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ARTICLE
Cet article voudrait présenter de manière synthétique, à l’usage des comparatistes français, des éléments développés par ailleurs, et notamment à l’occasion d’un projet coordonné dans le cadre de l’Institut Universitaire de France ayant fait l’objet de plusieurs publications. On voudrait ainsi montrer comment l’approche transatlantique du XXe siècle éclaire un aspect majeur des relations littéraires internationales.
Lorsqu’en 2012, Terry Eagleton définissait notre époque comme celle de l’après-théorie, il observait que les préoccupations théoriques des années 1970 et 1980, la sémiotique, le post-structuralisme, le marxisme, la psychanalyse et leurs homologues, ont été reléguées au second plan par un quatuor de préoccupations : « le postcolonialisme, l’ethnicité, la sexualité et les études culturelles » [post-colonialism, ethnicity, sexuality and cultural studies [1] ]. Ces domaines ne sont certes pas dénués de théorie, mais ils ont émergé dans le sillage de la « haute » ou de la « pure » théorie qu’ils ont laissée derrière eux. Cette transformation marque un passage :
A shift from discourse to culture – from ideas in a somewhat abstract or virginal state, to an investigation of what in the 1970s and ‘80s one would have been rash to call the real world.
Un passage depuis l’ordre du discours vers celui de la culture – depuis les idées dans un état que l’on dirait abstrait, ou virginal, vers la recherche de ce que, dans les années 1970 et 1980, on aurait à peine osé appeler le monde réel.
La perspective littéraire sur l’Atlantique participe de ce « retour au réel », en l’occurrence à des cultures et des littératures marquées par le colonialisme, liées à l’ethnicité et au genre. Pour le XXe siècle, il nous manque une étude littéraire générale examinant la genèse des œuvres, la trajectoire des auteurs ainsi que les circulations et jeux d’influence entre Atlantique nord et sud, blanc, noir et indien, dans les principaux domaines concernés : les lettres anglophones, francophones, hispanophones, lusophones et néerlandophones, sans omettre les éléments créolophones des Caraïbes. Mais il convient d’abord d’expliquer pourquoi et comment, à l’issue de recherches constatant les problèmes de l’historiographie « francophone », on peut en arriver à envisager cette perspective océanique.
Notes
- [1]
Terry Eagleton, The Event of Literature, Yale U.P., 2012, p. ix.