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Colloque Pier Paolo Pasolini Mémoire(s) et résonance Université de Strasbourg 21-22 mars 2023
Date de l'échéance : 21/03/2023
Lieu de l'événement : Université de Strasbourg
Nom de l'organisateur : Francesco D’Antonio, Anna Frabetti, Ariane Loraschi, Raphaël Szöllösy & Patrick Werly
Email de l'organisateur : colloquepasolini23@gmail.com
Site web de référence : https://ea1337.unistra.fr/leurope-des-lettres/
Pier Paolo Pasolini
Mémoire(s) et résonances
21-22 mars
Université de Strasbourg
Io sono una forza del Passato.
Solo nella tradizione è il mio amore.
Vengo dai ruderi, dalle chiese,
dalle pale d’altare, dai borghi
abbandonati sugli Appennini o le Prealpi,
dove sono vissuti i fratelli.
Pier Paolo PASOLINI, Poesia in forma di rosa, 1964.
Le 5 mars 2022, Pasolini aurait eu cent ans. Dans la Péninsule comme dans l’Hexagone, hommages, sorties en salles de films restaurés ou autres ouvrages mettent à l’honneur celui que la société italienne tenta pourtant de mettre à l’index, à l’image de la censure à laquelle il fut en proie et de ses incessants contacts avec l’autorité judiciaire. Modélisée par la trace qui s’inscrit dans le temps et s’archive, la mémoire de l’œuvre de Pasolini semble aujourd’hui entretenue, organisée, suscitée. En est-elle pour autant restituée ? Si les rétrospectives fleurissent, la parole de Pasolini paraît, elle, discrètement mise au ban : les volumes italiens reprenant les écrits de Pasolini sur la politique, la société, l’art et la littérature[1] sont quasi introuvables et, étonnamment, n’ont fait l’objet d’aucune réédition en prévision de la date anniversaire pourtant si célébrée. Certaines facettes de Pasolini tendraient donc à être oubliées, voire enterrées, questionnant ainsi la notion éthique de choix, qu’il s’agisse de l’actualisation de l’archive, ou du sens de la restauration de la trace. Peut-on voir dans cette mémoire choisie et tronquée le signe d’une volonté idéologique ou politique ? D’après Luca Ronconi : « Pier Paolo Pasolini a eu un regard d’anticipation, prémonitoire sur plusieurs événements de la société italienne. Tant que ce regard pasolinien recouvre des manières d’être, qu’il correspond à des évolutions, il est fort probable que l’œuvre de Pasolini demeure actuelle[2] ». Cette vision prophétique n’est par ailleurs pas propre à l’Italie : en interrogeant le passé, et avec lui, la tradition, Pasolini n’a cessé de confronter les sociétés occidentales à la Modernité. Dans cette perspective, comment analyser aujourd’hui la façon dont est réceptionné ce « regard d’anticipation », paradoxalement tourné vers le passé ?
Constitutive de l’œuvre polymorphe de Pasolini, la tradition n’a en effet cessé d’être questionnée par le poète à travers un élément corrélatif de la mémoire, la source, déclinée tantôt autour de l’écriture romanesque, de la poésie, de la peinture, du théâtre et du cinéma. Qu’il s’agisse de les articuler autour du mythe, reflet chez Pasolini de la sacralité d’un monde anhistorique dont la réalité est en soi hiérophanique, ou autour des écritures saintes, miroir d’une Église encore archaïque et par le fait non dénaturée, ces mémoires ont en commun de s’inscrire à rebours d’une modernité en perte d’identité et de spiritualité.
Cette opposition à la rationalisation du monde apparaît dans les influences qui ont nourri Pasolini, à l’instar de la pensée russe ou de Giovanni Pascoli, à qui Pasolini a consacré « une sorte d’anthologie commentée » dans le cadre de son diplôme universitaire[3]. L’auteur de L’Èra Nuova y dénonçait en effet les limites d’une réalité ramenée à une simple classification scientifique, un demi-siècle avant que Pasolini ne déplore une bourgeoisie ayant perdu le sens du sacré. Cette même bourgeoisie que Nicolas Berdiaeff définissait non pas sous l’angle d’une vision paradigmatique de classe par opposition au prolétariat comme c’est le cas chez Marx, mais à l’aune précisément de son rapport quasi inexistant à la spiritualité et de son ancrage dans la matérialité.
C’est en revanche en dialogue avec Gramsci que se reflétera, dans une perspective politique, le rapport de Pasolini à la mémoire, ici collective. Indispensable à organiser la tradition, à restituer l’histoire du peuple, à en affirmer l’identité , et à lutter contre l’uniformisation de la culture par le pouvoir et l’idéologie dominants, sa réactivation apparaît comme un rempart à l’hégémonie.
En célébrant la mémoire telle que Pasolini l’a articulée, mais aussi celle dont il fait l’objet, tout l’enjeu de ce colloque sera en définitive de faire résonner la parole de l’intellectuel italien dans notre siècle, et au-delà, d’interroger notre capacité à percevoir encore ses échos : écouter, regarder, comprendre celui qui aimait parler en paraboles.
Les méthodes d’appréhension seront aussi multiples que les objets étudiés. De l’analyse littéraire à celle des images en mouvement, des phénomènes consignés par ses poèmes aux forces iconologiques qui traversent ses images et celles qui les nourrissent, il conviendra d’associer nombre de disciplines et de capacités de réflexion afin d’esquisser ce que la notion de mémoire permet de dire de l’immense travail pasolinien.
Les propositions de communication, de 3000 signes espaces compris, accompagnées d’une courte bio-bibliographie, sont à envoyer d’ici le 18 décembre 2022 en format PDF à l’adresse suivante : colloquepasolini23@gmail.com. Les retours seront transmis par le comité en date du 20 janvier 2023.
Comité d’organisation - Université de Strasbourg
Francesco D’Antonio (CHER),
Anna Frabetti (CHER),
Ariane Loraschi (Configurations Littéraires),
Raphaël Szöllösy (ACCRA),
Patrick Werly (Configurations littéraires).
[1] Pier Paolo Pasolini, Saggi sulla letteratura e sull’arte, Milano, Mondatori,I Meridiani, 2004 ; Saggi sulla politica e sulla società, Milano, Mondatori, VII edizione I Meridiani, 2016.
[2] Luca Ronconi in Stefano Casi, I teatri di Pasolini, Bologne, Cue press, 2019, p.13.
[3] Marco Antonio Bazzocchi et Roberto Chiesi, Pier Paolo Pasolini. Folgorazioni figurative, Edizioni Cineteca di Bologna, 2022, p. 5.
Mémoire(s) et résonances
21-22 mars
Université de Strasbourg
Io sono una forza del Passato.
Solo nella tradizione è il mio amore.
Vengo dai ruderi, dalle chiese,
dalle pale d’altare, dai borghi
abbandonati sugli Appennini o le Prealpi,
dove sono vissuti i fratelli.
Pier Paolo PASOLINI, Poesia in forma di rosa, 1964.
Le 5 mars 2022, Pasolini aurait eu cent ans. Dans la Péninsule comme dans l’Hexagone, hommages, sorties en salles de films restaurés ou autres ouvrages mettent à l’honneur celui que la société italienne tenta pourtant de mettre à l’index, à l’image de la censure à laquelle il fut en proie et de ses incessants contacts avec l’autorité judiciaire. Modélisée par la trace qui s’inscrit dans le temps et s’archive, la mémoire de l’œuvre de Pasolini semble aujourd’hui entretenue, organisée, suscitée. En est-elle pour autant restituée ? Si les rétrospectives fleurissent, la parole de Pasolini paraît, elle, discrètement mise au ban : les volumes italiens reprenant les écrits de Pasolini sur la politique, la société, l’art et la littérature[1] sont quasi introuvables et, étonnamment, n’ont fait l’objet d’aucune réédition en prévision de la date anniversaire pourtant si célébrée. Certaines facettes de Pasolini tendraient donc à être oubliées, voire enterrées, questionnant ainsi la notion éthique de choix, qu’il s’agisse de l’actualisation de l’archive, ou du sens de la restauration de la trace. Peut-on voir dans cette mémoire choisie et tronquée le signe d’une volonté idéologique ou politique ? D’après Luca Ronconi : « Pier Paolo Pasolini a eu un regard d’anticipation, prémonitoire sur plusieurs événements de la société italienne. Tant que ce regard pasolinien recouvre des manières d’être, qu’il correspond à des évolutions, il est fort probable que l’œuvre de Pasolini demeure actuelle[2] ». Cette vision prophétique n’est par ailleurs pas propre à l’Italie : en interrogeant le passé, et avec lui, la tradition, Pasolini n’a cessé de confronter les sociétés occidentales à la Modernité. Dans cette perspective, comment analyser aujourd’hui la façon dont est réceptionné ce « regard d’anticipation », paradoxalement tourné vers le passé ?
Constitutive de l’œuvre polymorphe de Pasolini, la tradition n’a en effet cessé d’être questionnée par le poète à travers un élément corrélatif de la mémoire, la source, déclinée tantôt autour de l’écriture romanesque, de la poésie, de la peinture, du théâtre et du cinéma. Qu’il s’agisse de les articuler autour du mythe, reflet chez Pasolini de la sacralité d’un monde anhistorique dont la réalité est en soi hiérophanique, ou autour des écritures saintes, miroir d’une Église encore archaïque et par le fait non dénaturée, ces mémoires ont en commun de s’inscrire à rebours d’une modernité en perte d’identité et de spiritualité.
Cette opposition à la rationalisation du monde apparaît dans les influences qui ont nourri Pasolini, à l’instar de la pensée russe ou de Giovanni Pascoli, à qui Pasolini a consacré « une sorte d’anthologie commentée » dans le cadre de son diplôme universitaire[3]. L’auteur de L’Èra Nuova y dénonçait en effet les limites d’une réalité ramenée à une simple classification scientifique, un demi-siècle avant que Pasolini ne déplore une bourgeoisie ayant perdu le sens du sacré. Cette même bourgeoisie que Nicolas Berdiaeff définissait non pas sous l’angle d’une vision paradigmatique de classe par opposition au prolétariat comme c’est le cas chez Marx, mais à l’aune précisément de son rapport quasi inexistant à la spiritualité et de son ancrage dans la matérialité.
C’est en revanche en dialogue avec Gramsci que se reflétera, dans une perspective politique, le rapport de Pasolini à la mémoire, ici collective. Indispensable à organiser la tradition, à restituer l’histoire du peuple, à en affirmer l’identité , et à lutter contre l’uniformisation de la culture par le pouvoir et l’idéologie dominants, sa réactivation apparaît comme un rempart à l’hégémonie.
En célébrant la mémoire telle que Pasolini l’a articulée, mais aussi celle dont il fait l’objet, tout l’enjeu de ce colloque sera en définitive de faire résonner la parole de l’intellectuel italien dans notre siècle, et au-delà, d’interroger notre capacité à percevoir encore ses échos : écouter, regarder, comprendre celui qui aimait parler en paraboles.
Les méthodes d’appréhension seront aussi multiples que les objets étudiés. De l’analyse littéraire à celle des images en mouvement, des phénomènes consignés par ses poèmes aux forces iconologiques qui traversent ses images et celles qui les nourrissent, il conviendra d’associer nombre de disciplines et de capacités de réflexion afin d’esquisser ce que la notion de mémoire permet de dire de l’immense travail pasolinien.
Les propositions de communication, de 3000 signes espaces compris, accompagnées d’une courte bio-bibliographie, sont à envoyer d’ici le 18 décembre 2022 en format PDF à l’adresse suivante : colloquepasolini23@gmail.com. Les retours seront transmis par le comité en date du 20 janvier 2023.
Comité d’organisation - Université de Strasbourg
Francesco D’Antonio (CHER),
Anna Frabetti (CHER),
Ariane Loraschi (Configurations Littéraires),
Raphaël Szöllösy (ACCRA),
Patrick Werly (Configurations littéraires).
[1] Pier Paolo Pasolini, Saggi sulla letteratura e sull’arte, Milano, Mondatori,I Meridiani, 2004 ; Saggi sulla politica e sulla società, Milano, Mondatori, VII edizione I Meridiani, 2016.
[2] Luca Ronconi in Stefano Casi, I teatri di Pasolini, Bologne, Cue press, 2019, p.13.
[3] Marco Antonio Bazzocchi et Roberto Chiesi, Pier Paolo Pasolini. Folgorazioni figurative, Edizioni Cineteca di Bologna, 2022, p. 5.
Source de l'information : Patrick Werly