appel
« Alpha Blondy, le messager de la paix : la réappropriation africaine du reggae pour un engagement total ?» Colloque international
Date de l'échéance : 15/03/2023
Lieu de l'événement : Université Alassane Ouattara, Bouaké, Côte d'Ivoire
Nom de l'organisateur : Unité pédagogique de Littérature générale et comparée
Adresse postale : Université Alassane Ouattara, BP v 18, Bouaké 01, Côte d'Ivoire
Site web de référence : https://univ-ao.edu.ci
« Alpha Blondy, le messager de la paix : la réappropriation africaine du reggae pour un engagement total ?»
Colloque international
Organisé par l’Unité pédagogique de Littérature générale et comparée
Université Alassane Ouattara
Bouaké
15 au 18 novembre 2023
Appel à communications
Argumentaire
Le 21 septembre 2005, à l’occasion de la commémoration de la quatrième journée internationale de la paix, au Golf Hôtel d’Abidjan, l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI), dirigée par Pierre Schori, représentant spécial du secrétaire général Ban Ki Moon, nomme l’artiste ivoirien Alpha Blondy « messager de la Paix de l’ONUCI ».
Dans une Côte d’Ivoire brisée par la guerre et divisée entre le Sud contrôlé par le gouvernement et le Nord par la rébellion des Forces Nouvelles, cette distinction de l’icône nationale dont le leadership est reconnu par les différents acteurs politiques est importante. Elle est considérée par l’opinion publique comme une stratégie d’anticipation de la crise politique annoncée par la presse à l’approche de la fin officielle, le 30 octobre, du mandat du président Laurent Gbagbo. Sous cet angle, la nomination d’Alpha Blondy est loin de s’apparenter à une opération de communication éprouvée au niveau du système des Nations Unies ou des ONG internationales consistant à utiliser l’image d’une personnalité du monde sportif ou artistique en qualité d’ambassadeur de bonne volonté. Il s’agit, dans le cas du chanteur ivoirien, d’une mission de « bons offices » auprès d’un microcosme fragilisé par deux décennies de tensions politiques ayant abouti à la guerre civile et à la partition du pays.
Une telle mission est en réalité révélatrice de l’itinéraire du reggaeman dont l’œuvre démontre un attachement viscéral à la paix dans son pays natal et dans le monde ainsi qu’une dénonciation sans équivoque des inégalités sociales, conséquences de l’échec du pouvoir politique. Ainsi, dans son premier album « Jah Glory » (1982), l’artiste qui n’a jamais fait mystère de son origine plébéienne, dénonce un monde où les puissants s’épanouissent alors que les pauvres s’enfoncent dans la misère. Sur cet album, à travers la chanson « Brigadier Sabari », il fustige le banditisme, les brutalités policières et présente dans cet univers social injuste le recours à Dieu comme l’unique voie de salut.
Par ailleurs, la sortie du premier album d’Alpha Blondy coïncide avec une forte médiatisation du reggae, consécutive à la disparition de la figure mythique Bob Marley, un an plus tôt. Dans un univers artistique marqué par la volonté des autres figures de proue du mouvement rasta de s’inscrire dans les pas de Marley, l’option du malinké par le jeune artiste ivoirien détonne en ce qui concerne le choix de la langue. En effet, l’anglais est lié à l’identité du reggae en raison de la naissance de cette musique en Jamaïque, une ancienne colonie britannique. C’est la langue des pionniers du reggae tels que Bob Marley et Peter Tosh, membres du groupe « The Wailers ». Grâce à des études secondaires au Libéria et à son séjour aux États-Unis, Alpha Blondy possède une bonne connaissance de la langue de Shakespeare. Ainsi, avant la sortie de son premier album, ce passionné de reggae a déjà interprété plusieurs chansons de Bob Marley et traduit en français le titre « War » de son idole jamaïcaine.
On retrouve certes cette prégnance de l’anglais dans la présentation matérielle de sa première œuvre à travers la dénomination du groupe « Alpha Blondy and The Natty rebels » et l’intitulé de l’album « Jah Glory », mais sur les quatre titres de l’album, seule la chanson éponyme est composée en anglais. Les trois autres textes « Dounougnan », « Bintou wèrè wèrè » et « Brigadier sabari » sont chantés en malinké. Cette organisation procède d’un choix délibéré de l’artiste. L’anglais permet de préserver l’identité « originelle » du reggae et d’assurer une visibilité internationale à l’œuvre d’art dans la logique des pionniers de cette musique. Quant à l’usage d’une langue locale, en l’occurrence le malinké, il permet à l’artiste d’établir une connivence avec le public de son pays et de la sous-région ouest-africaine. Le malinké confère à sa musique des racines africaines. Cette vocation identitaire est à mettre en rapport avec le succès de la musique populaire ivoirienne interprétée dans les langues locales par des artistes « tradi-modernes » comme Amédée Pierre, Ernesto Djédjé, François Lougah, Bailly Spinto, etc. Dans le cas du « néophyte » Alpha Blondy, le choix du malinké est risqué en ce sens que le reggae est une musique étrangère uniquement chantée en anglais et de surcroît peu pratiquée aussi bien en Côte d’Ivoire qu’en Afrique francophone au début des années 1980. C’est un pari fort réussi car « Jah Glory » connaît un succès retentissant en Côte d’Ivoire et en Afrique de l’Ouest.
Plus de trois décennies après la sortie de son premier album, la musique d’Alpha Blondy (dix-huit albums) a inspiré toute une génération d’artistes reggae en Côte d’Ivoire (Ismaël Isaac, Zoanet Comes, Serges Kassi, Tiken Jah Fakoly, Fadal Day…) et donné une couleur africaine au reggae. L’artiste s’est imposé comme l’un des meilleurs du continent africain et son œuvre a fait le tour du monde avec plus de 20 millions de disques vendus. Mieux, depuis la sortie de son troisième album « Apartheid is Nazism » (1985), l’artiste ivoirien s’est imposé comme un véritable leader d’opinion. Il est aujourd’hui l’une des personnalités les plus écoutées de la société civile africaine et une « conscience critique de son temps ». Preuve de l’actualité de la prégnance sociale et politique de ses textes, en juin 2022, à l’occasion de la présentation de son 18 ème album « Eternity » sur le plateau de TV5 Monde, Alpha Blondy réaffirme la vocation universelle de sa musique. Il défend la force de l’amour, dénonce l’excision, appelle à la libération de l’Afrique en apportant son soutien à une nouvelle génération de leaders « panafricanistes ». L’artiste n’hésite pas à interpeller vertement les cinq membres du Conseil de sécurité des Nations Unies, qu’il qualifie de « pompiers pyromanes » eu égard à leur position ambivalente de garants de la sécurité mondiale et de leaders du marché de vente d’armes.
Malgré sa réputation mondiale, les textes d’Alpha Blondy ont été très peu étudiés par la critique ; d’où la nécessité d’une relecture de l’immense œuvre de l’artiste ivoirien. Tels sont les enjeux de ce colloque qui se propose de mettre au jour les principales articulations de la vie et de l’œuvre de l’un des plus grands artistes de son temps. Il s’agit, en d’autres termes, d’analyser l’influence de l’artiste et de sa production, son esthétique, sa portée sociale et politique dans son pays, en Afrique et dans le monde.
Sans être exhaustives, les propositions de communications pourront aborder les aspects suivants :
- La réappropriation africaine du reggae par l’usage d’une langue « locale » (malinké, baoulé, nouchi, etc.) ;
- L’esthétique de cette musique par l’utilisation d’instruments (cora, balafon, etc.) ;
- L’impact de sa musique sur une nouvelle génération d’artistes en Afrique (Ismaël Isaac, Tiken Jah, Black So Man, Kojo Antwi, etc.) et ailleurs dans le monde ;
- La dimension universelle de sa musique (Avec son groupe « The Solar System », l’artiste propose une musique arc-en-ciel (la musique du système solaire) destinée à l’humanité sans distinction d’ethnies, de races, ou de religion. Il chante pour ce faire en anglais, en français, en hébreux et en arabe, etc.)
- La critique des mœurs ;
- Les prises de position politique ;
- La dénonciation de la guerre ;
- La culture de la paix ;
- La centralité de Dieu ;
- Le thème de l’amour ;
- Les relations avec les médias ;
- L’évolution de l’image de l’artiste à travers une étude de ses vidéoclips ;
- La réception de son message musical dans le monde ;
- Témoignages/hommages ;
Les propositions de communication ainsi qu’une courte notice bio-bibliographique sont à envoyer avant le 15 mars 2023 aux adresses suivantes : daperpetue@yahoo.fr et ismaelcisse@yahoo.fr.
Comité organisateur
Ismaël Cissé, Perpétue Dah, Germain-Arsène Kadi
Comité scientifique
Célestin Dadié Djah (Université Alassane Ouattara)
Papa Samba Diop (Université Paris Est Créteil)
Ludovic Fié Doh (Université Alassane Ouattara)
Xavier Garnier (Université Paris III Sorbonne Nouvelle)
Mme Mariam Konaté (Western Michigan University)
Yacouba Konaté (Université Félix Houphouët-Boigny)
David N’Goran (Université Félix Houphouët-Boigny)
Azoumana Ouattara (Université Alassane Ouattara)
Daniel-Henri Pageaux (Université Paris III Sorbonne Nouvelle)
Mme Natasa Raschi (Université de Pérouse)
Mme Françoise Ugochukwu (Open University, Grande-Gretagne)
‘‘Alpha Blondy, the messenger of peace: the African reappropriation of reggae for total commitment?’’
International Conference
Organized by the Pedagogical Unit of General and Comparative Literature
Alassane Ouattara University
Bouaké
November 15-18, 2023
Call for papers
Argument
On September 21, 2005, at the commemoration of the fourth International Day of Peace, at the Golf Hotel in Abidjan, the United Nations Operation in Côte d'Ivoire (UNOCI), headed by Pierre Schori, Special Representative of U.N. Secretary General Ban Ki Moon, named the Ivorian artist Alpha Blondy "UNOCI's messenger of peace".
In a war-shattered Côte d'Ivoire divided between the South, controlled by the government and the North controlled by the Forces Nouvelles rebellion, this honour to the national icon whose leadership is recognized by the various political parties is important. It is considered by public opinion as a strategy to anticipate the political crisis announced by the press as October 30th, the date of the official end of the term of office of President Laurent Gbagbo, drew near. From this point of view, the appointment of Alpha Blondy is far from being like the often-used communication strategies of the United Nations system or international NGOs which consists in using the image of a personality from the sports or artistic world as goodwill ambassador. In the case of the Ivorian singer, it is a mission of ‘‘good offices’’ in support of a microcosm weakened by two decades of political tensions that have led to civil war and the partition of the country.
Such a mission is in fact revealing of the itinerary of the reggaeman whose work demonstrates a visceral attachment to peace in his native country and the world and an unequivocal denunciation of social inequalities which are the consequences of the failure of political power. Thus, in his first album ‘‘Jah Glory’’ (1982), the artist who has never made a mystery of his plebeian origin, denounces a world in which the powerful thrive while the poor sink deeper into misery. In this album, through the song ‘‘Brigadier Sabari’’, he castigates banditry, police brutality and presents the recourse to God as the only path to salvation in this unfair social universe.
It is noteworthy that the release of Alpha Blondy's first album coincides with strong media coverage of reggae following the death a year earlier of the legendary figure Bob Marley. In an artistic universe marked by the desire of other leading figures of the Rasta movement to follow in the footsteps of Marley, the option of the Malinké by the young Ivorian artist is out of tune with the prevailing choice of language for reggae music. Indeed, English is linked to the identity of reggae because of the birth of that music in Jamaica, a former British colony. It is the language of the pioneers of reggae such as Bob Marley and Peter Tosh, members of the group “The Wailers”. Thanks to his high school studies in Liberia and having lived in the United States, Alpha Blondy was fluent in the language of Shakespeare. Thus, before the release of his first album, this reggae lover had already interpreted several of Bob Marley’s songs and translated into French the title ‘‘War’’ of his Jamaican idol.
We obviously find this prevalence of English in the presentation of his first work through the name of the group ‘‘Alpha Blondy and The Natty Rebels’’ and the title of the album ‘‘Jah Glory’’. But out of the four titles of the album, only the eponymous song is composed in English. The three other texts ‘‘Dounougnan’’, ‘‘Bintouwèrèwèrè’’ and ‘‘Brigadier sabari’’ are sung in Malinké. That setup is the result of a deliberate choice by the artist. English makes it possible to preserve the ‘‘original’’ identity of reggae and to ensure international visibility for the work of art in the logic of the pioneers of this music. As for the use of a local language, in this case Malinké, it allows the artist to establish a connection with the public of his country and the West African sub-region. The Malinke gives his music African roots. This identity vocation is related to the success of Ivorian popular music performed in local languages by ‘‘tradi-modern’’ artists such as Amédée Pierre, Ernesto Djédjé, François Lougah, Bailly Spinto, and so on. In the case of the ‘‘neophyte’’ Alpha Blondy, the choice of Malinké is risky in the sense that reggae is a foreign music only sung in English and little practiced in Côte d'Ivoire, and in French-speaking Africa in the early 1980s. It is a very successful bet because ‘‘Jah Glory’’ is resounded success in Côte d'Ivoire and West Africa.
More than three decades after the release of his first album, the music of Alpha Blondy (eighteen albums) has inspired a whole generation of reggae artists in Côte d'Ivoire (Ismaël Isaac, Zoanet Comes, Serges Kassi, Tiken Jah Fakoly, Fadal Day…) and gave an African flavour to reggae. The artist has established himself as one of the best on the African continent and his work went around the world with more than 20 million disks sold. Better yet, since the release of his third album“Apartheid is Nazism” (1985), the Ivorian artist has established himself as a real opinion leader. Today, he is one of the most popular figures of the African civil society and a “critical conscienceness of his time”. Proof of the topicality of the social and political significance of his texts, in June 2022, on the presentation of his 18th album "Eternity" on the TV5 Monde set, Alpha Blondy reaffirms the universal vocation of his music. He defends the power of love, denounces excision, calls for the liberation of Africa by supporting a rising generation of "pan-Africanist" leaders. The artist does not hesitate to sharply challenge the five members of the United Nations Security Council, whom he describes as "arsonist firefighters" in light of their ambivalent position as guarantors of global security on one hand and on the other hand, leading sellers of arms on the global market.
Despite his worldwide reputation, Alpha Blondy's texts have been little studied by critics. Hence the need for a rereading of the great work of the Ivorian artist. These are the stakes of this symposium which aims to bring to light the main articulations of the life and work of one of the greatest artists of his time. It is, in other words, to analyze the influence of the artist and his production, his aesthetics, his social and political significance in his country, in Africa and in the world.
Without being exhaustive, proposals for papers may address the following aspects:
- The African reappropriation of reggae through the use of a “local” language
(Malinké, Baoulé, Nouchi, etc.);
- The aesthetics of this music through the use of instruments (cora, balafon, etc.);
- The impact of his music on a new generation of artists in Africa (Ismaël Isaac, Tiken
Jah, Black So Man, Kojo Antwi, etc.) and elsewhere in the world;
- The universal dimension of his music (With his group "The Solar System", the artist
offers rainbow music (the music of the solar system) intended for humanity without
distinction of ethnicity, race, or religion. He sings in English, French, Hebrew and
Arabic, etc.)
- Criticism of morals;
- Political positions;
- The denunciation of war;
- The culture of peace;
- The centrality of God;
- The theme of love;
- Relationships with the media;
- The evolution of the artist's image through a study of his (music)videos;
- The reception of his musical message in the world;
-Testimonials/tributes;
- Etc.
Abstracts and a short bio-bibliography are to be sent by e-mail before March 15, 2023 to the following addresses: daperpetue@yahoo.fr and ismaelcisse@yahoo.fr.
Organizing Committee
Ismaël Cissé, Perpétue Dah, Germain-Arsène Kadi
Scientific Committee
Mr. Célestin Dadié Djah (Université Alassane Ouattara)
Mr. Papa Samba Diop (Université Paris Est Créteil)
Mr. Ludovic Fié Doh (Université Alassane Ouattara)
Mr. Xavier Garnier (Université Paris III Sorbonne Nouvelle)
Ms. Mariam Konaté (Western Michigan University)
- Yacouba Konaté (Université Félix Houphouët-Boigny)
Mr. David N’Goran (Université Félix Houphouët-Boigny)
Mr. Azoumana Ouattara (Université Alassane Ouattara)
Mr. Daniel-Henri Pageaux (Université Paris III Sorbonne Nouvelle)
Ms. Natasa Raschi (University of Perugia)
Ms. Françoise Ugochukwu (Open University, United Kingdom)