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AàC : Les compositeurs-critiques au XXe siècle
Journée d’études

LES COMPOSITEURS-CRITIQUES AU XXe SIECLE

Université Paris Ouest Nanterre
Jeudi 5 février 2015

Coordination :
Emmanuel Reibel (Paris Ouest Nanterre) et Timothée Picard (Rennes II, CELLAM/IUF)


Dans la continuité d’illustres prédécesseurs qui contribuèrent, au cœur du XIXe siècle, à donner à la critique ses lettres de noblesse – Berlioz, Schumann, Liszt, Wagner –, bien des compositeurs approchèrent au XXe siècle l’activité critique, dans le sillage de Debussy ou de Schoenberg. Quelle que soit leur motivation – d’ordre financier, polémique, esthétique ou médiatique –, quelle que soit la nature, l’abondance ou le support de publication de leurs textes, ces derniers jouirent et jouissent encore d’une incontestable autorité. Cette autorité fut même un argument mis en avant par les journaux, le cas échéant, pour s’attirer un lectorat aussi nombreux que distingué.
Seulement voilà : au procès de compétence, qui fut souvent attenté aux critiques musicaux (au point d’être devenu un stéréotype du discours métacritique depuis le XIXe siècle), se substitua, en l’occurrence, un procès en légitimité. De violents débats surgirent, à l’instar de celui qui opposa Boris de Schloezer et Charles Koechlin dans la Revue musicale en 1927. Dans son Traité de la critique musicale, Armand Machabey enfonça le clou deux décennies plus tard : « Le compositeur de vocation, écrit-il, doit rester compositeur : il ne peut être, en raison même de sa personnalité, bon critique. Nous avons vu que la critique doit tendre vers l’impersonnalité, faire abstraction des sentiments immédiats, se garder de tout préjugé. Or, un compositeur professionnel est le contraire de ce critique : il s’est construit une esthétique qui résulte de sa formation en même que de son tempérament propre, et il lui est impossible de percevoir le monde musical autrement qu’à travers ce prisme individuel […] ». Même Debussy n’est point épargné : « Rien de bon n’est sorti des annotations de M. Croche, écrit Machabey, et rien n’en pouvait sortir pour les motifs que nous avons indiqués et qui se vérifient dans les écrits de tous les compositeurs-critiques, anciens ou actuels. »
Inscrits dans un débat polémique très caractéristique de son temps, ces propos interrogent la position particulière du compositeur, juge et partie, lorsque ce dernier s’empare de la fonction critique. Mais si les fondements du procès en légitimité peuvent être largement discutés, d’autres questions, qui lui sont intimement liées, se posent toujours : les compositeurs sont-ils les meilleurs critiques musicaux, en raison de leur compétence technique et de leur connaissance interne du métier ? Quelle est la nature du discours qu’ils livrent en tant que critiques ? Ont-ils une plume nécessairement moins affûtée que les « littérateurs » ?
Certaines de ces questions ont commencé à être abordées, notamment dans le cadre du Réseau international d’étude sur les écrits de compositeurs dirigé par Michel Duchesneau , mais surtout à travers des travaux monographiques très stimulants, à la faveur d’entreprises importantes de publications systématiques (Koechlin, Poulenc, Stravinsky, Schoenberg, etc.), dont certaines sont en cours (Reynaldo Hahn), tandis que d’autres resteraient à envisager (Florent Schmitt par exemple). Sans proscrire les approches monographiques, cette journée d’étude aimerait encourager les approches transversales afin de circonscrire, très largement, les (éventuelles) spécificités du critique compositeur, comparativement à d’autres types de critiques musicaux qui ont prospéré tout au long du XXe siècle. On s’interrogera notamment sur le type de lecture spécifique, et sur la méthode d’approche particulière qu’implique, aujourd’hui, les textes rédigés par des compositeurs-critiques.
Les communications pourront porter notamment sur la place, le rôle et la valeur de l’analyse musicale au sein des critiques de compositeurs ; sur la valeur spécifique des jugements portés par un compositeur dans le cadre de son activité critique et sur leurs critères propres ; sur l’intrication entre activité critique et carrière musicale ; sur les relations entre écriture critique et pratique musicale. Elles pourront également mettre en lumière les différences des conditions dans lesquelles s’exerce l’activité de compositeur-critique entre Europe et Amérique, ainsi que les évolutions des pratiques, tout au long du XXe siècle : la figure du compositeur-critique a-t-elle aujourd’hui vécu ?

Les propositions de communication (une page maximum), accompagnées d’une biobibliographie rédigée, devront être envoyées

avant le 1er septembre 2014

simultanément à Emmanuel Reibel (emmanuel.reibel@gmail.com) et à Timothée Picard (timothée.picard@gmail.com).
Ce projet s’inscrit dans le cadre d’un programme concernant « La critique musicale au XXe siècle » (Institut universitaire de France). On trouvera un descriptif des journées passées ou à venir sur le site du CELLAM (www.cellam.fr). Les communications feront l’objet d’une publication en fin de programme.