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XXXIXe Congrès de la SFLGC, Strasbourg : 13-15 / 11 / 2014
XXXIXe Congrès de la SFLGC à l’Université de Strasbourg, Institut de littérature comparée, 13-15 novembre 2014
Littérature et expériences croisées de la guerre
Apports comparatistes
Organisateurs du Congrès : L’Institut de littérature comparée de l’université de Strasbourg et son groupe de recherche L’Europe des lettres ; l’Équipe d’accueil Configurations littéraires (EA 1337)
Comité scientifique: Profs Michèle Finck, Pascal Dethurens, et Guy Ducrey (Directeur en exercice de l’Institut de littérature comparée de Strasbourg); Mmes Tatiana Victoroff et Enrica Zanin, MM. Yves-Michel Ergal et Patrick Werly (Maîtres de conférences à l’université de Strasbourg) ; Prof. Anne-Rachel Hermetet (Université d’Angers) ; le ou la Président(e) de la SFLGC.
Problématique
Au moment où plusieurs disciplines réfléchissent, en 2014, à l’occasion du centenaire de la Première Guerre mondiale, au sens et à la portée de cet événement pour les sciences humaines, l’Institut de littérature comparée de l’Université de Strasbourg et son groupe de recherche L’Europe des lettres invitent les membres de la SFLGC à définir la contribution de leur discipline à une approche des représentations littéraires de la guerre, des réflexions et des décisions auxquelles elle oblige. Nullement limitée au XXe siècle (même si plusieurs ateliers lui seront consacrés), la problématique proposée sera celle des points de vue croisés d’écrivains de cultures diverses sur le conflit. Il s’agira de considérer et de comparer l’expérience que chacun des camps peut avoir d’un même conflit.
En plaçant la question de la perspective au cœur de leurs travaux, les historiens J. Keegan, puis V. D. Hanson (Le Modèle occidental de la guerre. La bataille d'infanterie dans la Grèce classique, trad. fr. 1990) ont profondément renouvelé l’historiographie de la guerre depuis une vingtaine d’années. Dans son ouvrage de référence, Poétique du récit de guerre (Corti, 1998), Jean Kaempfer a procédé de façon similaire et montré les variations de perspective que connaît l’écriture littéraire de la guerre au fil de l’histoire.
Parce qu’elle a fait des perspectives contrastées l’un de ses objets privilégiés, la littérature comparée offre un apport irremplaçable pour interroger les images et la poétique de la guerre. Regards différents portés sur la même situation historique selon que l’écrivain appartient à un camp ou un autre ; croisement ou non de ces regards au moment même de la guerre; effets de focalisation, regards engagés ou regards distancés (sans oublier le regard de Dieu, souvent invoqué) ; aperçus à ras de terre du soldat ou perspective aérienne de l’aviateur ; lyrisme ou anti-lyrisme de la poésie de guerre ; devenir des traductions en temps de guerre (que deviennent les textes écrits dans la langue de l’ennemi ?) – autant d’axes pour aborder les modes littéraires du conflit armé. Le théâtre peut proposer ici un terrain de choix : n’offre-t-il pas, au sein parfois d’une même pièce, des perspectives opposées sur la guerre ? La littérature croise par ailleurs aussi des discours extra-littéraires (discours militaire, récit historique) et d’autres arts (peinture, musique, photographie, cinéma) qu’il peut être précieux de lui associer, ou de lui opposer.
Les analyses peuvent concerner les trois champs suivants:
1. Représentations
– Récits croisés d’un même conflit : la bataille vue de part et d’autre de camps ennemis (Catholiques et Protestants lors des guerres de religion ; Stendhal, Tolstoï et Thackeray devant les guerres napoléoniennes) ; Maupassant et Fontane devant la guerre franco-prussienne; Cendrars et Erich Maria Remarque sur le front de 1914-1918; ou Hemingway et Joseph Roth sur le front austro-italien à la même époque ; évocations confrontées d’une bataille : l’assaut, les blessés, les ambulanciers, les prisonniers vus d’ici – ou de là-bas ; la vie quotidienne à l’arrière : alimentation, habitat, sexualité en temps de guerre de part et d’autres des lignes. Mais aussi la figuration des deux camps par la mise en scène de frères ennemis.
2. Rhétoriques de la guerre
– L’écriture comme façon de participer au conflit ou, au contraire, de le refuser ; polémiques, propagandes opposées, satires et portraits-charge symétriques; apologie du fait guerrier ou déploration élégiaque, interprétations allégoriques du conflit et des ses causes. La guerre pousse parfois les auteurs à vouloir représenter ou justifier par un virtuosisme rhétorique ou une téléologie forcée les malheurs injustifiables qu’elle entraîne (au XVIe siècle Agrippa d’Aubigné).
L’engagement peut être idéologique mais aussi esthétique (la « poésie » des champs de bataille chez Apollinaire, Marinetti, ou encore Jünger). Écrire peut être une façon de lutter contre une guerre en rappelant d’autres exigences de justice (Hesse et bien d’autres). À l’inverse, cesser d’écrire ou de publier peut aussi être la réponse de la littérature à la guerre (Char pendant la Résistance).
3. Guerre et mise en crise de l’écriture
– L’épreuve de la guerre est indissociable en profondeur d’une mise en crise de l’écriture. Cette indissociabilité, perceptible à tous les siècles, s’accroît encore au XXe siècle. La guerre somme l’écriture d’être à la mesure de la douleur historique et individuelle qui doit être affrontée. Elle exige des écrivains qu’ils redéfinissent la forme, la légitimité, la fonction de l’écriture, et même son rythme, qu’elle peut modifier de façon significative. Cette quadruple redéfinition demande d’autant plus à être explorée qu’elle peut prendre des dimensions radicalement différentes : soit le retour à une écriture plus classique car plus compréhensible par tous (Aragon) ; ou tout au contraire une mise à mal du langage qui se retourne violemment contre lui-même et s’invente au plus près du risque du mutisme (Trakl). Cette mise en demeure de l’écriture par la guerre est un des enjeux centraux d’une réflexion consacrée au face à face redoutable de la littérature et de la guerre.
Informations pratiques
Il est rappelé que la problématique du Congrès concerne tous les siècles et ne se limite pas aux littératures, ni aux conflits du XXe siècle – pas plus qu’elle ne se cantonne aux littératures et conflits européens. Seront privilégiées les communications qui, dès leur titre et leur présentation synthétique (1500 signes maximum) contribueront à la question des perspectives croisées sur l’expérience de la guerre. Aussi les propositions purement monographiques sont-elles à éviter. Les ateliers seront constitués par le Comité scientifique en fonction des propositions reçues, et des ensembles chronologiques qui se dessineront.
Le nombre total des communications sera nécessairement limité. Soucieux de la cohérence scientifique de la manifestation, le Comité devra sans doute écarter certaines propositions, sans que l’intérêt ni la qualité de ces dernières ne soient pour autant mis en cause. Les communications ne pourront dépasser 20-25 minutes. Il est rappelé enfin que, comme pour les autres Congrès de la SFLGC, l’essentiel des frais de voyage et de séjour à Strasbourg sera à la charge des participants. Pour des raisons de logistique hôtelière à Strasbourg (Sessions parlementaires) il est demandé aux futurs participants de se signaler avant le dernier délai d’envoi des propositions (30 avril 2014).
Une publication des actes en ligne est prévue. Les textes ne pourront dépasser 25000-30000 signes.
Les propositions (1500 signes, brève bio-bibliographie incluse) sont à envoyer par mail simultanément (double envoi) à Tatiana Victoroff et Patrick Werly aux adresses suivantes avant le 30 avril 2014 :
tatiana.victoroff@gmail.com / werly@unistra.fr
À signaler : le Congrès coïncide avec l’ouverture, à la Bibliothèque nationale et universitaire de Strasbourg (BNUS), de l’exposition
1914 : La Mort des poètes (Charles Péguy, Wilfred Owen, Ernst Stadler)
organisée par Tatiana Victoroff, qui en proposera une visite commentée aux participants du Congrès.