événement
Appel à communications « Le genre des signatures. Partages et passages genrés d’autorité » pour le 15/5
Université Paris-Sorbonne
Laboratoire d’excellence OBVIL (« Observatoire de la vie littéraire »)
Centre de Recherche en Littérature Comparée (EA 4510, Anne Tomiche) et Voix anglophones, Littérature et Esthétique (EA 4085, Frédéric Regard)
Appel à contribution
La signature comme marque d’auctorialité est aussi inscription d’autorité – publier sous son nom, c’est assumer la responsabilité de ce qui est publié, c’est se donner pour une « autorité » et c’est aussi se donner pour celui ou celle qui peut autoriser l’usage fait de la publication. Nombreuses ont été et sont les stratégies de brouillage et de masquage de la signature, qui produisent des effets de brouillage de la figure de l’auteur et de son autorité. Comment les questionnements sur le genre infléchissent-ils la problématique de l’auctorialité et de la signature quand celle-ci est partagée, dissimulée ou démultipliée et que ce partage ou cette dissimulation produisent des effets de passages d’un genre à l’autre, des effets d’indétermination ou de problématisation du genre ?
Qu’il s’agisse de pseudonymes, de faux noms, d’hétéronymes, ou de signatures partagées, c’est à partir de la question de la signature auctoriale, posée en termes genrés, que dans une perspective largement diachronique nous souhaitons explorer ces partages et passages d’autorité, qui sont autant de mises en question du genre sexué et du statut de l’auteur.
Directions d’étude possibles :
- Pseudonymes et hétéronymes produisant des passages de genre :
Qu’une femme ait recours à un pseudonyme masculin (les exemples sont nombreux, de George Sand ou George Eliot à Carson McCullers), plus rarement, qu’un homme ait recours à un pseudonyme féminin (Céline) ou se crée un hétéronyme féminin (Rrose Sélavy), ou qu’une femme adopte un pseudonyme produisant une indétermination de genre (Claude Cahun, Acton, Currer et Ellis Bell), la question se pose d’une part des raisons de l’adoption d’un pseudonyme ou d’un hétéronyme marqué d’une identité de « l’autre » genre ou qui brouille l’identification genrée, et d’autre part des effets qu’un tel pseudonyme ou hétéronyme produit sur la notion même d’auteur. Si la question des pseudonymes, posée en termes genrés, a déjà été abordée par Roget Bellet par exemple à propos des femmes de lettres du XIXe siècle, une enquête de plus large ampleur reste encore à faire.
- Mystifications d’auteurs ou transferts d’attribution jouant sur l’identité genrée :
Que Jeanne Flore ait pu être la création d’un groupe d’hommes, que derrière Clotilde de Surville se cache probablement un homme, que Clara Gazul soit née de l’imagination de Prosper Mérimée, ou encore que le récit de l’esclave Marie Prince (la première autobiographie d’une femme noire en langue anglaise) ait été « édité » par Susanna Strickland et Thomas Pringle, pose bien sûr la question de la supercherie sur le statut de l’auteur, mais la pose en termes genrés : quand et pourquoi des hommes créent-ils une fiction d’auteur femme (ou réciproquement) ? quels types de relations genrées entre le collectif et le singulier sont ainsi établies ? Qui plus est, procédures d’anonymat et changements d’attribution d’auctorialité n’ont pas manqué de produire des modifications dans la réception des œuvres liées au genre de l’auteur : que derrière l’anonymat des Lettres portugaises l’attribution d’auctorialité soit passée d’une religieuse « réelle » à Gabriel de Guilleragues, que l’on puisse aujourd’hui envisager que Louise Labé ait pu avoir été une « créature de papier », inventée par un groupe d’homme (voir les travaux de Mireille Huchon), pose des questions de réception de l’œuvre liées au statut de l’auteur et à son identité genrée.
- Dédoublements, multiplications ou croisements genrés de signature :
En 1966, évoquant rétrospectivement l’évolution du statut de l’artiste créateur au XXe siècle, Marcel Duchamp considérait que l’une des caractéristiques de ce siècle était que « les artistes viennent par paire : Picasso-Braque, Delaunay-Léger, bien que Picabia-Duchamp constitue un couple étrange. Une sorte de pédérastie artistique ». Non seulement le duo d’artistes, lié d’un trait d’union, produit l’effet d’un partage ou d’un dédoublement auctorial – l’artiste créateur n’est pas « un » mais « deux », mais de plus ce duo est pensé en termes homérotiques comme « une sorte de pédérastie », terme que Duchamp utilise comme un équivalent d’homosexualité, introduisant une référence à des questions de genre et de sexualité. De la signature de L.H.O.O.Q partagée par Duchamp et Picabia en une sorte de « pédérastie artistique » jusqu’aux lectures et signatures croisées de Jacques Derrida et Hélène Cixous, qui sont une réflexion sur la signature, l’amitié, la différence des sexes, réflexion entamée depuis au moins le colloque Lectures de la différence sexuelle (1990, publié en 1994) et culminant peut-être avec la publication du livre co-signé Voiles, qui tisse un texte de Cixous et un texte de Derrida qui lui répond, dans une opération de lecture inédite qui problématise également le statut d’auteur : la question est à la fois celle de la réflexion menée sur le partage genré de la signature et celle des effets produits sur la notion d’auteur par des pratiques de signatures partagées et où le partage passe par le genre.
De l’anonymat à la double signature en passant par le pseudonyme, l’hétéronyme ou le faux nom, ce sont toutes les stratégies et procédures de brouillage genré de la signature, de passages ou de partages genrés de la signature qu’il s’agira d’explorer, des débuts de l’ère moderne à nos jours au cours des deux journées d’étude prévues:
- jeudi 6 novembre 2014
- jeudi 22 janvier 2015
Merci d’adresser vos propositions avant le 15 mai 2014 à :
tomicheanne@gmail.com / flook@orange.fr
Laboratoire d’excellence OBVIL (« Observatoire de la vie littéraire »)
Centre de Recherche en Littérature Comparée (EA 4510, Anne Tomiche) et Voix anglophones, Littérature et Esthétique (EA 4085, Frédéric Regard)
Journées d’étude : 6 novembre 2014/ 22 janvier 2015
Le genre des signatures. Partages et passages genrés d’autorité
Appel à contribution
La signature comme marque d’auctorialité est aussi inscription d’autorité – publier sous son nom, c’est assumer la responsabilité de ce qui est publié, c’est se donner pour une « autorité » et c’est aussi se donner pour celui ou celle qui peut autoriser l’usage fait de la publication. Nombreuses ont été et sont les stratégies de brouillage et de masquage de la signature, qui produisent des effets de brouillage de la figure de l’auteur et de son autorité. Comment les questionnements sur le genre infléchissent-ils la problématique de l’auctorialité et de la signature quand celle-ci est partagée, dissimulée ou démultipliée et que ce partage ou cette dissimulation produisent des effets de passages d’un genre à l’autre, des effets d’indétermination ou de problématisation du genre ?
Qu’il s’agisse de pseudonymes, de faux noms, d’hétéronymes, ou de signatures partagées, c’est à partir de la question de la signature auctoriale, posée en termes genrés, que dans une perspective largement diachronique nous souhaitons explorer ces partages et passages d’autorité, qui sont autant de mises en question du genre sexué et du statut de l’auteur.
Directions d’étude possibles :
- Pseudonymes et hétéronymes produisant des passages de genre :
Qu’une femme ait recours à un pseudonyme masculin (les exemples sont nombreux, de George Sand ou George Eliot à Carson McCullers), plus rarement, qu’un homme ait recours à un pseudonyme féminin (Céline) ou se crée un hétéronyme féminin (Rrose Sélavy), ou qu’une femme adopte un pseudonyme produisant une indétermination de genre (Claude Cahun, Acton, Currer et Ellis Bell), la question se pose d’une part des raisons de l’adoption d’un pseudonyme ou d’un hétéronyme marqué d’une identité de « l’autre » genre ou qui brouille l’identification genrée, et d’autre part des effets qu’un tel pseudonyme ou hétéronyme produit sur la notion même d’auteur. Si la question des pseudonymes, posée en termes genrés, a déjà été abordée par Roget Bellet par exemple à propos des femmes de lettres du XIXe siècle, une enquête de plus large ampleur reste encore à faire.
- Mystifications d’auteurs ou transferts d’attribution jouant sur l’identité genrée :
Que Jeanne Flore ait pu être la création d’un groupe d’hommes, que derrière Clotilde de Surville se cache probablement un homme, que Clara Gazul soit née de l’imagination de Prosper Mérimée, ou encore que le récit de l’esclave Marie Prince (la première autobiographie d’une femme noire en langue anglaise) ait été « édité » par Susanna Strickland et Thomas Pringle, pose bien sûr la question de la supercherie sur le statut de l’auteur, mais la pose en termes genrés : quand et pourquoi des hommes créent-ils une fiction d’auteur femme (ou réciproquement) ? quels types de relations genrées entre le collectif et le singulier sont ainsi établies ? Qui plus est, procédures d’anonymat et changements d’attribution d’auctorialité n’ont pas manqué de produire des modifications dans la réception des œuvres liées au genre de l’auteur : que derrière l’anonymat des Lettres portugaises l’attribution d’auctorialité soit passée d’une religieuse « réelle » à Gabriel de Guilleragues, que l’on puisse aujourd’hui envisager que Louise Labé ait pu avoir été une « créature de papier », inventée par un groupe d’homme (voir les travaux de Mireille Huchon), pose des questions de réception de l’œuvre liées au statut de l’auteur et à son identité genrée.
- Dédoublements, multiplications ou croisements genrés de signature :
En 1966, évoquant rétrospectivement l’évolution du statut de l’artiste créateur au XXe siècle, Marcel Duchamp considérait que l’une des caractéristiques de ce siècle était que « les artistes viennent par paire : Picasso-Braque, Delaunay-Léger, bien que Picabia-Duchamp constitue un couple étrange. Une sorte de pédérastie artistique ». Non seulement le duo d’artistes, lié d’un trait d’union, produit l’effet d’un partage ou d’un dédoublement auctorial – l’artiste créateur n’est pas « un » mais « deux », mais de plus ce duo est pensé en termes homérotiques comme « une sorte de pédérastie », terme que Duchamp utilise comme un équivalent d’homosexualité, introduisant une référence à des questions de genre et de sexualité. De la signature de L.H.O.O.Q partagée par Duchamp et Picabia en une sorte de « pédérastie artistique » jusqu’aux lectures et signatures croisées de Jacques Derrida et Hélène Cixous, qui sont une réflexion sur la signature, l’amitié, la différence des sexes, réflexion entamée depuis au moins le colloque Lectures de la différence sexuelle (1990, publié en 1994) et culminant peut-être avec la publication du livre co-signé Voiles, qui tisse un texte de Cixous et un texte de Derrida qui lui répond, dans une opération de lecture inédite qui problématise également le statut d’auteur : la question est à la fois celle de la réflexion menée sur le partage genré de la signature et celle des effets produits sur la notion d’auteur par des pratiques de signatures partagées et où le partage passe par le genre.
De l’anonymat à la double signature en passant par le pseudonyme, l’hétéronyme ou le faux nom, ce sont toutes les stratégies et procédures de brouillage genré de la signature, de passages ou de partages genrés de la signature qu’il s’agira d’explorer, des débuts de l’ère moderne à nos jours au cours des deux journées d’étude prévues:
- jeudi 6 novembre 2014
- jeudi 22 janvier 2015
Merci d’adresser vos propositions avant le 15 mai 2014 à :
tomicheanne@gmail.com / flook@orange.fr