduis.
- [212]
Antoine Vitez, « Une entente », Théâtre/Public, n° 64-65, 1985, p. 25.
- [213]
Anne-Françoise Benhamou, « Bref aperçu d’une dramaturgie expérimentale », dans Du dramaturge, Nantes, Le Grand T Éditions Joca Seria, 2008, p. 48.
- [214]
Marion Boudier et al., De quoi la dramaturgie est-elle le nom ?, op. cit., p. 159.
- [215]
Ibid., p. 77.
- [216]
Ibid., p. 154.
- [217]
Bernard Dort, « L’État d’esprit dramaturgique », op. cit., p. 9.
- [218]
Marion Boudier et al., De quoi la dramaturgie est-elle le nom ?, op. cit., p. 120.
- [219]
Ibid., p. 116.
- [220]
J’ancre ici mes propositions méthodologiques dans les pas de Pavis. Cf. chapitre sur « Les conditions de l’analyse » dans Patrice Pavis, L’Analyse des spectacles : théâtre, mime, danse, danse-théâtre, cinéma, Paris, Armand Colin, 2016, p. 10-57.
- [221]
- [222]
Ces questionnaires sont reproduits dans André Helbo et al., Théâtre, modes d’approche, Paris, Méridiens-Klincksieck, 1987 et dans Patrice Pavis, Voix et images de la scène: essais de sémiologie théâtrale, Villeneuve d’Ascq, Presses universitaires de Lille, 1982.
- [223]
- [224]
Hans-Thies Lehmann, « Die Inszenierung : Probleme ihrer Analyse », Zeitschrift für Semiotik, vol. 11, no 1, 1989, p. 43.
- [225]
- [226]
- [227]
- [228]
- [229]
Patrice Pavis, L’Analyse des spectacles, op. cit., p. 57.
- [230]
Un essai qui amplifie et prolonge les premières réflexions exposées dans cet article est en cours d’écriture.
- [231]
Patrice Pavis, L’Analyse des textes dramatiques de Sarraute à Pommerat, op. cit., p. 195.
- [232]
Anne Ubersfeld, Lire le théâtre II, L’École du spectateur, Paris, Belin, 1996, p.10.
- [233]
André Helbo, Catherine Bouko et Élodie Verlinden, Interdiscipline et arts du spectacle vivant, Paris, H. Champion, 2013, p. 7.
- [234]
Ibid., p. 9.
Pour citer cet article
Delphine EDY, « Le "Texte-en-scène" : pour une analyse augmentée du Théâtre », Bibliothèque comparatiste, n°14, 2024., URL : https://sflgc.org/bibliotheque/edy-delphine-le-texte-en-scene-pour-une-analyse-augmentee-du-theatre/, page consultée le 08 Décembre 2024.
Biographie de l'auteur
EDY, Delphine
Delphine Edy est spécialiste de théâtre contemporain, enseignante, critique et traductrice pour L’Arche Agence théâtrale. Docteure en littérature comparée et agrégée d’allemand, elle enseigne en classes préparatoires et à l’université de Strasbourg en littérature comparée et en études théâtrales. Son ouvrage Thomas Ostermeier : explorer l’autre face du réel pour recréer l’œuvre en scène est paru aux presses du réel à Dijon en 2022. Elle a co-dirigé avec André Petitjean le numéro de Pratiques intitulé Théâtre contemporain : Écritures et Représentations (N°191-192, 2021). Membre associée de l’ACCRA (Université de Strasbourg), de l’Observatoires des écritures contemporaines françaises et francophones (Université Paris Nanterre) et du CRLC (Sorbonne Université), elle a déjà à son actif plus d’une vingtaine d’articles portant sur le théâtre contemporain au croisement des questions d’éthique, d’esthétique et de politique.