événement
9e Congrès de la SELC. Atelier COMMUNAUTÉS DE POÈTES / POETS’ COMMUNITIES
Date de l'événement : 05/09/2022
Date de fin de l'événement : 09/09/2022
Site web de référence : https://www.esclselc2021-sapienza-uniroma1.org
9e Congrès de la SELC
COMMUNAUTÉS DE POÈTES / POETS’ COMMUNITIES
Panel convener : Francesca Manzari — francesca.manzari@univ-amu.fr, Aix-Marseille Université
Jean-Charles Perquin - The Victorian Monologue as Inclusive Reading
Marie Lucie Lopez - Imaginer des communautés inclusives dans la culture européenne
Joanny Moulin - English Romantic Radicals in Italy
Francesca Manzari - Poètes américains à Londres
Ces quatre communications ont pour thématique commune des confréries de poètes anglophones qui, pour s’être inscrites ensemble en faux par rapport à leurs communautés nationales, ont constitué des embryons, de récits innovants qui allaient bientôt agréger des communautés de pensée. Il s’agit, dans l’ordre chronologique, des romantiques anglais volontairement exilés en Italie, du couple formé par Robert et Elizabeth Browning en Italie, des poètes du Crépuscule celtique qui forgèrent le nationalisme culturel irlandais, et des Modernistes américains à Londres dans les premières décennies du vingtième siècle. De diverses manières, leur génie les mit d’abord au ban des récits dominants dans leurs cultures d’origine. Car les grandes communautés se forment aussi parfois par l’exclusion des dissidents. Mais ils soufflaient sur les braises naissantes de ce que Pound, avec Frobenius, appelait la paideumia, les racines agissantes des idées naissantes. Leurs œuvres, rendues possibles par l’amitié ou l’amour qui les unissaient, peuvent aussi être lues comme ayant été produite par l’être ensemble de leurs relations communautaires. Que serait The Wasteland sans l’intervention de Pound ? Robert Browning sans Elizabeth Barrett et vice versa ? Sans Lady Gregory et les écrivains du Théâtre de l’Abbaye, Yeats n’eût-il pas prêché dans un désert ? Ces petits groupes sont les creusets où se coulent, les berceaux où s’élèvent des paroles, des récits au sens où Lyotard entendait ce mot, qui impriment leur marque aux communautés avenir. Ainsi Joyce entendait « forger dans la fonderie de son âme la conscience incréée de sa race », ainsi Shelley déclarait que les poètes sont « les miroirs des ombres gigantesques que la futurité étend sur le présent, les mots qui expriment ce qu’ils n’entendent pas, les trompettes qui sonnent la bataille et ne sentent pas ce qu’elles inspirent, l’influence immobile qui émeut ».
Jean-Charles Perquin - The Victorian Monologue as Inclusive Reading
The concept of inclusiveness is highly illustrated in the Victorian monologue, at least contrariwise, especially in the poetical works of Robert Browning in which the tension at work in the poems leads the readers to deconstruct the speech of the speaker in his back, and to take sides with the silent dominated addressee in the monologues. In other words, in the context of every dramatic monologue, the only speaker in the monologue (hence the qualification of “monologue”) has to speak in a situation of emergency in order to convince or seduce a seemingly passive audience (without the silent suggested presence of the addressee, the monologue would be a soliloquy). But this “audience in the poem” to quote the title of a seminal book by Dorothy Mermin, is only superficially dominated by the discourse of the unique speaker, and this apparent domination is only indicated by the addressee’s silence. Indeed, as was formulated by Peter Langbaum in The Poetry of Experience, the scandalous discourse of the reprehensible speaker is an ironical invitation for the reader to deconstruct his speech in his back and feel closer to the excluded audience in the poem, whose only presence in the dramatic monologue was a verbal justification and reason to be for the domineering speaker. As a consequence, the purpose of this new form of poetry in the Victorian age was a way of throwing indirect light on unspoken speech and silent voices, and implicitly questioning and deconstructing dominant discourses. It is certainly all the more fascinating with Robert Browning’s works as the social and cultural contexts of those monologues were often Italian art and politics of the Renaissance. With the background of Giorgio Vasari’s Lives of the Painters, the Victorian poet invited his readers to reread the lives of the great Renaissance artists in the light of the oblique staging of the Victorian monologue.
Jean-Charles Perquin —jean-charles.perquin@univ-lyon2.fr, Université Lumière-Lyon 2 — Senior lecturer and research supervisor at Université Lumière-Lyon in English literature, literary theory and history, has published extensively in the field of Victorian poetry. He is the author of on-coming biographies of Robert and Elizabeth Barrett Browning. His most recent publication is an annotated French translation of Aurora Leigh (Classiques Garnier 2020).
Marie Lucie Lopez - Poètes irlandais
Se dit inclusif un groupe ou une personne qui n’exclut personne et qui vise à réunir toutes les sensibilités, à inclure chacun dans un tout. De cette façon, l’Irlande est reconnue davantage comme une civilisation exclusive, qui reconnait l’importance de tout ce qui constitue sa nation depuis les mœurs de la capitale jusqu’au celtisme des campagnes. Depuis des décennies, et surtout depuis l’an 1800, c’est une nation dont les identités socio-politique et culturelle ont été bafouées par l’empire britannique. Une langue disparaît, un patrimoine disparaît, tout ce qui définit un pays se met à disparaitre sous la domination de l’ennemi. De nombreux pays ont sombré sous le pouvoir de la colonisation mais l’Irlande ne fait pas partie de ces naufragés. Cela est rendu possible sur le plan politique grâce à une profonde ferveur patriotique menée par les irlandais contre la couronne et aussi sur un plan culturel grâce à la puissance volonté d’un poète et dramaturge nationaliste : William Butler Yeats. Accompagné de ses plus fidèles compagnons (Lady Augusta Gregory, John Millington Synge et bien d’autres) il érige un théâtre nationale et poursuit sa fabrication d’identification culturelle grâce à la l’écriture poétique. La littérature permet de recréer une unité ethnique (ou comme le poète l’appelle, une Unity of Culture) qui sont la définition même de symboles nationaux. Cette flamme communautaire est alimentée par des mythes religieux, des légendes insulaires, des contes pastoraux, d’une géopoétique locale mais aussi d’une grande influence qui va au-delà des frontières pour bâtir une inclusion interculturelle. William Butler Yeats étudie les valeurs fondatrices de l’empire Byzantin, de la philosophie hindouiste ou encore de l’aristocratie japonaise pour offrir redonner le pouvoir à son patrimoine. Cette alliance intergénérationnelle, interculturelle et interlinguale permet la survivance d’une communauté nationale en perdition et contribue à faire perdurer des alliances culturelles.
Marie Lucie Lopez —marie.lopez.4@etu.univ-amu.fr, Aix-Marseille Université — traductrice littéraire, doctorante à l’Institut de l’Histoire de la Philosophie (IHP) à l’université d’Aix-Marseille sous la direction du Pr Joanny Moulin, rédige une thèse intitulée « Poésie et philosophie: Réflexion méta-épistémique sur les œuvres de William Butler Yeats, Thomas Stearne Eliot et Yves Bonnefoy ». Elle a publié deux articles pour la Biography Society, sur William Butler Yeats et Yves Bonnefoy.
Joanny Moulin - English Romantic Radicals in Italy
In the decade that followed Waterloo, around 1820, there was in Italy a loose but strong community of British writers, the spearhead of the Romantic Left in voluntary exile. They formed a group of like-minded young geniuses, of whom the most popular figurehead was certainly Byron, whom the Shelleys had followed in Switzerland, where Mary first wrote Frankenstein, then in Venice, and later in Pisa and Genova were Byron joined the Carbonari Gambas. Keats was on his way to join them when he died of tuberculosis in Rome. Hunt joined them to found The Liberal, a newspaper intended to be an ideological transmission belt conveying their ideas to the wider public. But Shelley drowned in the bay of Spezia. Byron engaged himself with Mavrokordatos in the Greek war of Independence and died in Missolonghi. It was a very loose community on the factual plane, but it was a very strong one, albeit in embryo, as a community of ideas. This small band of Romantics in rebellion against the reactionary political order of which Britain was the epitome in Europe after the Congress of Vienna, were the exalted guardians of the great narrative of the Revolution, of which other would write the following chapters in the course of the nineteenth and twentieth centuries. They revisited the paradigm of the correspondence societies and the groups of radical set up one generation earlier by Mary Wollstonecraft and the team of writers around publisher Joseph Johnson in London, that continued the ideal of the Republic of Letters. Each in their own style, Mary Shelley with her Promethean revision of the Gothic tale, Percy Shelley with his psychomachiae, Byron with his narrative poems from The Giaour to the unfinished cantos of Don Juan, Hunt with his journalism: they exemplify the militant formation of ideological communities operating as narratives in the superstructure, inclusive in the sense that they federate the aspirations of the masses to retroact on political history at the next occasion.
Joanny Moulin — joanny.moulin@univ-amu.fr, Aix-Marseille Université —Senior Member of the Institut Universitaire de France, Professor of Philosophy at Aix-Marseille University, President of the Biography Society, is currently involved in a research project entitled “Biography—Critique of a Literary Genre.” His most recent publication is On Biography, Critical Essays (Honoré Champion 2021).
Francesca Manzari - Poètes américains à Londres
En 1914, deux mois après son arrivée à Londres à la recherche d’un lieu où devenir le poète qu’il désirait être et s’y installer, sur le conseil de son fidèle ami Conrad Aiken, T. S. Eliot rend visite à Ezra Pound et à son épouse. Pound vivait à Londres depuis plus de cinq ans et y avait déjà publié cinq volumes de poésie. Eliot dira de cette rencontre que les manières intimidantes de Pound lui rappelaient celles de Irving Babbitt. À son tour, Pound se moquera de l’américanité d’Eliot : « He has it perhaps worse than I have[1] ». Ce sont les premiers moments d’une longue histoire d’amitié entre deux poètes qui deviendront les plus illustres du modernismes américains et européens. Cette amitié, qui crée d’emblée une communauté, naît d’un objectif poétique partagé : « They were both seeking traditional cultural authority, and a sense of their own worth, in Europe[2] ». Après avoir lu Prufrock, Portrait et d’autres poèmes, Pound écrit à son amie Harriet Monroe, poétesse et éditrice de la revue Poetry de Chicago : « [Eliot] has sent in the best poem I have yet had or seen from an American… He has actually trained himself and modernized himself on his own[3] ». Entraînement à la poésie et modernisation de l’expression poétique sont à l’époque l’obsession de Pound qui travaille de façon acharnée à la traduction et à l’édition des troubadours et de Guido Cavalcanti. Pound initie immédiatement Eliot à la fréquentation du répertoire poétique médiéval européen. D’une communauté de lectures et du partage des valeurs poétiques de cette tradition, les deux amis font naître une communauté de poètes avec William Carlos Williams, nonobstant les positions opposées en termes de poétique entre Eliot et Williams, Hilda Doolittle et John Gould Fletcher. Cette amitié comme communauté de poètes américains à Londres au début du XXe siècle fera l’objet de notre communication.
Francesca Manzari — francesca.manzari@univ-amu.fr, Aix-Marseille Université — comparatiste, spécialiste de poésie médiévale et contemporaine, notamment dans les domaines italien, français et américain, s'intéresse plus particulièrement aux relations entre littérature et philosophie, telles qu'elles se sont nouées en Toscane au XIIIe siècle, et renouées dans la poésie moderniste du XXe siècle. Auteure d'une thèse qui porte sur l'ensemble de l'œuvre de Derrida, elle mène son travail d'enseignement et de recherche dans l'héritage de la French Theory et de la psychanalyse. Elle dirige à l'université d'Aix-Marseille le master de traduction littéraire et codirige le master de Littérature et Psychanalyse (parcours LIPS du master Lettres).
[1] Peter Ackroyd, T. S. Eliot a Life, New York, Simon and Schuster, 1984, p. 56.
[2] Ibidem.
[3] Ibidem.
Source de l'information : Francesca Manzari