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La réception du Siècle d’Or espagnol dans les pays germanophones
Date de l'échéance : 31/03/2020
Lieu de l'événement : Université de St-Etienne
Nom de l'organisateur : Fanny Platelle et Morgane Kappès-Le Moing
Email de l'organisateur : morgane.kappes@univ-st-etienne.fr
Adresse postale : Morgane Kappès-Le Moing
Faculté Arts, Lettres, Langues
33 rue du 11 novembre
42023 Saint-Etienne cedex 02
Faculté Arts, Lettres, Langues
33 rue du 11 novembre
42023 Saint-Etienne cedex 02
La réception du Siècle d’Or espagnol dans les pays germanophones
Colloque international et interdisciplinaire
8-9 octobre 2020, Université Jean Monnet, Saint-Étienne
Bien qu’elles soient certainement plus anciennes[1], les influences culturelles réciproques entre l’Espagne et les pays germanophones se développent fortement durant le Siècle d’Or. Les portraits royaux du Prado et du Kunsthistorisches Museum de Vienne témoignent des nombreux échanges de princesses qui importent leurs habitudes et leurs goûts, telle l’impératrice Marguerite, fille de Philippe IV, immortalisée par Vélasquez dans Les Ménines, qui demande à son époux, l’empereur Léopold Ier, de faire représenter des comedias espagnoles à la Cour de Vienne. Par ailleurs, la Guerre de Trente ans, qui dévaste les pays germaniques, donne naissance au Simplicius Simplicissimus de Grimmelshausen, dont le héros, allant d’un maître à un autre, suit les traces des pícaros espagnols.
Si le xviiie siècle laisse dans une ombre relative les œuvres hispaniques[2], les romantiques allemands, dans le sillage de Ludwig Tieck et de Friedrich Schlegel, redécouvrent le Siècle d’Or, dans lequel ils voient l’expression de l’esprit allemand authentique. Ils proposent un regard moderne sur le Quichotte, qui ne se résume plus à sa dimension comique : les romantiques allemands mettent en évidence le mélange de valeurs antithétiques qui s’y produit – sérieux et burlesque, idéalisme et matérialisme etc[3]. Par ailleurs, leurs traductions de Calderón se distinguent par une extrême fidélité, qui va jusqu’au respect de la polymétrie et du schéma des rimes[4].
Les Autrichiens des xixe et xxe siècles, prenant la suite des romantiques allemands, proposent un regard différent sur le Siècle d’Or. Joseph Schreyvogel (directeur du Burgtheater de 1814 à 1832) adapte Calderón plus qu’il ne le traduit[5] ; Franz Grillparzer, sans délaisser Calderón, travaille sur l’œuvre de Lope de Vega, négligé par le romantisme allemand[6]. Quant à Hugo von Hofmannsthal, il est fasciné par l’empire multinational et catholique des Habsbourg d’Espagne, dont la splendeur littéraire et artistique va de pair avec un déclin politique progressif, dans un reflet prémonitoire du crépuscule impérial autrichien. Traduisant et adaptant les œuvres de Calderón, il tente d’en dégager la dimension universelle[7].
Le Siècle d’Or continue de fasciner les auteurs et artistes germaniques jusqu’à nos jours. Ainsi, en 1910, l’écrivain et historien de l’art Julius Meier-Graefe publie sa Spanische Reise, faisant découvrir Le Greco aux jeunes peintres de son temps. Meier-Graefe présente le maître espagnol comme un précurseur de la modernité et suscite ainsi l’enthousiasme de Beckmann et de Kokoschka, ainsi que des membres du groupe expressionniste Der blaue Reiter comme August Macke et Franz Marc[8]. En 1938, en route pour New York, Thomas Mann écrit Meerfahrt mit Don Quijote et, au tout début du xxie siècle, Peter Handke raconte le quichottesque voyage d’une princesse de la finance vers la Manche cervantine dans Der Bildverlust oder durch die Sierra de Gredos. Enfin, en 2012, Flix publie une bande dessinée dans laquelle Don Quichotte, juché sur un vélo, attaque les éoliennes…
Le colloque propose de s’interroger, de manière diachronique et comparatiste, sur la chronologie, les formes et les enjeux de la réception du Siècle d’Or dans les pays germanophones :
- Certaines périodes et certains genres se sont-ils révélés particulièrement propices à ces échanges ? Dans quel contexte (politique, culturel, idéologique) ?
- Qui sont les médiateurs favorisant cette réception (des traducteurs, des artistes, des mécènes, des voyageurs, des écrivains…) ? Quelles images de l’autre pays ont-ils transmises dans leurs œuvres ?
- Quelles fonctions la réception du Siècle d’Or a-t-elle eues (enjeux esthétiques, idéologiques…) ? Quelle en a été la fécondité ?
Les propositions de communication (2000 signes environ), assorties d’une brève notice bio-bibliographique, sont à envoyer pour le 31 mars 2020 à Morgane Kappès-Le Moing (Morgane.Kappes@univ-st-etienne.fr) et Fanny Platelle (Fanny.Platelle@uca.fr).
Langues de travail : français, allemand, espagnol
Comité d’organisation :
Morgane Kappès-Le Moing, Maître de conférences en civilisation et littérature espagnoles, CELEC (EA 3069), Université Jean Monnet Saint-Étienne.
Fanny Platelle, Maître de conférences en littérature germanophone, CELIS (EA 4280), Université Clermont Auvergne.
Lieu : Université Jean Monnet, Saint-Étienne
[1] Selon Felix Czeike, les échanges culturels entre l’Autriche et l’Espagne remonteraient au XIIIe siècle. Cf. Felix Czeike, Historisches Lexikon Wien in 6 Bänden, Wien, München, Zürich, Kremayr & Scheriau, 1992-1997, t. 5 Ru-Z, article « Spanier », p. 256. URL: https://www.digital.wienbibliothek.at/wbrobv/content/pageview/1116298 (consulté le 23/09/2019).
[2] La réception se poursuit toutefois, comme le montre par exemple Der teutsche Don Quichotte de W. E. Neugebauer (1753).
[3] Christoph Strosetzki, « La presencia del Quijote en la literatura alemana », ¿Qué Quijote leen los europeos ?, Miguel Ángel Vega Cernuda, Madrid, Universidad Complutense, 2005, p. 58-59.
[4] Henry W. Sullivan, El Calderón alemán. Recepción e influencia de un genio hispano (1654-1980), Frankfurt/M., Madrid, TPT, 1998, p. 188.
[5] María Luisa Esteve Montenegro, « El drama histórico de Lope de Vega y la Jüdin von Toledo de Franz Grillparzer », 1616 : Anuario de la Sociedad Española de Literatura General y Comparada, vol. XI, 2006, p. 100.
[6] Arturo Farinelli, Grillparzer und Lope de Vega, Berlin, E. Felber, 1894 ; Lope de Vega en Alemania, Barcelona, Bosch, 1936.
[7] Egon Schwartz, Hofmannsthal und Calderón, 'S -Gravenhage, Mouton, 1962.
[8] Beat Wismer, Michael Scholz-Hänsel, El Greco und der Streit um die Moderne. Fruchtbare Missverständnisse und Widersprüche in seiner deutschen Rezeption zwischen 1888 und 1939, Berlin, De Gruyter, 2015. On peut aussi se référer au catalogue de l’exposition s’étant tenue à Düsseldorf en 2012 : Greco und die Moderne, Berlin, Stuttgart, Hatje Cantz Verlag, 2012.
Colloque international et interdisciplinaire
8-9 octobre 2020, Université Jean Monnet, Saint-Étienne
Bien qu’elles soient certainement plus anciennes[1], les influences culturelles réciproques entre l’Espagne et les pays germanophones se développent fortement durant le Siècle d’Or. Les portraits royaux du Prado et du Kunsthistorisches Museum de Vienne témoignent des nombreux échanges de princesses qui importent leurs habitudes et leurs goûts, telle l’impératrice Marguerite, fille de Philippe IV, immortalisée par Vélasquez dans Les Ménines, qui demande à son époux, l’empereur Léopold Ier, de faire représenter des comedias espagnoles à la Cour de Vienne. Par ailleurs, la Guerre de Trente ans, qui dévaste les pays germaniques, donne naissance au Simplicius Simplicissimus de Grimmelshausen, dont le héros, allant d’un maître à un autre, suit les traces des pícaros espagnols.
Si le xviiie siècle laisse dans une ombre relative les œuvres hispaniques[2], les romantiques allemands, dans le sillage de Ludwig Tieck et de Friedrich Schlegel, redécouvrent le Siècle d’Or, dans lequel ils voient l’expression de l’esprit allemand authentique. Ils proposent un regard moderne sur le Quichotte, qui ne se résume plus à sa dimension comique : les romantiques allemands mettent en évidence le mélange de valeurs antithétiques qui s’y produit – sérieux et burlesque, idéalisme et matérialisme etc[3]. Par ailleurs, leurs traductions de Calderón se distinguent par une extrême fidélité, qui va jusqu’au respect de la polymétrie et du schéma des rimes[4].
Les Autrichiens des xixe et xxe siècles, prenant la suite des romantiques allemands, proposent un regard différent sur le Siècle d’Or. Joseph Schreyvogel (directeur du Burgtheater de 1814 à 1832) adapte Calderón plus qu’il ne le traduit[5] ; Franz Grillparzer, sans délaisser Calderón, travaille sur l’œuvre de Lope de Vega, négligé par le romantisme allemand[6]. Quant à Hugo von Hofmannsthal, il est fasciné par l’empire multinational et catholique des Habsbourg d’Espagne, dont la splendeur littéraire et artistique va de pair avec un déclin politique progressif, dans un reflet prémonitoire du crépuscule impérial autrichien. Traduisant et adaptant les œuvres de Calderón, il tente d’en dégager la dimension universelle[7].
Le Siècle d’Or continue de fasciner les auteurs et artistes germaniques jusqu’à nos jours. Ainsi, en 1910, l’écrivain et historien de l’art Julius Meier-Graefe publie sa Spanische Reise, faisant découvrir Le Greco aux jeunes peintres de son temps. Meier-Graefe présente le maître espagnol comme un précurseur de la modernité et suscite ainsi l’enthousiasme de Beckmann et de Kokoschka, ainsi que des membres du groupe expressionniste Der blaue Reiter comme August Macke et Franz Marc[8]. En 1938, en route pour New York, Thomas Mann écrit Meerfahrt mit Don Quijote et, au tout début du xxie siècle, Peter Handke raconte le quichottesque voyage d’une princesse de la finance vers la Manche cervantine dans Der Bildverlust oder durch die Sierra de Gredos. Enfin, en 2012, Flix publie une bande dessinée dans laquelle Don Quichotte, juché sur un vélo, attaque les éoliennes…
Le colloque propose de s’interroger, de manière diachronique et comparatiste, sur la chronologie, les formes et les enjeux de la réception du Siècle d’Or dans les pays germanophones :
- Certaines périodes et certains genres se sont-ils révélés particulièrement propices à ces échanges ? Dans quel contexte (politique, culturel, idéologique) ?
- Qui sont les médiateurs favorisant cette réception (des traducteurs, des artistes, des mécènes, des voyageurs, des écrivains…) ? Quelles images de l’autre pays ont-ils transmises dans leurs œuvres ?
- Quelles fonctions la réception du Siècle d’Or a-t-elle eues (enjeux esthétiques, idéologiques…) ? Quelle en a été la fécondité ?
Les propositions de communication (2000 signes environ), assorties d’une brève notice bio-bibliographique, sont à envoyer pour le 31 mars 2020 à Morgane Kappès-Le Moing (Morgane.Kappes@univ-st-etienne.fr) et Fanny Platelle (Fanny.Platelle@uca.fr).
Langues de travail : français, allemand, espagnol
Comité d’organisation :
Morgane Kappès-Le Moing, Maître de conférences en civilisation et littérature espagnoles, CELEC (EA 3069), Université Jean Monnet Saint-Étienne.
Fanny Platelle, Maître de conférences en littérature germanophone, CELIS (EA 4280), Université Clermont Auvergne.
Lieu : Université Jean Monnet, Saint-Étienne
[1] Selon Felix Czeike, les échanges culturels entre l’Autriche et l’Espagne remonteraient au XIIIe siècle. Cf. Felix Czeike, Historisches Lexikon Wien in 6 Bänden, Wien, München, Zürich, Kremayr & Scheriau, 1992-1997, t. 5 Ru-Z, article « Spanier », p. 256. URL: https://www.digital.wienbibliothek.at/wbrobv/content/pageview/1116298 (consulté le 23/09/2019).
[2] La réception se poursuit toutefois, comme le montre par exemple Der teutsche Don Quichotte de W. E. Neugebauer (1753).
[3] Christoph Strosetzki, « La presencia del Quijote en la literatura alemana », ¿Qué Quijote leen los europeos ?, Miguel Ángel Vega Cernuda, Madrid, Universidad Complutense, 2005, p. 58-59.
[4] Henry W. Sullivan, El Calderón alemán. Recepción e influencia de un genio hispano (1654-1980), Frankfurt/M., Madrid, TPT, 1998, p. 188.
[5] María Luisa Esteve Montenegro, « El drama histórico de Lope de Vega y la Jüdin von Toledo de Franz Grillparzer », 1616 : Anuario de la Sociedad Española de Literatura General y Comparada, vol. XI, 2006, p. 100.
[6] Arturo Farinelli, Grillparzer und Lope de Vega, Berlin, E. Felber, 1894 ; Lope de Vega en Alemania, Barcelona, Bosch, 1936.
[7] Egon Schwartz, Hofmannsthal und Calderón, 'S -Gravenhage, Mouton, 1962.
[8] Beat Wismer, Michael Scholz-Hänsel, El Greco und der Streit um die Moderne. Fruchtbare Missverständnisse und Widersprüche in seiner deutschen Rezeption zwischen 1888 und 1939, Berlin, De Gruyter, 2015. On peut aussi se référer au catalogue de l’exposition s’étant tenue à Düsseldorf en 2012 : Greco und die Moderne, Berlin, Stuttgart, Hatje Cantz Verlag, 2012.
Source de l'information : CELEC & CELIS