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Appel à communications : Colloque “Le sacré en question : sujets bibliques, sujets mythologiques sur les scènes du XVIIIe siècle”
Le sacré en question :
sujets bibliques, sujets mythologiques sur les scènes du XVIIIe siècle
colloque organisé par l'Université d'Artois (« Textes et Cultures » avec le soutien de l'IEFR), 14-15 juin 2012.
Sans prétendre donner une définition qui trancherait entre les diverses approches issues des courants sociologiques et religieux, notre propos envisage d'appréhender le sacré dans toute sa complexité en cernant les charnières, les moments où il s'écarte du contexte dogmatique et liturgique chrétien, les glissements significatifs d'un « transfert de sacralité » (1). Le siècle des Lumières apparaît comme l'un de ces points nodaux : les philosophes tirent parti de la critique biblique en plein essor au cours des siècles précédents pour désacraliser les Écritures et à l'inverse, selon l'analyse de Jean Starobinski (2), le mythe serait sacralisé.
Sur la scène française en effet, le théâtre religieux suscite, de longue date, des réactions controversées que cristallisent les débats autour du merveilleux chrétien. Si les polémiques que soulève la mise en scène contribuent au déclin de la tragédie religieuse du XVIIe siècle, suivant le constat de Kosta Loukovitch (3), les pièces à sujets bibliques ne disparaissent pas pour autant des scènes musicales et/ou théâtrales du XVIIIe siècle, comme en témoigne l'étude des répertoires. En cette période de transition, ces uvres d'inspiration biblique n'ont certes pas toutes abandonné le terrain religieux pour gagner la sphère laïque ou profane. Il serait intéressant de se demander lesquelles y sont plus ou moins parvenues et quels facteurs
- personnages ou épisodes choisis, genres ou scènes privilégiés
- ont pu favoriser une telle transformation. Quelles en sont les implications ? Quelles finalités les auteurs poursuivent-ils de la sorte ? Il est évident que les oratorios ou hiérodrames du Concert Spirituel diffèrent des pantomimes ou mélodrames joués sur les théâtres des boulevards au début du XIXe siècle. Par ailleurs, certaines scènes, dont celle de l'Académie Royale de Musique, semblent plus propices que d'autres à représenter des mythes, ce que peut notamment expliquer l'appareil scénographique, si prisé au XVIIIe siècle et en constants progrès. Un sujet vétérotestamentaire et un sujet mythologique ne seraient pas considérés comme équivalents, surtout lorsque les machines s'en mêlent. Le Samson de Voltaire demeure interdit à l'Opéra tout en étant partiellement joué, sans mise en scène, au Concert Spirituel, lors des trêves pascales.
Nous interrogerons donc plus spécifiquement les interactions entre la scène théâtrale et/ou musicale, tant du point de vue des genres que de la scénographie, et les sujets issus de la Bible et de la mythologie, du XVIIIe au début du XIXe siècle. Quelles sont les conséquences d'un traitement scénique profane sur les sujets sacrés? Parallèlement, le langage du corps, théorisé par l'abbé Du Bos, l'abbé Batteux, Condillac ou Diderot, pourrait-il de nouveau sacraliser les mythes? En d'autres termes et pour synthétiser notre principale interrogation, dans quelle mesure le langage scénique participerait-il à une métamorphose du sacré, si métamorphose il y a ?
Pistes indicatives :
1
- Les réécritures scéniques : le traitement sacré ou profane de sujets ancestraux ; la portée des choix opérés par les auteurs (reprise de figures, d'épisodes bibliques et mythologiques) ; les enjeux des diverses adaptations d'un même sujet ; les différents genres investis selon les types de sujets (en particulier les genres mineurs tels que le mélodrame, la pantomime, la féerie...).
2
- Les formes et les enjeux de la représentation : le rôle de la scénographie (notamment les diverses formes de représentation des instances divines) ; l'évolution des techniques de mise en scène et leurs conséquences dans le traitement des sujets comme dans leur réception ; la répartition des pièces bibliques et/ou mythologiques entre les scènes officielles (grands et petits théâtres) et les scènes privées (notamment théâtre de société, théâtre d'éducation, théâtre maçonnique) ; les liens qu'opèrent le public et les auteurs entre les deux types de sujets.
3
- L'histoire des idées : persistance et évolution du débat sur le « merveilleux chrétien » ; l'influence des théories esthétiques sur le langage des sens, sur l'art du tableau ; l'organisation et les réactions de la censure ; le rôle du calendrier et des rites liturgiques ; les enjeux politiques et religieux.
Toutes ces pistes seront ouvertes aux analyses comparatistes qui pourraient notamment apporter un éclairage européen à la scène française (études des répertoires germaniste ou hispaniste par exemple) ou proposer une réflexion sur les différentes formes d'expression du sacré (art pictural et art scénique, conte et théâtre, etc.).
Sur le plan matériel, « Textes et Cultures », avec le soutien de l'IEFR, prend en charge les nuitées, les repas du midi et le repas festif du premier soir. Les déplacements sont à la charge des intervenants ou de leur centre de recherche.
Merci de faire parvenir vos propositions de communication avant le 17 juin 2011 à Béatrice Ferrier (beatrice.ferrier@gmail.com).
Elles seront examinées par le comité scientifique :
Christelle Bahier-Porte (Maître de conférences, Université Jean Monnet, Saint-Etienne), Charles Coutel (Professeur des universités, Université d'Artois, directeur de l'Institut d'Etude des Faits Religieux), Isabelle de Peretti (Maître de conférences, Université d'Artois), Evelyne Jacquelin (Maître de conférences, Université d'Artois), Régine Jomand-Baudry (Professeur des universités, Université Jean Moulin, Lyon III), Claudine Nédelec (Professeur des universités, Université d'Artois).
(1) Mona Ozouf, La Fête révolutionnaire 1789-1799, Gallimard, 1976.
(2) Jean Starobinski, « Fable et mythologie aux XVIIe et XVIIIe siècles », Le Remède dans le mal, Gallimard, 1989.
(3 )Kosta Loukovitch, L'Évolution de la tragédie religieuse, Droz, 1933.