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Appel à communications : « Poétiques du merveilleux : fantastique, science-fiction, fantasy (littérature et arts visuels) »
« Poétiques du merveilleux :
fantastique, science-fiction, fantasy (littérature et arts visuel) »
29-30 novembre 2012
Colloque du CERLI (Centre d'Études et de Recherches en Littérature de l'Imaginaire), organisé par Anne Besson et Evelyne Jacquelin, Université d'Artois (Arras), E. A. « Textes et Cultures », axe « Imaginer/Représenter ».
Poétique des genres et littératures de l'imaginaire ont déjà une longue histoire commune, singulièrement contrastée : nulle part ailleurs peut-être qu'en observant ces formes, aux limites internes et externes disputées, ne ressort aussi clairement la tension constitutive de toute réflexion sur les genres littéraires
- entre d'une part la nécessaire théorisation surplombante, les typologies classificatoires, volontairement contraignantes et donc chaque fois remises en cause, et d'autre part les réalités pragmatiques de l'édition et de la réception, qui peuvent certes prétendre refléter la vérité des pratiques et des perceptions, mais dont la soumission aux aléas du temps et des modes ne permet pas qu'elles constituent toujours un critère opératoire pour un questionnement théorique, notamment d'un point de vue diachronique.
Dans la recherche littéraire française, l'importance tant quantitative que qualitative des réflexions sur le « fantastique », dominées quoi qu'on en ait par la proposition todorovienne, témoigne du statut de ce corpus comme objet privilégié d'une approche poétique. Si Pierre-Georges Castex, Louis Vax ou encore Roger Caillois avaient déjà largement désigné à l'attention une forme de narration marquée par la réception des Contes d'Hoffmann en France et caractérisée par l'inquiétante indécision des limites entre réel et surnaturel, c'est bien l'Introduction à la littérature fantastique de Todorov qui, par la séduisante rigueur de son tableau typologique des motifs et structures d'un « imaginaire » ancestral en littérature, imprime la marque la plus durable sur la réflexion critique consacrée à ces domaines. Bien que constamment rediscutée ensuite par des propositions théoriques fortes remettant en cause ses principes et contours, telles en France celles d'Irène Bessière, de Denis Mellier ou encore tout récemment de Nathalie Prince, sa distinction fondatrice entre « fantastique » et « merveilleux » comme lieux respectifs d'une surnature suscitant le trouble ou recueillant l'acceptation, s'est imposée comme une vulgate critique qui fait toujours référence dans le discours scolaire, et demeure incontournable à l'orée de toute nouvelle réflexion sur ces genres.
La science-fiction présente un cas de figure bien différent : longtemps, et aujourd'hui encore largement délaissée par la critique académique, elle s'est consacrée à un effort d'auto-définition passionné et toujours repris de l'intérieur
- émanant de ses lecteurs et producteurs souvent confondus, pour renforcer l'image d'un genre de spécialistes, à la spécificité aussi fuyante que férocement protégée. Le « sense of wonder », mis en avant dès les origines de cette réflexion, renvoyait à la catégorie du merveilleux, tout comme les distinctions typologiques du pionnier Darko Suvin (Pour une poétique de la science-fiction, 1977) ; si les travaux récents de Richard Saint-Gelais et Irène Langlet présentent une volonté de se confronter à un fonctionnement de la SF en tant que texte écrit et lu, venant compléter des entreprises importantes sur l'histoire et le répertoire thématique du genre, son articulation difficile aux autres formes de l'esthétique du merveilleux ne semble guère avoir été problématisée. Ainsi, la SF doit-elle, au nom de son refus d'un surnaturel inexplicable, être opposée à la fantasy, nouveau genre hégémonique se positionnant comme l'héritier direct des traditions du conte et du mythe ?
Ce tableau rapidement brossé témoigne de la dichotomie préjudiciable qui sépare des champs de recherche pourtant voisins, alors même que les acquis de l'histoire littéraire tendent à repérer des expressions mêlées du fantastique et du merveilleux, depuis le Moyen Âge et la Renaissance jusqu'au Romantisme. Il ne tient pas non plus compte des mutations rapides connues par les genres de l'imaginaire ces deux dernières décennies
- évolutions pragmatiques des productions et de leur réception, qui imposent que la réflexion s'y confronte. La place désormais occupée par une fantasy d'origine anglophone, rebelle aux anciennes classifications, demande qu'on repense les rapports entre ces différents modes d'expression de l'imaginaire désormais déclinés à l'échelle de la mondialisation. L'importance prise dans sa perception par ses formes audiovisuelles, vidéoludiques, et plus largement numériques, favorisée par le développement de stratégies de synergie multimédiatique (déclinaisons du même univers sur différents supports) constitue un autre grand facteur d'évolution susceptible d'influencer les approches génériques. On peut aussi noter, à cet égard, que la recherche internationale tend à adopter une terminologie anglo-saxonne où la notion de « fantastic » recouvre ces diverses expressions de l'imaginaire plus qu'elle ne les discrimine, le « fantastique » todorovien devant dans ce contexte être chaque fois resitué en référence à la tradition critique française, ce qui contribue à relancer sans cesse les débats théoriques, au gré d'un usage éminemment variable des concepts fondamentaux.
Ce colloque se donne pour objectif d'opérer une mise au point qui soit une mise à jour ; il se propose d'amorcer une réflexion sur la théorie des genres de l'imaginaire qui tienne compte de ces nouvelles données, dans une perspective diachronique et interculturelle. Il s'agit en particulier de redonner toute sa place au merveilleux, parent pauvre de la vulgate todorovienne et de la critique moderniste, et de questionner la pertinence de l'opposition fantastique/merveilleux :
• en quoi est-elle remise en cause par les avatars de la fantasy, mais aussi par les formes contemporaines du conte ou encore par les évolutions des thèmes et figures fantastiques, qui tendent manifestement à délaisser l'effroi pour sa part désirable ?
• dans quelle mesure est-elle valide pour les arts visuels ? Comment expliquer le succès de la SF cinématographique quand son sort en tant que genre littéraire apparaît nettement moins brillant ? De quelles façons l'appétence contemporaine pour la merveille s'investit-elle dans une certaine « magie » des nouvelles technologies et des promesses du virtuel ?
• la notion d'« imaginaire », dont le maniement théorique a souvent été décrié, mais qu'on voit réapparaitre dans le vocabulaire de l'édition française en réaction à la porosité des frontières génériques, pourrait-elle fournir un équivalent au « fantastic » large des anglophones ? Quels sont les lexiques et les distinctions ayant cours dans les autres aires culturelles, et en quoi influent-ils sur les formes esthétiques privilégiées ?
Les propositions, qui privilégieront les apports théoriques mais pourront se consacrer à des études de cas, sont attendues
Elles seront également observées par le comité scientifique du CERLI.
fantastique, science-fiction, fantasy (littérature et arts visuel) »
29-30 novembre 2012
Colloque du CERLI (Centre d'Études et de Recherches en Littérature de l'Imaginaire), organisé par Anne Besson et Evelyne Jacquelin, Université d'Artois (Arras), E. A. « Textes et Cultures », axe « Imaginer/Représenter ».
Poétique des genres et littératures de l'imaginaire ont déjà une longue histoire commune, singulièrement contrastée : nulle part ailleurs peut-être qu'en observant ces formes, aux limites internes et externes disputées, ne ressort aussi clairement la tension constitutive de toute réflexion sur les genres littéraires
- entre d'une part la nécessaire théorisation surplombante, les typologies classificatoires, volontairement contraignantes et donc chaque fois remises en cause, et d'autre part les réalités pragmatiques de l'édition et de la réception, qui peuvent certes prétendre refléter la vérité des pratiques et des perceptions, mais dont la soumission aux aléas du temps et des modes ne permet pas qu'elles constituent toujours un critère opératoire pour un questionnement théorique, notamment d'un point de vue diachronique.
Dans la recherche littéraire française, l'importance tant quantitative que qualitative des réflexions sur le « fantastique », dominées quoi qu'on en ait par la proposition todorovienne, témoigne du statut de ce corpus comme objet privilégié d'une approche poétique. Si Pierre-Georges Castex, Louis Vax ou encore Roger Caillois avaient déjà largement désigné à l'attention une forme de narration marquée par la réception des Contes d'Hoffmann en France et caractérisée par l'inquiétante indécision des limites entre réel et surnaturel, c'est bien l'Introduction à la littérature fantastique de Todorov qui, par la séduisante rigueur de son tableau typologique des motifs et structures d'un « imaginaire » ancestral en littérature, imprime la marque la plus durable sur la réflexion critique consacrée à ces domaines. Bien que constamment rediscutée ensuite par des propositions théoriques fortes remettant en cause ses principes et contours, telles en France celles d'Irène Bessière, de Denis Mellier ou encore tout récemment de Nathalie Prince, sa distinction fondatrice entre « fantastique » et « merveilleux » comme lieux respectifs d'une surnature suscitant le trouble ou recueillant l'acceptation, s'est imposée comme une vulgate critique qui fait toujours référence dans le discours scolaire, et demeure incontournable à l'orée de toute nouvelle réflexion sur ces genres.
La science-fiction présente un cas de figure bien différent : longtemps, et aujourd'hui encore largement délaissée par la critique académique, elle s'est consacrée à un effort d'auto-définition passionné et toujours repris de l'intérieur
- émanant de ses lecteurs et producteurs souvent confondus, pour renforcer l'image d'un genre de spécialistes, à la spécificité aussi fuyante que férocement protégée. Le « sense of wonder », mis en avant dès les origines de cette réflexion, renvoyait à la catégorie du merveilleux, tout comme les distinctions typologiques du pionnier Darko Suvin (Pour une poétique de la science-fiction, 1977) ; si les travaux récents de Richard Saint-Gelais et Irène Langlet présentent une volonté de se confronter à un fonctionnement de la SF en tant que texte écrit et lu, venant compléter des entreprises importantes sur l'histoire et le répertoire thématique du genre, son articulation difficile aux autres formes de l'esthétique du merveilleux ne semble guère avoir été problématisée. Ainsi, la SF doit-elle, au nom de son refus d'un surnaturel inexplicable, être opposée à la fantasy, nouveau genre hégémonique se positionnant comme l'héritier direct des traditions du conte et du mythe ?
Ce tableau rapidement brossé témoigne de la dichotomie préjudiciable qui sépare des champs de recherche pourtant voisins, alors même que les acquis de l'histoire littéraire tendent à repérer des expressions mêlées du fantastique et du merveilleux, depuis le Moyen Âge et la Renaissance jusqu'au Romantisme. Il ne tient pas non plus compte des mutations rapides connues par les genres de l'imaginaire ces deux dernières décennies
- évolutions pragmatiques des productions et de leur réception, qui imposent que la réflexion s'y confronte. La place désormais occupée par une fantasy d'origine anglophone, rebelle aux anciennes classifications, demande qu'on repense les rapports entre ces différents modes d'expression de l'imaginaire désormais déclinés à l'échelle de la mondialisation. L'importance prise dans sa perception par ses formes audiovisuelles, vidéoludiques, et plus largement numériques, favorisée par le développement de stratégies de synergie multimédiatique (déclinaisons du même univers sur différents supports) constitue un autre grand facteur d'évolution susceptible d'influencer les approches génériques. On peut aussi noter, à cet égard, que la recherche internationale tend à adopter une terminologie anglo-saxonne où la notion de « fantastic » recouvre ces diverses expressions de l'imaginaire plus qu'elle ne les discrimine, le « fantastique » todorovien devant dans ce contexte être chaque fois resitué en référence à la tradition critique française, ce qui contribue à relancer sans cesse les débats théoriques, au gré d'un usage éminemment variable des concepts fondamentaux.
Ce colloque se donne pour objectif d'opérer une mise au point qui soit une mise à jour ; il se propose d'amorcer une réflexion sur la théorie des genres de l'imaginaire qui tienne compte de ces nouvelles données, dans une perspective diachronique et interculturelle. Il s'agit en particulier de redonner toute sa place au merveilleux, parent pauvre de la vulgate todorovienne et de la critique moderniste, et de questionner la pertinence de l'opposition fantastique/merveilleux :
• en quoi est-elle remise en cause par les avatars de la fantasy, mais aussi par les formes contemporaines du conte ou encore par les évolutions des thèmes et figures fantastiques, qui tendent manifestement à délaisser l'effroi pour sa part désirable ?
• dans quelle mesure est-elle valide pour les arts visuels ? Comment expliquer le succès de la SF cinématographique quand son sort en tant que genre littéraire apparaît nettement moins brillant ? De quelles façons l'appétence contemporaine pour la merveille s'investit-elle dans une certaine « magie » des nouvelles technologies et des promesses du virtuel ?
• la notion d'« imaginaire », dont le maniement théorique a souvent été décrié, mais qu'on voit réapparaitre dans le vocabulaire de l'édition française en réaction à la porosité des frontières génériques, pourrait-elle fournir un équivalent au « fantastic » large des anglophones ? Quels sont les lexiques et les distinctions ayant cours dans les autres aires culturelles, et en quoi influent-ils sur les formes esthétiques privilégiées ?
Les propositions, qui privilégieront les apports théoriques mais pourront se consacrer à des études de cas, sont attendues
pour le 5 septembre 2011
. Merci de les faire parvenir aux deux organisatrices, annebesson@free.fr et evelyne.jacquelin@aon.atElles seront également observées par le comité scientifique du CERLI.