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Trimalchio, Birotteau, Gatsby : quelques remarques sur la bibliothèque du "parvenu"

ARTICLE

Se la signora ama proprio la noja, non màncano biblioteche
[Si Madame aime vraiment l'ennui, les bibliothèques ne manquent pas]. [1]
Carlo Dossi

Trimalchio, libertus puteolanus enrichi, est en train d'étaler majestueusement ses trésors, en révélant à ses invités l'incroyable étendue de ses domaines, tellement formidable que lui-même ne la connaît pas [2] . Le vin qui est servi dans son banquet, un véritable locus de divitiis, il ne l'achète pas : dans la géographie gastronomique de Trimalchio, la nourriture parvient de partout, car il est dans ses habitudes de considérer tout le midi d'Italie, de Terracine à Tarente, comme une annexe de sa propriété. Concentré de vanité enfantine et de bêtise réjouissante, esclave de ses entrailles, il se soucie de garnir constamment sa table d'un condiment indigeste de sornettes invraisemblables et d'affirmations hyperboliques. Toute son érudition, en fait, se réduit à des citations erronées d'Homère. La culture n'est donc qu'une sauce, un ragoût à servir tout au long d'un convivium : en parodiant la tradition du Symposium platonicien, nourriture et culture occupent la même place en tant que signa d'un pouvoir ostentatoire. [3]

C'est pour cette raison que Trimalchio aime bien accueillir à sa table des hommes qui commercent avec les litterae : ce qu'aujourd'hui on appellerait un intellectuel, le rhéteur Agamennon, et ses disciples, Encolpius, Ascyltus et Giton. Le libertus n'accorde aucun respect à ses hôtes et il n'a pas vraiment l'intention de soutenir une conversation avec eux. Son esprit est toujours accaparé par lui-même, son besoin d'ostentation est inextinguible et son unique souci est d'accroître l'impression suscitée par sa ingens mensa. Tout ce qu'il désire, c'est que son pouvoir presque divin soit glorifié sans cesse.

En interrogeant Agamennon au sujet de la controverse qu'il a plaidée ce jour-là, il reste surpris de la réponse (« Pauper et diues inimici erant » [« Un pauvre et un riche étaient ennemis »]), et il demande : « Quid est pauper? » [« Un pauvre, mais qu'est-ce que donc ? »]. Il serait réducteur d'interpréter cette question comme une manifestation d'arrogance de la part d'un homme ignorant et insensé : c'est plutôt que le parvenu, littéralement, ne reconnaît plus ses semblables. La pauvreté lui est devenue complètement étrangère : l'opulence constitue désormais son seul horizon. Si les hommes de lettres de l'Antiquité avaient toutes les difficultés du monde à se procurer des livres - dont le coût était extrêmement élevé - les parvenus comme Trimalchio n'avaient quant à eux aucun scrupule à se faire bâtir des bibliothèques luxueuses qu'ils ne fréquentaient guère. Et si Auguste avait réussi à ériger deux bibliothèques (la Grecque et la Latine), lui, l'homme le plus riche de l'Empire, ne rêvait que d'une chose : lui en offrir une troisième (« Et ne me putas studia fastidium, tres bybliothecas habeo, unam Graecam, alteram Latinam » [« Et ne vas pas croire que je méprise les études ; j'ai trois bibliothèques, dont une grecque, une autre latine »]). Le chiffre trois, comme on sait, possède une dimension sacrée. Qu'est-ce qui est conservé dans cette troisième bibliothèque ? Trimalchio ne le dit pas : en fait, elle est un adynaton,dans la mesure où il n'existait qu'à l'époque que deux cultures bibliographiques.

Trimalchio se présente donc comme un personnage paradigmatique qui doit nous faire comprendre que, dans la tradition idéologique de l'Occident gréco-latin - dont nous sommes les héritiers - la bibliothèque n'est pas forcément un lieu sacré, dédié à l'amoureuse conservation du passé et de ses témoignages, un temple voué à la bibliomanie ainsi que "la cité des livres" imaginée par Anatole France pourrait, par exemple, le laisser croire [4] . Elle peut aussi être un luxe, voire même constituer une volupté : rien d'autre, au bout du compte, qu'un signe de richesse parmi d'autres. Les bibliothèques se présentent ainsi parfois comme des lieux de prestige et de puissance, pas toujours comme des "lieux de mémoire". La preuve en est que le célèbre architecte romain Vitruve, en exposant les règles concernant le rapport entre le statut social et les divers types d'habitation, écrivait que les gens de condition avaient besoin de bibliothèques dont la magnificence ne devait le céder en rien à celle des bâtiments publics [5] . Si on veut être admiré, il importe de posséder une bibliothèque exceptionnelle et il importe peu qu'on aime les livres ou non.

Au moment de condamner, dans le De tranquillitate animi [6] , toute séduction extérieure et tout gaspillage, Sénèque évoque également les dépenses somptuaires d'ordre littéraire (même si elles sont liberalissima, c'est-à-dire "d'un ordre très supérieur" aux autres). La bibliothèque d'Alexandrie, comme il l'écrit, était un monument à la gloire du luxe plutôt qu'à celle de la littérature : elle n'était pas un « pulcherrimum regiae opulentiae monumentum », un monument de la munificence, du goût et de la sollicitude des rois, mais au contraire de la « studiosa luxuria » [« orgie de littérature »]. Et les livres qui y étaient conservés n'étaient aucunement, selon lui, des instruments de connaissance : « quoniam non in studium, sed in spectaculum comparaverant, sicut plerisque ignaris etiam puerilium litterarum libri non studiorum instrumenta, sed cenationum ornamenta sunt » [« et quand je dis de littérature, j'ai tort, le souci des lettres n'y entrait pour rien : ces belles collections n'étaient constituées que pour la montre. Que de gens dépourvus de la plus élémentaire culture ont ainsi des livres qui ne sont aucunement des instruments d'étude, mais qui ornent leur salle à manger ! »]. Dans les grandes demeures nobiliaires, poursuit-il, la bibliothèque se trouve à côté des bains et des thermes et constitue un ornement obligé. Il n'est qu'une seule raison pour laquelle des hommes ignorants mais possédant une immense fortune veuillent acquérir quantité d'œuvres rares : pour les faire voir et en décorer les murs (« in speciem et cultum parietum »). Et les rayonnages de s'accumuler jusqu'au plafond  proportionnellement à la richesse et à la puissance de leurs propriétaires.

Ceci constitue une vérité sociale éternelle qui ne pouvait échapper au génie satirique d'un Charles Dickens ; elle est au cœur d'un de ses récits : Our Mutual Friend. M. Venereeing, affairiste peu raffiné [7] , a fait construire dans sa charmante demeure « a library of bran-new books, in bran new bindings liberally gilded » [« une bibliothèque de livres tout neufs avec des reliures toutes neuves et généreusement dorées »]. [8] Cette bibliothèque est stratégiquement située à côté de la salle à manger, où M. et Mme Venereeing organisent de nombreux banquets aussi solennels que coûteux, dans le seul but  d'élargir le “chœur mondain” qui afflue chez eux. [9]

La bibliothèque peut donc se réduire, comme le soulignent Sénèque, Pétrone et Dickens, à un spectaculum, une parade destinée à orner les murs de la salle à manger. À cet égard, il n'existe aucune différence entre un libertus de l'ancienne Rome qui roule sur l'or et un aventurier américain du XXème siècle devenu un Tycoon : le Gatsby de Fitzgerald. À l'instar de Trimalchio [10] , Gatsby est un parvenu qui a réussi à s'enrichir de manière considérable par une série de malversations. Comme son illustre ancêtre, il a acheté une profusion de livres qu'il ne lit pas. Heureux de sa propre ignorance, le magnat des Roaring Twenties, comme le nouveau riche d'âge impérial, trouvent satisfaction dans l'étalage de leurs possessions culturelles.

Nick Carraway, le (co-)protagoniste du roman de Fitzgerald, est un demi-intellectuel, un homme qui aime l'étude pour avoir été naguère « rather literary in college » [« au collège j'avais été assez porté sur la littérature »] [11] . L'auteur souligne que Nick est un lecteur passionné (« There was so much to read, for one thing, and so much fine health to be pulled down out of the young breath-giving air » [« En premier lieu, il y avait tant de livres à lire, tant de belle santé à cueillir aux branches de l'air jeunet et dispensateur de souffle ! »]) [12] et qu'il passe beaucoup de temps à annoter des ouvrages en bibliothèque (« I went upstairs to the library and studied investments and securities for a conscientious hour » [« je montais dans la bibliothèque et étudiais avec conscience placements et valeurs pendant une heure »]) [13] . En dépit de cette passion, Nick ne possède pas sa propre bibliothèque : peut-être n'a-t-il pas assez d'argent. Par contre son "double", Gatsby, qui n'a aucun goût pour la culture mais qui est cousu d'or, a fait installer dans sa maison une vaste « Gothic library » : il n'est pas surprenant qu'elle soit placée juste à côté du bar. Les casiers à livres (« armaria ») de citre et d'ivoire, condamnés par Sénèque pour leur aspect ostentatoire, sont devenus des panneaux de chêne anglais. On pourrait même croire que les livres qui y sont conservés - ou mieux : empilés - ne sont pas de vrais livres, mais seulement des couvertures en carton : c'est du moins l'impression première d'Owl-Eyes, un personnage mystérieux que Nick va rencontrer dans la « Gothic library » et qui représente une sorte de fantôme de la bibliothèque [14] (« They're real », « Absolutely real - have pages and everything. I thought they'd be a nice durable cardboard. Matter of fact, they're absolutely real »[« Ils sont vrais », « Absolument vrais. Ils ont des pages et tout ce qui s'ensuit. Moi, je croyais qu'ils étaient en carton. Eh bien, pas du tout. Ce sont de vrais livres. Pages et.... Vous allez voir »]) [15] . Les nombreux volumes de Gatsby sont authentiques, donc, mais totalement inutiles car personne n'en a jamais coupé les pages, personne n'a jamais songé à les lire. Ils ne sont de facto rien d'autre que des bibelots.

Un tel scénario nous remet en mémoire une diatribe virulente écrite aux alentours de 171 a.c. par Lucien de Samosate contre un homme riche qui avait refusé de lui prêter un livre. Le titre de ce texte est éloquent : Contre un ignorant qui achetait beaucoup de livres. Lucien soutient que son adversaire - un syrien : il y a là-dedans, bien entendu, une allusion raciste - souhaite acquérir la réputation d'un homme instruit en s'empressant d'acheter les livres les plus précieux ; mais cette névrose de l'accumulation, écrit-il, ne sert qu'à mieux exhiber son ignorance. Une bibliothèque fournie ne saurait prouver en effet l'intelligence de son propriétaire : “Le singe”, dit un proverbe cité par l'auteur, reste un singe, quand bien même il porterait des ornements d'or”. Le polémiste a beau chercher à comprendre le motif qui a pu inspirer à son adversaire ces achats compulsifs, il n'y parvient pas. Pourquoi cet homme s'échine-t-il donc à se constituer une bibliothèque, alors qu'il n'aime pas lire ?

La seule réponse possible est une vérité de la Palisse : le Syrien désire étaler ses richesses, en montrant à tout le monde que la somptuosité de ses dépenses s'étend même à des objets qui lui sont absolument inutiles [16] . Évidemment, écrit Lucien, il achète les livres dans le seul but d'être flatté par ses hôtes, une bande de flagorneurs qui le persuadent de sa capacité à égaler par son savoir tous les orateurs et tous les écrivains de son temps et le couvrent d'éloges pour un oui ou pour un non. Lucien sait que son réquisitoire est vain : son adversaire ne cessera jamais d'agrandir sa collection, convaincu de déguiser son ignorance sous l'apparence de l'érudition et de passer pour savant aux yeux de son aréopage grâce au nombre de ses volumes. L'intellectuel est toujours vaincu d'avance : la seule chose qu'il puisse faire, c'est se moquer du puissant.

À la différence de l'adversaire Syrien de Lucien, poussé par l'ambition d'acquérir la réputation d'un homme instruit, Gatsby n'a même pas le désir de passer pour cultivé. Néanmoins, son ignorance ne diminue pas sa fascination : même s'il n'a jamais songé à entretenir avec ses livres quelque commerce que ce soit [17] , c'est un homme admirable. Son inculture ne fait l'objet d'aucune raillerie : ce serait même plutôt le contraire. On a là, soulignons-le au passage, une nouveauté par rapport à la représentation traditionnelle du parvenu, essentiellement sarcastique. Fitzgerald ne juge jamais ouvertement son personnage : il se borne à nous montrer Gatsby tel qu'il est, c'est-à-dire un homme renommé. Et la célébrité, le succès de ces hommes à la manière d'Howard Hughes vient de leur capacité à se donner en spectacle. Gatsby réussit de fait à créer dans sa demeure une ambiance sophistiquée, hollywoodienne, où chaque pièce renvoie à un type de décor cinématographique spécifique. Ce n'est pas par hasard qu'Owl-Eyes cite Belasco, le producteur Américain, célèbre pour le réalisme de ses scénographies (« This fella's a regular Belasco. It's a triumph. What thoroughness! What realism! » [« Ce type et un metteur en scène de premier ordre. Quelle perfection ! Quel art ! Quel réalisme ! »]). [18]

La bibliothèque de Gatsby n'est rien d'autre, au bout du compte, qu'un set, extrêmement coûteux et minutieusement réaliste : un spectaculum, comme l'écrivait Sénèque, un lieu de loisirs. C'est pour cette raison qu'Owl-Eyes ne peut pas croire que Nick et Jordan soient entrés dans la bibliothèque par hasard : tout le monde y est conduit, comme dans une salle de théâtre (« “Who brought you?” he demanded. “Or did you just come ? I was brought. Most people were brought” » [« Qui vous a amenés ? s'informa-t-il, ou êtes-vous venus tout seuls ? Moi, on m'a amené. La plupart des gens qui sont ici, on les a amenés »]) [19] . Mais ce n'est pas tout : cette bibliothèque gothique en fait n'est plus exclusivement, comme dans le cas des bibliothèques de l'Antiquité, un monument au luxe, une belle collection qui n'existent que pour être montrés : elle est devenue loge de théâtre ou encore habitacle d'une voiture hors-série, bref, un lieu de séduction.

C'est ce nouveau contexte de séduction qui permet à la femme d'accéder enfin à la bibliothèque, elle qui, naguère, comme nous le rappelle Virginia Woolf dans A Room for One's Own, n'avait pas le droit d'y pénétrer. Il arrive même qu'elle se saisisse des rênes du jeu. Owl-Eyes, par exemple, déclare avoir été "amené" à la « Gothic library » par une femme, Roosevelt (« I was brought by a woman named Roosevelt »), qui nous est présentée comme une créature nocturne et hypnagogique, une espèce de moyen terme entre la Vampire rimbaldienne et la dark lady (« I met her somewhere last night » [« Je l'ai rencontrée la nuit dernière, quelque part »]) [20] . Le lecteur acquiert peu à peu la certitude que Gatsby conduit ses diverses amantes dans sa bibliothèque pour les prendre au filet (« As I waited for my hat in the hall the door of the library opened and Jordan Baker and Gatsby came out together. He was saying some last word to her, but the eagerness in his manner tightened abruptly into formality as several people approached him to say good-bye » [« Comme j'attendais mon chapeau dans le vestibule, la porte de la bibliothèque s'ouvrit, laissant passer Jordan Baker et Gatsby. Il disait un dernier mot à la jeune femme, mais la chaleur de son attitude se transforma brusquement en une politesse mondaine quand plusieurs personnes s'approchèrent pour prendre congé de lui »]) [21] . Gatsby “porte” donc les livres comme des vêtements, ils sont un capital de charme à faire fructifier. S'il ne maîtrise pas l'espace de la culture, il maîtrise très bien, en revanche, les espaces de séduction. Face à la puissance extraordinaire qui émane du riche viveur, l'intellectuel - Fitzgerald tout autant que Nick - ne peut qu'être envoûté, jusqu'à en être presque obsédé.

Cette explicite fonction “séductrice” de la bibliothèque on la retrouve dans de nombreux romans décrivant les vicissitudes des grandes familles de la haute bourgeoisie française, anglaise et américaine, mais aussi de la noblesse italienne. Pensons par exemple à The House of Myrth d'Edith Wharton. La bibliothèque des Trenors (une famille très en vue de la haute bourgeoisie new-yorkaise), située dans le vieux manoir de Bellomont, constitue l'exemple parfait d'un lieu de culture réduit à n'être plus qu'un lieu de séduction : « The library at Bellomont was in fact never used for reading, though it had a certain popularity as a smoking-room or a quiet retreat for flirtation » [« En fait, on ne lisait jamais dans la bibliothèque de Bellomont ; mais la pièce jouissait d'une certaine popularité comme fumoir ou comme retraite tranquille pour le flirt »] [22] . On pourrait également évoquer la famille Ponteleone dans Il Gattopardo de Giuseppe Tomasi di Lampedusa. En l'occurrence, la bibliothèque jouxte la salle de bal ; c'est une pièce peu fréquentée, un lieu froid et impersonnel : « Ponteleone non era tipo da perdere il suo tempo lì dentro » [« Ponteleone n'était pas homme à perdre son temps là-dedans »] [23] . Don Diego, le maître de maison, écrit Tomasi di Lampedusa, qui aurait paru plébéien sans ses yeux arrogants [24] , « doveva entrare in quella stanza sì e no una volta all'anno » [« [il] ne devait guère entrer dans cette pièce plus de deux fois par an »] [25] . Une nouvelle fois, par conséquent, une somptueuse bibliothèque nous est décrite, dont la fonction n'est certainement pas de constituer un lieu de conservation de la culture. En revanche, c'est dans cette même bibliothèque qu'Angelica “séduit” Don Fabrizio, en lui demandant de danser avec elle la première valse : c'est à ce moment-là que le vieux noble abandonne ses pensées lugubres (on a dans ce passage une véritable revue iconographique de la mort : la Mort du Juste de Greuze, le tombeau de famille, la crypte des Capucins) et revient à la vie. [26]

Un troisième exemple de contiguïté entre la salle de bal et la bibliothèque, c'est-à-dire les deux espaces de séduction principaux de la maison, nous est fourni par César Birotteau de Balzac. César est un « pauvre paysan parvenu », « venu de Touraine à Paris avec un bâton à la main, à pied, en souliers ferrés » [27] . Il  s'est constitué une solide fortune grâce à son sens des affaires dans le domaine de la parfumerie et est devenu un véritable pilier de la bourgeoisie commerçante. Mais ce n'est pas "un homme du monde" et son manque d'instruction saute aux yeux : « En venant à Paris, César savait lire, écrire et compter, mais son instruction en était restée là, sa vie laborieuse l'avait empêché d'acquérir des idées et des connaissances étrangères au commerce de la parfumerie [...]. Il épousa forcément le langage, les erreurs, les opinions du bourgeois de Paris qui admire Molière, Voltaire et Rousseau sur parole, qui achète leurs œuvres sans les lire ». [28]
Telle est, encore une fois, la culture des parvenus : comme l'érudition de Trimalchio se réduisait à des citations erronées d'Homère, celle de la bourgeoise commerçante parisienne du XIXème siècle se limite à un amas de lieux communs et de plaisanteries à dégoiser face au monde [29] . Et voilà relancée la polémique de Sénèque contre ceux qui achètent des œuvres pour le seul plaisir de les posséder. La fille de César, Césarine, qui a étudié et qui est « un ange », « incapable de mépriser son père ou de se moquer de son défaut d'instruction » [30] , veut lui offrir ce qu'elle estime être le plus beau des cadeaux : une petite collection de livres. Une idée généreuse… Malheureusement, ces volumes, Balzac l'écrit tout net, ne seront jamais lu :

Césarine, la chère enfant, avait employé tout son petit trésor, cent louis, à acheter des livres à son père. Monsieur Grindot lui avait un matin confié qu'il y aurait deux corps de bibliothèque dans la chambre de son père, laquelle formait cabinet, une surprise d'architecte. Césarine avait jeté toutes ses économies de jeune fille dans le comptoir d'un libraire, pour offrir à son père : Bossuet, Racine, Voltaire, Jean-Jacques Rousseau, Montesquieu, Molière, Buffon, La Fontaine, Corneille, Pascal, La Harpe, enfin cette bibliothèque vulgaire qui se trouve partout et que son père ne lirait jamais. [31]

Dans un milieu semblable, les livres, et la culture en général, sont donc des choses enfantines, des surprises que les adorables fillettes font à leur bon papa [32] : on ne saurait les prendre au sérieux.

Les « hommes pratiques », ceux qui doivent penser à leurs seules affaires, n'ont pas de temps à perdre dans la lecture. Cependant, les hommes réputés ont aussi le devoir de ne pas déroger, autant dire de se livrer à des dépenses excentriques, folles. Les parvenus comme César, en particulier, signifient  ainsi leur accès à la classe supérieure en acquérant des « superfluités » : « rien ne peut se faire simplement chez les gens qui montent d'un étage social à un autre » [33] . La bibliothèque devient donc un investissement en termes d'image de marque et constitue une manifestation symbolique de puissance. C'est un symptôme analysé par Peter Gay dans The Education of senses : « the claim to the cultivation is probably more characteristic of more bourgeois than any other of their cultural habits », « many bourgeois amassed attributes of cultivation not to flatter the eye, delight the ear, or move the soul, but to display, in the autentic manner of parvenu, their recently acquired wealth and status ». [34]

C'est pour cette unique raison que les livres offerts par Césarine à son père ne sont pas immédiatement jetés dans un coin et oubliés, mais vont prendre place sur les rayonnages de la bibliothèque que l'architecte Grindot a construite dans le nouvel appartement de la famille. La bibliothèque est donc un luxe, un ornement du cabinet dont César, en tant que "nouveau riche", ne saurait se passer. Même si l'architecte a veillé à ce qu'elle soit sobre et d'utilisation simple, « de bon goût » [35] , aux yeux du parfumeur elle ne possède pas d'autre qualité que celle de mettre en valeur sa nouvelle maison. Il conviendra donc de la montrer au grand monde, afin d'amplifier le “chœur mondain”, et en tirer profit, comme le souhaitaient aussi les Venereeings de Dickens. À cette fin, César décide d'organiser, au comble de son "irrésistible ascension" [36] , un bal pour l'inauguration de son appartement. Les deux lieux de loisir, le “temple” du savoir et celui du divertissement, sont de nouveau associés en tant que symboles de pouvoir et de séduction. [37]

Aujourd'hui, ce processus que la littérature a si bien décrit au fil des siècles, semble arrivé à son terme. On peut désormais acheter des livres au supermarché, dans les kiosques, et leur vente s'effectue via les quotidiens et les hebdomadaires, chacun proposant sa propre "sélection" de chefs-d'oeuvre classiques (en Italie, par exemple, la « Bibliothèque de la Repubblica »). Les « sacrorum opera ingeniorum », les "génies de l'humanité", pour reprendre les termes de Sénèque, sont donc à la portée de tous. Tout le monde possède cette « bibliothèque vulgaire qui se trouve partout », selon les mots de Balzac cette fois, et toutes les pièces des maisons sont saturées de volumes que personne ne lit jamais. En outre, les frontières à l'intérieur de la maison ont disparu : on conserve les livres dans la salle même où l'on s'amuse ; il n'y a plus de “temples”, parce que les loisirs et la culture ont fini par se confondre. Les livres, au même titre que la voiture, le téléphone portable et la télévision, sont considérés comme des signes extérieurs, sinon de richesse, du moins de valeur sociale ajoutée. La bibliothèque privée a complètement perdu, par conséquent, sa fonction spécifique : les produits éditoriaux sont désormais conçus pour répondre à des exigences qui n'ont plus grand-chose à voir avec la culture.

On pourrait donc dire, pour conclure, que la logique d'accumulation des parvenus  a triomphé : on achète désormais les livres sans en faire aucun usage, « come l'analfabeta terrebbe biblioteche, per pura ostentazione » [« comme l'analphabète a une bibliothèque, par pure ostentation »] [38] , prisonniers que nous sommes de ce souci de thésaurisation un peu fétichiste, de ce que l'auctoritas - des journaux, surtout - garantit comme étant la “culture”. Ce qui est l'exacte contraire, on en conviendra, de la passion bibliophile : c'est-à-dire la possibilité et la volonté de se constituer un paradigme individuel, à partir soit de ses propres préférences littéraires (la choix des auteurs et des titres qu'on aime), soit des données relatives à l'objet-livre (les différentes éditions, la qualité du papier, la reliure etc.). Le résultat est que la plupart des soi-disant lecteurs accumulent un véritable « cimetière de livres » sans d'autres raisons que l'opinion courante selon laquelle, comme l'écrivait Dossi il y a un siècle et demi, « per crèdersi dotto ed èssere tale stimato, basta di avere, in casa la scienza » [39] . Le thème sénèquien du savoir accumulé par pure ostentation est devenu aujourd'hui d'une actualité brûlante : et c'est peut-être le statut même de ce que la "culture" qui doit être remis en question. La bibliothèque, en bref, ne jouit plus d'aucun prestige, si ce n'est dans la fiction.

Notes

  • [1]

    C. Dossi, La desinenza in A in Opere, a cura di Dante Isella, Milano, Adelphi, 1995, p. 695 ; tr. française C. Dossi, La désinence en A, roman traduit de l’italien par Chantal Moiroud, Toulouse, Éditions Ombres, 1991, p. 53.

  • [2]

    Petron., 48 (je cite d’après : Pétrone, Le Satiricon, Paris, “Les Belles Lettres”, 1922, texte établi et traduit par Alfred Ernout).

  • [3]

    « The food served to those at table, even more than an exhibition of lautitiae, is for Trimalchio the medium of intellectual communication » (G. B. Conte, The Hidden Author. An Interpretation of Petronius’s Satyricon, Berkeley, Los Angeles, London, University of California Press, 1996, p. 124 note 24).

  • [4]

    L’expression “cité des livres” est employée dans l’Histoire de Manon Lescaut (voir Notice in Œuvres I, édition établie, présentée et annotée par Marie-Claire Bancquart, p. ix), mais elle revient aussi plusieurs fois dans Le Crime de Sylvestre Bonnard. Sylvestre Bonnard parle expressément du « pénible et vain effort » que les savants font pour « retenir et conserver les choses mortes » (Anatole France, Le Crime de Sylvestre Bonnard, dans Œuvres I,  p. 205).

  • [5]

    Cf. Vitr., 6, 5.2. (éd. française : Vitruve, De l’architecture. Livre VI, texte établi, traduit et commenté par Louis Callebat, Paris, “Les Belles Lettres”, 2004).

  • [6]

    Sen., Tranq., 9, 5-7 (je cite d’après l’édition Sénèque, Dialogues. IV. De Tranquillitate Animi, texte établi et traduit par René Waltz, Paris, “Les Belles Lettres”, 1927).

  • [7]

    La basse extraction des Venereeing est soulignée par Dickens : il les introduit en effet comme « bran-new people in a bran-new house in a bran-new quarter of London » [« des gens tout neufs dans une demeure toute neuve d’un quartier tout neuf de Londres »] (C. Dickens, Our Mutual Friend, edited with an Introduction by Michael Cotsell, Oxford, Oxford University Press, 1991, Book I, ch. II, The Man from Somewhere, p. 6; tr. fr. L’ami commun. Le mystère d’Edwin Drood, édition publiée sous la direction de Sylvère Monod, Paris, Gallimard, 1991, p. 8).

  • [8]

    Op. cit., Book I, ch. III, Another Man, p. 18 ; tr. fr. p. 22.

  • [9]

    « For it is by this time noticeable that, whatever befalls, the Veneerings must give a dinner upon it. Lady Tippins lives in a chronic state of invitation to dine with the Venereeings, and in a chronic state of inflammation arising from the dinners. Boots and Brewer go about in cabs, with no other intelligible business on earth than to beat up people to come and dine with the Venereeings. Venereeing pervades the legislative lobbies, intent upon entrapping his fellow-legislators to dinner. Mrs. Veneering dined with five-and-twenty bran-new faces over-night ; calls upon them all to-day; sends them every one a dinner-card tomorrow, for the week after next; before that dinner is digested, calls upon their brothers and sisters, their sons and daughters, their nephews and nieces, their aunts and uncles and cousins, and invites them all to dinner » [« Car il est maintenant manifeste que, quelque événement qui se produise, il faut que les Veneerings donnent un dîner en son honneur. Lady Tippins est dans un état chronique d’inflammation à la suite de ces dîners. Boots et Brewer vont et viennent en fiacre, sans qu’on puisse leur voir d’autre mission au monde que de rameuter des gens pour venir dîner chez les Veneerings. Veneering envahit les couloirs du Parlament, résolu à prendre ses collègues parlementaires au piège d’un dîner. Mme Veneerings a dîné avec vingt-cinq visages flambant neufs la vieille au soir et leur rend à tous visite aujourd’hui, et leur envoie à tous demain une carte d’invitation pour dîner à quinzaine, et avant que ce dîner ne soit digéré, rend visite à leurs frères et sœurs, à leurs fils et filles, à leurs neveux et nièces, à leurs oncles et tantes et cousins et cousines, et les invite tous à dîner »] (op. cit., Book III, ch. XVII, A Social Chorus, p. 618 ;  tr. fr. p. 730).

  • [10]

    « as obscurely as it had begun, his career as Trimalchio was over » [« aussi obscurément qu’elle avait commencé, se  termina sa carrière de Trimalcion »] (F. S. Fitzgerald, The Great Gatsby, London, Penguin, 1950, ch. VII, p. 119 ;  tr. fr. Gatsby Le Magnifique,  traduction de Victor Liona, Paris, Grasset, 1946, p. 147). Trimalchio était du reste le titre de la première version du roman : cf. F. S. Fitzgerald, Trimalchio. An early version of The Great Gatsby, edited by James L. W. West III, Cambridge, Cambridge University Press, 2000.

  • [11]

    Op. cit., ch. I, p. 10; tr. fr. p. 27.

  • [12]

    Ibid.

  • [13]

    Op. cit., ch. III,  p. 63 ;  tr. fr. pp. 84-85.

  • [14]

    « As Gatsby closed the door of the “Merton College Library” I could have sworn I heard the owl-eyed man break into ghostly laughter » [« Quand Gatsby ferma la porte de la bibliothèque gothique, j’aurais pu jurer que j’avais entendu l’homme aux yeux de hibou éclater d’un rire spectral »]  (op. cit., ch. V, p. 98 ; tr. fr. p. 122). Spectrale est aussi sa dernière apparition, pendant les funérailles de Gatsby : « I looked around. It was the man with owl-eyed glasses […]. I’d never seen him since then. I don’t know how he knew about the funeral, or even his name. The rain poured down his thick glasses, and he took them off and wiped them to see the protecting canvas unrolled from Gatsby’s grave » [« Je me retournai. C’était l’homme aux lunettes de hibou […]. Je ne l’avais plus revu. Je ne sais comment il avait eu vent de la cérémonie,  j’ignore jusqu’à son nom. La pluie ruisselait sur ses verres épais ; il les enleva et les essuya pour regarder la toile qu’on déroulait afin de protéger la tomb e»] (op. cit., ch. IX,  p. 181 ; tr. fr. p. 216).

  • [15]

    Op. cit., ch. III,  pp. 51-52 ; tr. fr,. p. 72.

  • [16]

    Lucian., Adversus Indoctum et libros multos ementem, 58, 19.

  • [17]

    Même si son père croit le contraire : « Jimmy was bound to get ahead […]. Do you notice what he’s got about improving his mind ? He was always great for that » [« Jimmy devait faire son chemin […]. Vous avez remarqué ce qu’il a mis là sur ce qui était utile à l’esprit ? Il a toujours été très fort là-dessus »]  (F. S. Fitzgerald, The Great Gatsby, ch. IX, p. 180; tr. fr. p. 215).

  • [18]

    Op. cit., ch. III, p. 52 ; tr. fr. p. 73.

  • [19]

    Ibid.

  • [20]

    Ibid.

  • [21]

    Op. cit., ch. III, p. 59; tr. fr. p. 80.

  • [22]

    E. Wharton, The House of Myrth in Novels, New York, The Library of America, 1985, Book I, ch. V, p. 61 ; tr. fr. Chez les heureux du monde, traduit de l’américain par Charles Du Bos, préface de Frédéric Vitoux, Paris, Gallimard, 2000, p. 93. L’arrogance de ceux qui achètent des livres sans les lire, dénoncée par Lucien, est incarnée dans le roman par le personnage de Mr Gryce, le plus grand possesseur au monde de volumes “Americana” (une collection de documents très coûteux, que les historiens professionnels, pour cette raison, doivent consulter dans les bibliothèques publiques). Comme le souligne Edith Wharton, la bibliothèque de Mr Gryce est une construction pharaonique qui a quelque chose de sinistre et de funèbre : « the Gryce library in a fire-proof annex looked like a masoleum » [« la bibliothèque Gryce [était] dans une annexe « anti-feu », qui ressemblait à un mausolée »] (op. cit., Book 1, ch. 2, p. 22 ; tr. fr. p. 48). L’intellectuel Selden, en revanche, qui est un homme « who has no money to spend » [« qui n’a pas d’argent à dépenser »] possède une « small library, dark but cheerful » [« une petite bibliothèque, sombre mais riante »] (op. cit., Book 1, ch. 1, p. 6 ; tr. fr. p. 34; 29) :  il n’est pas, à proprement parler, un collectionneur mais un homme qui dépense son argent, gagné avec peine, en achetant de bonnes éditions des livres qu’il aime.

  • [23]

    G. Tomasi di Lampedusa, Il Gattopardo, Milano, Feltrinelli, 1958, cap. VI, p. 267 ; tr. fr. G. Tomasi di Lampedusa, Le Guépard, Paris, Éditions du Seuil, 1959, p. 206 [traduction de Fanette Pézard].

  • [24]

    En italien : « che gli occhi arcigni soltanto salvavano dall’apparenza plebea » (op. cit., cap. VI, p. 255; tr. fr. p. 196). C’est une allusion précise à une forma mentis, sinon à un passé, de parvenu.

  • [25]

    Op. cit., cap. VI, p. 267 ; tr. fr. p. 206.

  • [26]

    « Il Principe fu contentissimo, si sentiva tutto ringalluzzito […]. Le sue guancie pelose si agitarono per il piacere » [« Le Prince fut ravi et se sentit tout ragaillardi […]. Ses joues velues frémirent de contentement »] (op. cit., cap. VI, p. 269 ; tr. fr. p. 207).

  • [27]

    H. de Balzac, César Birotteau, préface d’André Wurmser, édition établie et annotée par S. de Sacy, Paris, Gallimard, 1975, p. 77 et 213.

  • [28]

    Op. cit., pp. 77-78.

  • [29]

    Encore plus grossier que César est le personnage de Monsieur Matifat : « Jamais il ne disait Corneille, mais le sublime Corneille ! Racine était le doux Racine. Voltaire ! oh ! Voltaire, le second dans tous les genres, plus d’esprit que de génie, mais néanmoins homme de génie ! Rousseau, esprit ombrageux, homme doué d’orgueil et qui a fini par se pendre » (op. cit., p. 217). Ces bêtises sont régulièrement mêlées à des anecdotes vulgaires et des obscénités, au point que sa femme, Madame Matifat, le surnomme familièrement « mon gros ». Sottises pseudo-culturelles et allusions indécentes vont donc ici de pair.

  • [30]

    Op. cit., p. 77.

  • [31]

    Op. cit., p. 206. Césarine sera du reste promptement « remboursée » par son père (p. 225).

  • [32]

    En voyant la bibliothèque dans son cabinet, César s’écrie : «“Mais cette bibliothèque garnie de livres reliés. Oh ! ma femme ! ma femme ! ” “Non, ceci est la surprise de Césarine” “Pardonnez à l’émotion d’un père”, dit-il à l’architecte en embrassant sa fille » (op. cit., p. 210).

  • [33]

    Op. cit., p. 205.

  • [34]

    P. Gay, The Bourgeois experience. Victoria to Freud. Volume I : Education of the Senses, New York, Oxford University Press, 1984, p. 28.

  • [35]

    « Là régnait enfin cette suave harmonie que les artistes seuls savent établir en poursuivant un système de décoration jusque dans les plus petits accessoires, et que les bourgeois ignorent, mais qui les surprend » (op. cit., p. 210).

  • [36]

    La fête sera en fait la « dernière flammèche du feu de paille d’une prospérité de dix-huit années près de s’éteindre » (op. cit., p. 227).

  • [37]

    À l’instar de Don Fabrizio dans Le Gattopardo, l’oncle Pillerault de César Birotteau  va lui aussi quitter la fête pour aller « s’installer dans un fauteuil auprès de la bibliothèque : il regarda les joueurs, écouta les conversations, et vint de temps en temps voir à la porte les corbeilles de fleurs agitées que formaient les têtes des danseuses au moulinet. Sa contenance était celle d’un vrai  philosophe » (op. cit., p. 221).

  • [38]

    C. Dossi, La desinenza in A cit p. 804 ;  tr. fr., p. 184.

  • [39]

    Allusion à Don Vittore, un curé qui conserve son immense collection de livres dans sa cave, avec des fruits pourris, « come terrebbe un castrato un gineceo » [« il les garde là comme il garderait un castrat dans un gynécée. Mais il lui suffit, pour se sentir savant et être considéré comme tel d’avoir, chez lui, la science »] (C. Dossi, La desinenza in A cit, p. 780 ; tr. fr.,  p. 157).

Biographie de l'auteur

Riccardo DONATI

Doctorant à l’Université de Florence. Sa thèse dirigée par A. Dolfi porte le titre : « Potere, scrittura e piacere nella letteratura veneziana al tramonto della Serenissima (1750-1797) ».