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La guerre rendue présente par ses fantômes : Virginia Woolf, Erich Maria Remarque et Louis-Ferdinand Céline

ARTICLE

On se rappelle que, dans « Le Conteur », Walter Benjamin associe à l’expérience de la guerre la « chute » du « cours de l’expérience », qui conduit au déclin de l’art de conter : il illustre notamment cette affirmation par l’observation que « les gens revenaient muets du champ de bataille – non pas plus riches, mais plus pauvres en expérience communicable [1] ». Cette pauvreté est liée, selon lui, à l’expérience de la rupture sans précédent vécue par cette génération :

Une génération qui était encore allée à l’école en tramway hippomobile se retrouvait à découvert dans un paysage où plus rien n’était reconnaissable, hormis les nuages et, au milieu, dans un champ de forces traversé de tensions et d’explosions destructrices, le minuscule et fragile corps humain [2] .

Comme en réponse à l’affirmation qui en découle, selon laquelle la littérature serait devenue incapable de rendre compte des formes contemporaines de l’expérience humaine, un certain nombre de romanciers déplacent l’enjeu narratif, et même prennent cette difficulté à revers : pour eux, il ne suffit pas de restituer la violence des conflits pour traduire le bouleversement de la guerre ; il faut également donner à voir la trace laissée par la guerre dans le monde dit « civil [3]  ». Soumis au choc d’un conflit incompréhensible dans les cadres du récit classique, les romanciers tentent de répondre à cette difficulté en rendant compte des effets de la guerre par des figures en creux, comme celles du manque, de l’absence et du fantôme. Dans deux de ses grands romans des années 1920, La Chambre de Jacob (1922) et Vers le Phare (1927), dont le sujet principal n’est pourtant pas la guerre, Virginia Woolf a ainsi l’art de faire ressentir le vide laissé par celui qui est mort au front, en révélant cette disparition par une simple mention ou par une scène d’inventaire des affaires du disparu dans la chambre abandonnée de celui-ci.

Cette esthétique en creux, donnant toute leur place au vide et au manque, trouve un prolongement paradoxal dans des romans où l’impossibilité du deuil se traduit, pour le rescapé, par des hallucinations où resurgissent les disparus : paradoxal, parce que l’absence insurmontable se traduit alors par une présence envahissante. Cette intrusion des morts dans l’espace des vivants est parfois l’occasion, dans les œuvres les plus proches de la guerre, de faire passer un message politique à ceux qui se sont montrés infidèles à la mémoire des « soldats tombés au champ d’honneur », dont George L. Mosse a analysé en profondeur le culte, au lendemain de la guerre [4] . Cette dynamique est bien illustrée par le célèbre film d’Abel Gance, J’accuse (1919), et par Le Réveil des morts (1923), de Roland Dorgelès, deux œuvres dans lesquelles rêver ou halluciner le retour des morts comble un désir ardent de justice pour les personnages principaux – et, peut-on être tenté d’inférer, pour leurs auteurs.

Chez Virginia Woolf, Erich Maria Remarque et Louis-Ferdinand Céline, la place du traumatisé habité par les disparus est plus complexe : celui-ci ne se contente pas d’être le messager d’une vérité des morts qui doit s’imposer aux vivants. L’accent est déplacé sur la fragilité mentale de celui qui a survécu et sur sa difficulté à trouver une place dans la société de l’après-guerre, qu’il s’agisse de Septimus Warren Smith dans Mrs Dalloway (1925), d’Ernst dans Der Weg zurück (1931) ou de Ferdinand dans Guignol’s band I (1944). L’enjeu est donc ici de saisir, au-delà des figures de rhétorique politiques de l’entre-deux-guerres, le sens que prennent conjointement, dans plusieurs grands romans des années 1920, 1930 et 1940, l’évocation de la douleur des proches qui vivent un deuil impossible et la mise en scène spectaculaire de vétérans traumatisés qui hallucinent leurs camarades morts au front.

 

Chez Woolf, la réflexion critique précède la mise en scène fictionnelle : les trois grands romans des années 1920 apparaissent comme le résultat d’un long questionnement de l’auteur sur sa responsabilité de romancière face à l’événement. Quand elle rend compte de livres traitant de la guerre, elle n’a de cesse de s’interroger sur le juste point de vue, tant pour l’historien que pour l’écrivain [5] .

Un article de 1919, « The War From the Street [6]  », prend ainsi pour objet le livre d’un historien, D. B. Metchim, qui tente d’aborder la guerre du point de vue de quelqu’un habitant au sud de Londres et qui s’efforce de projeter le lecteur dans cette expérience en utilisant le pronom personnel you. Si Woolf paraît attirée par le pari que représente cette expérimentation, elle en conteste la réalisation : cet artifice d’historien, qui ne s’accompagne d’aucune réalité vécue, ne permet aucunement de renvoyer à l’expérience sensible des gens qui ont effectivement vécu la guerre depuis la rue. Ce you n’est qu’une enveloppe vide, incapable de véhiculer l’expérience de la guerre, et le livre reste bien celui d’un historien, c’est-à-dire de quelqu’un qui manipule des discours.

Mais les écrivains ne sont pas non plus épargnés par le regard critique de Woolf : dans « War In the Village » (1918), elle s’intéresse à un poème de Maurice Hewlett, épousant le point de vue d’une femme, dont le mari est mort sur le front et qui a perdu son bébé peu de temps après. Si elle juge le poème « émouvant et très sincère [7]  »,

The verses […] strike us not so much as the thoughts and laments of the woman herself as the words of a very sympathetic spectator who is doing his best to express what he supposes must be there beneath the silence and at the heart of the tears. […] the thoughts follow each other in too orderly a fashion to be the cry of a woman bereft of husband and son.

Les vers […] ne nous frappent pas, écrit-elle, comme s’ils étaient les pensées et les plaintes de la femme elle-même, mais ceux d’un spectateur très compatissant qui fait de son mieux pour exprimer ce qu’il suppose être derrière son silence et au cœur de ses larmes. […] les pensées s’enchaînent avec trop d’ordre pour être le cri d’une femme privée de son mari et de son fils [8] .

Ce qui manque à ce poème est la grossièreté (coarseness), comprise comme « quelque chose de véhément, de plein, de retentissant, charriant dans sa course les brindilles et les pierres et les fragments de la nature humaine, pêle-mêle » [« By coarseness, we mean […] something vehement, full throated, carrying down in its rush sticks and stones and fragments of human nature pell-mell [9]  »].

Face à cet échec de la poésie à rendre la brutalité de la perte, Woolf développe plusieurs stratégies narratives : si la parole poétique n’est pas à même de traduire en mots la dévastation du deuil, le romancier peut tenter de donner à voir l’existence fantomatique à laquelle la femme endeuillée est réduite dans un monde qui l’ignore. Dans Mrs Dalloway (1925), une figure de femme ayant perdu son fils à la guerre évoque la veuve du poème de Maurice Hewlett. Elle apparaît dans la longue rêverie du voyageur solitaire, sous les traits d’« une vieille femme, [tablier blanc volant au vent], qui semble, forte de sa faiblesse même, chercher, en plein désert, un fils perdu ; être en quête d’un cavalier abattu ; figure de la mère dont les fils sont morts sur tous les champs de bataille du monde [10]  ». Si la vision onirique de la vieille femme guettant le retour de son fils est comparable à la figure de la veuve de Maurice Hewlett, on n’entend plus ses plaintes – elle a atteint un plan symbolique, grâce auquel elle incarne toutes les mères que la guerre prive de leur enfant. Cette dérive symbolique représente une première solution au problème du point de vue posé par l’expression poétique : les morts et ceux qui pleurent les morts en sont réduits par la société anglaise de l’après-guerre à n’être que des ombres, entrevues derrière le voile d’une rêverie.

 

Mais cet effacement du personnage dans l’image symbolique n’est pas le seul moyen de faire exister la trace de la guerre dans une société qui l’ignore. Dès La Chambre de Jacob, Woolf cherche une solution originale au problème de la représentation de la guerre dans le roman moderne. Si la guerre n’en est pas le sujet principal, elle constitue la discrète toile de fond de ce récit de formation audacieux, dont le personnage principal porte un nom, Flanders, qui ne semble pas étranger aux combats faisant rage dans les Flandres, au cours desquels il va finir par mourir [11] .

Dans un passage-clef, la guerre passe au premier plan : la narratrice y relaie en effet les moqueries que « les hommes des clubs et des ministères » adressent aux écrivains, dont l’activité relève du divertissement. Aussitôt, elle s’engage dans un morceau de bravoure totalement hétérogène au récit, dans lequel le lecteur voit, d’un point de vue panoramique, « les cuirassés se déplo[yer] sur la mer du Nord » et canonner une cible, provoquant ainsi la mort d’« une douzaine de jeunes hommes dans la fleur de l’âge » qui « meurent asphyxiés ensemble sans une plainte [12]  ». Au même moment,

Like blocks of tin soldiers the army covers the cornfield, moves up the hillside, stops, reels slightly this way and that, and falls flat, save that, through field-glasses, it can be seen that one or two pieces still agitate up and down like fragments of broken match-stick.

Comme des carrés de soldats de plomb l’infanterie couvre le champ de blé, gravit la colline, s’arrête, tangue un peu d’un côté et de l’autre, et tombe au sol, sauf que, avec des jumelles, on peut voir qu’un ou deux fragments s’agitent encore, se levant et retombant comme des bouts d’allumettes en morceaux [13] .

Intégré à un récit dont la règle générale de composition est de se focaliser sur des fragments du quotidien, ce passage prend un sens critique évident : Woolf refuse ici délibérément de décrire l’horreur autrement qu’« à la jumelle » et en présentant de manière tragiquement ironique les jeunes hommes décimés comme des « soldats de plomb ». La narratrice se place du point de vue de ces hommes d’importance qui voient le monde « d’en haut », comme elle le souligne explicitement dans le passage qui suit.

These actions, together with the incessant commerce of banks, laboratories, chancellories, and houses of business, are the strokes which oar the world forward, they say […]. It is thus that we live, they say, driven by an unseizable force. They say that the novelists never catch it; that it goes hurtling through their nets and leaves them torn to ribbons. This, they say, is what we live by – this unseizable force.

Ces actions, associées à l’incessante activité des banques, laboratoires, chancelleries et maisons de commerce, sont les coups de rame qui, disent-ils, font avancer le navire du monde […]. C’est ainsi que nous vivons, disent-ils, poussés par une force insaisissable. Ils disent que les romanciers ne la capturent jamais ; qu’elle passe en trombe à travers leurs filets et les met en lambeaux. C’est elle, disent-ils, qui nous fait vivre – cette force insaisissable [14] .

Woolf répond ainsi doublement aux détracteurs du roman moderne : évidemment, elle s’en prend à l’aveuglement de ceux qui en restent à une vision panoramique soucieuse de l’avancée du « navire du monde » et aveugle aux catastrophes humaines et individuelles que la guerre provoque, mais en même temps, elle montre qu’elle n’ignore pas les bouleversements de l’époque et les critiques adressées au roman. En intégrant ces critiques à la trame de son récit, elle rend celui-ci apte à les penser, avant de les dépasser.

Le dernier chapitre du récit doit donc être lu comme une réponse directe à ce passage : ce chapitre ne met pas directement en scène la mort de Jacob sur le front, dans des circonstances dont on ne saura rien ; seul l’inventaire de sa chambre, vidée par ses amis et sa mère, nous informe de sa disparition. Cette scène, qui donne tout son sens au titre du livre, est donc pour le lecteur d’une extrême brutalité, notamment lorsque Bonamy, le meilleur ami de Jacob (comme son nom l’indique), s’étonne de retrouver tout en désordre : « Qu’est-ce qu’il croyait ? Est-ce qu’il pensait qu’il allait revenir ? » [« What did he expect? Did he think he would come back [15] ? »] La force de l’écriture de Woolf dans cette scène est de faire ressentir l’absence à partir d’objets infimes, dérisoires même, jusqu’à cette paire de chaussures que brandit la mère de Jacob, complètement démunie, image sur laquelle se termine le roman. Nul besoin de recourir à d’ambitieuses descriptions guerrières pour prendre la mesure du bouleversement que la guerre induit dans la société : la seule révélation du vide créé par la disparition du fils ou de l’ami suffit à donner à voir le traumatisme subi, non seulement par ceux qui ont vécu la guerre, mais aussi par leurs proches.

Cette économie du deuil et de l’absence, Woolf la conduit à son accomplissement dans Vers le Phare (1927). Les allusions à la guerre y sont aussi maigres que dans La Chambre de Jacob, puisqu’elles n’occupent que la très courte partie centrale intitulée « Le temps passe », qui sert de transition entre les deux volets principaux du récit. Ainsi le silence dans lequel a sombré la maison familiale des Ramsay à la suite de la mort de Mrs Ramsay se voit-il perturbé par « des bruits inquiétants […] au cours de l’été, comme des coups de marteau mesurés, amortis par du feutre, qui, par leurs chocs répétés, déf[ont] encore un peu plus le châle et fêl[ent] les tasses à thé » [« […] there came later in the summer ominous sounds like the measured blows of hammers dulled on felt, which, with their repeated shocks still further loosened the shawl and cracked the tea-cups [16]  »] : les bombardements, aussi distants et feutrés soient-ils, sont le lointain rappel de la violence d’un conflit, dont les « fêlures » s’immiscent jusque dans les armoires de la salle à manger abandonnée des Ramsay.

Ce n’est qu’après cette allusion indirecte que le lecteur comprend le rapport immédiat de la guerre à l’histoire des Ramsay, lorsque, par une incise entre crochets, analogue à celle qui lui a révélé la mort de Mrs Ramsay, il apprend celle d’Andrew sur le front : « [Un obus explosa. Vingt ou trente jeunes gens furent déchiquetés en France, parmi eux Andrew Ramsay, dont la mort, Dieu merci, fut instantanée.] » [« [A shell exploded. Twenty or thirty young men were blown up in France, among them Andrew Ramsay, whose death, mercifully, was instantaneous [17] .] »]. Il n’est pas sans intérêt de savoir que ces incises ont été ajoutées après coup par Woolf, après la prépublication de ce chapitre dans la revue Commerce [18] . Leur portée dramatique, renforcée par les crochets, qui au stade des épreuves se substituent aux parenthèses pour souligner l’hétérogénéité des passages en question au reste du texte, est bien sûr décisive : le lecteur prend d’un coup la mesure du grave impact que la guerre, pourtant lointaine, a sur l’existence de la famille Ramsay.

Lorsque, dans une nouvelle incise, la narratrice fait référence à la poésie publiée par August Carmichael, le vieux garçon un peu austère accueilli l’été par les Ramsay, l’ironie est sensible : « [Mr. Carmichael publia ce printemps-là un recueil de poèmes qui eut un succès inattendu. La guerre, disaient les gens, leur avait redonné le goût de la poésie.] » [« [Mr. Carmichael brought out a volume of poems that spring, which had an unexpected success. The war, people said, had revived their interest in poetry [19] .] »] Le contraste entre la gravité des événements vécus et la légèreté de ce goût, qui s’apparente à une fuite, consacre l’échec de la poésie face à un événement comme la guerre : dans un monde où il est devenu « insupportable de s’adonner à la contemplation », un monde où « le miroir [s’est] brisé » [« […] contemplation was unendurable; the mirror was broken [20]  »], la poésie ne peut être que déplacée, au sens propre. Déjà, dans son article de 1922, « On not knowing Greek », Woolf s’en prenait à la poésie moderne, qu’elle opposait à celle des anciens Grecs. Seuls les Grecs, y dit-elle, seraient capables de rendre compte d’une catastrophe comme la Première Guerre mondiale, eux qui peuvent écrire : « Et tout en étant morts, ils ne sont pas morts. [« Yet being dead they have not died [21] . »] Cette phrase de Simonide incarne pour elle l’audace expressive de la poésie grecque. À la différence de poètes comme Wilfred Owen ou Siegfried Sassoon, que Woolf respecte mais qui ne disposent que de la tonalité grinçante de la satire pour exprimer la souffrance causée par leur traumatisme, les Grecs étaient capables, par l’audace de leurs métaphores, de faire face aux émotions les plus extrêmes, aux paradoxes les plus violents. Or la phrase de Simonide formule exactement le problème auquel sont confrontés les endeuillés : ceux qui sont morts sont toujours vivants pour leurs proches.

Tout l’enjeu est donc de trouver, à côté d’une écriture en creux, à côté d’une écriture de l’absence et du manque, la formule paradoxale d’une écriture qui donne à voir la présence absente, qui rende présente l’absence.

 

À cette exigence paradoxale, l’écriture du fantôme répond parfaitement. Dans les hallucinations qu’il traverse, Septimus, le traumatisé de guerre qui hante Mrs Dalloway, prend au pied de la lettre l’expression de Simonide : Evans, son ancien officier, est pour lui à la fois mort et vivant dans son fantôme. Le personnage rend possible le retour à une énonciation aussi puissante que celle des Grecs, précisément parce que son point de vue permet de montrer et non plus seulement de dire. Alors que le vivant doit faire le deuil des morts, l’halluciné est celui en qui ils retrouvent une existence paradoxale, un monde à habiter qui n’est ni seulement mental, comme le serait le souvenir, ni évidemment réel, mais à la frontière entre les deux. Dans « Deuil et mélancolie », Freud caractérise cette irruption de l’image passée dans le présent comme le fruit d’un conflit entre « l’épreuve de réalité » et le refus de cette réalité par celui qui a perdu l’objet aimé et le maintient « par une psychose hallucinatoire de désir [22]  ». Les traumatisés de guerre des années 1920 et 1930 sont habités par la fidélité impossible qu’en tant que survivants, ils doivent aux morts restés sur le front. En faisant resurgir les fantômes de la guerre sur la scène d’un monde civil enclin à les oublier, ils incarnent la mauvaise conscience de la société de leur temps. Les disparus prennent alors le visage des « mauvais morts », ceux qui, comme le rappelle Carine Trévisan dans son beau livre sur Les Fables du deuil, « sont morts de mort violente, ont été privés des honneurs funéraires ou dont on a [profané] la tombe et qui se trouvent condamnés à errer parmi les vivants, cherchant à se venger du défaut de rituel [23] ».

Woolf n’est évidemment pas la seule à être confrontée à cet enjeu dans les années 1920 et 1930. La thématique du retour des morts est, depuis la fin de la guerre, un véritable topos de la littérature et du cinéma de la Première Guerre mondiale, hantés par la mémoire des soldats sacrifiés [24] . L’un des romans les plus marquants à cet égard est celui d’Erich Maria Remarque, Der Weg zurück, qui raconte le difficile retour à la vie civile d’un groupe de soldats. Ce retour est ponctué, pour Ernst, le personnage principal, par plusieurs hallucinations : la première a lieu dans la cour de caserne qu’ils vont quitter avant de rejoindre le monde civil. Parmi eux, « les morts sont là, invisibles, massés en rangs profonds » et, aux côtés du commandant de la compagnie, « marche sans bruit la file spectrale de ses prédécesseurs », que le récit fait apparaître un à un en décrivant en détail leurs blessures et la façon dont ils sont morts [25]  : au moment même du retour à la vie civile, les morts sont là pour rappeler aux vivants la fidélité que ceux-ci leur doivent. Chez Céline, on retrouve cette image du défilé silencieux des morts, notamment dans Guignol’s band I (1944), où Ferdinand, réfugié à Londres après sa démobilisation en raison de son traumatisme, mais subitement poussé à se rengager par une véritable compulsion de répétition, se précipite au Consulat de France. Il y voit tous les souteneurs français fréquentés à Londres et décimés au front : entre autres, Nestor, « sa grosse tête coupée dans ses mains », et René-les-Clous, « celui-là le ventre alors grand ouvert » ; « Ils étaient tous pâles de figure !...blancs… blancs… comme d’un reflet blême sous la peau… une lueur [26] … » Ces fantômes ne répondent pas aux interpellations de Ferdinand : ils incarnent la résistance muette des morts à l’oubli ou à la bonne conscience des vivants, à l’image des spectres qui habitent le théâtre de Shakespeare, Banco dans Macbeth ou le père au début de Hamlet [27] . Or ces scènes d’hallucinations empruntent leurs codes aux genres du fantastique et de l’horreur : la poétique de la trace ne passe donc pas forcément, comme dans La Chambre de Jacob et dans Vers le Phare, par une écriture de l’effacement et du vide, mais peut inclure une grande part de spectaculaire.

Les romans de Woolf, de Remarque et de Céline qui mettent en scène des hallucinations de vétérans marquent cependant une évolution dans le traitement du thème du retour des morts par rapport à l’époque qui les précède. Dans de nombreuses œuvres de l’immédiat après-guerre, le vétéran se pose en justicier : il se charge de rappeler la mémoire des morts à tous ceux qui voudraient l’oublier. À la fin de J’accuse, Abel Gance met en scène un poète traumatisé, Jean Diaz, qui, de retour dans son village, convoque tous les civils un soir, au prétexte de leur donner « des nouvelles concernant [leurs] morts [28]  ». Une fois qu’ils sont réunis, le film bascule dans un espace à la limite du symbolique et du réel : Jean Diaz raconte comment il a vu les morts se relever. Tout en suscitant la terreur de ses auditeurs, ce récit permet au personnage principal de les confronter à leur responsabilité et aux trahisons qu’ils ont commises envers les soldats sacrifiés. Mais le film n’en reste pas à cette dimension symbolique : les morts surgissent pour s’imposer d’eux-mêmes à la mémoire de leurs proches. Le poète traumatisé n’aura servi que de passeur : face aux vivants médusés et repentants, il peut abandonner sa posture de justicier, pour se faire intercesseur. Jean Diaz explique ainsi aux vivants comment se comporter avec leurs disparus, et les invite à laisser repartir les morts. Si la scène est attribuée après coup à une « suggestion [29]  », son sens politique, confirmé par le titre du film, J’accuse, demeure : l’hallucination est avant tout un moyen de donner une résonance formidable à un sentiment de scandale du réalisateur face à la société d’après-guerre.

Le Réveil des morts, de Roland Dorgelès, présente une dynamique très proche : Jacques, architecte installé après la guerre dans la région des conflits, pour participer à la reconstruction, y retrouve, dans la maison de sa compagne Hélène, les lettres du mari de celle-ci, André, qu’ils avaient trompé ensemble avant sa mort au front : c’est seulement en lisant les lettres désespérées du mari sans nouvelles que Jacques prend conscience de leur faute – c’est-à-dire principalement de celle d’Hélène, dans la mesure où lui s’identifie désormais totalement à André. Décidant de la confronter à ses responsabilités passées, il entre avec elle dans une violente dispute, qui se clôt sur une vision d’horreur à laquelle ils sont soumis l’un après l’autre : « À ses pieds, devant lui, un soldat casqué se tenait dans l’allée. La nuit l’enveloppait et l’on ne distinguait rien qu’un visage blême, avec deux grands yeux creux et une bouche vide, une bouche affreuse qui riait [30] … » Tout se passe comme si l’accusation morale se matérialisait en une scène fantastique, qui donne corps au retour de la mémoire d’André. Or cette scène n’est qu’un prélude au tableau panoramique qui se développe dans le chapitre qui suit, d’une façon tout à fait analogue à ce que faisait Abel Gance dans J’accuse : les morts reviennent pour demander des comptes aux vivants. La dimension irréelle de cette scène n’est signalée qu’après coup, lorsque Jacques s’aperçoit qu’il s’agissait d’un rêve [31] . Reste que la puissance de vision de ces deux scènes signale à Jacques une vérité symbolique dont il prend acte en décidant de quitter Hélène et de partir de Crécy.

Aussi tourmentés que soient les personnages principaux de ces deux œuvres, ils se font les porteurs d’une vérité qui les dépasse et qui n’est pas contestée par la scénographie narrative : l’œuvre se met au service des morts oubliés ou trahis, et la position de passeur occupée par le personnage principal n’est pas véritablement interrogée comme telle.

 

Il est plus difficile de caractériser les personnages de Woolf, de Remarque et de Céline : dans leurs œuvres, la place du vétéran visionnaire est ambiguë. À la fin de Der Weg zurück, Ernst est ainsi pris par une fièvre hallucinatoire où tous ceux qui sont morts au front (ceux-là mêmes que l’on voit mourir dans À l’ouest rien de nouveau), réapparaissent comme « une légion d’ombres » et prennent possession de sa chambre,

[…] Franz Kemmerich, mit achtzehn Jahren amputiert und drei Tage später gestorben. Stanislaus Katczinsky, mit schleifenden Füßen und gesenktem Kopf, aus dem dunkel ein dünner Faden sickert […] – Sie wehen herein, sie hocken auf den Büchern, sie klettern am Fenster hoch, sie füllen das Zimmer – […] 

Franz Kemmerich, amputé à dix-huit ans, mort trois jours après. Stanislaus Katczinsky, les pieds traînants et la tête inclinée, d’où filtre, sombre, un mince filet […] – et les voici qui entrent en flottant, qui s’accroupissent sur les livres, grimpent sur la fenêtre, garnissent la chambre [32]

Dans cette foule inquiétante figure Ludwig, le camarade incapable de supporter le retour à la vie civile qui vient de se suicider, comme pour souligner la communauté entre ceux qui sont morts au front et ceux dont l’existence a été ravagée par la guerre. C’est lui qui est le plus menaçant, sans doute parce que c’est celui dont le destin est le plus proche de celui d’Ernst, lui dont la fidélité aux morts a été, par son suicide, totale [33] . Reste que les morts semblent désormais dépourvus de message : ils ne s’exclament pas, comme le premier revenant d’Abel Gance, « […] le temps est venu de savoir si nos morts ont servi à quelque chose [34]  ! » Le recul temporel permet sans doute de mesurer l’absence de « leçon » tirée de l’hécatombe. La « poétique du revenant » semble donc, à partir du milieu des années 1920 et des années 1930, moins un moyen d’interpeller les vivants sur leur infidélité vis-à-vis des morts, qu’une façon d’interroger l’absence, le manque, la culpabilité, et de traduire l’exil intérieur de celui que la guerre a arraché à lui-même.

Cette « poétique du revenant » occupe Remarque au point d’être déclinée dans son œuvre sous d’autres formes. Dans deux nouvelles contemporaines de Der Weg zurück mais publiées en anglais dans une revue américaine, il cherche des ressources différentes que l’hallucination pour donner à voir l’existence spectrale des anciens combattants dans le monde civil. Ces deux nouvelles interrogent le retour impossible du soldat dans son environnement et l’exil mental insurmontable auquel il est confronté auprès de ses proches. Dans la première, « L’étrange destinée de Johann Bartok » (1931), le destin du vétéran prend la tournure inattendue d’un hybride entre les intrigues des Révoltés de la Bounty (1879) et du Colonel Chabert (1829) : Bartok, fait prisonnier, est embarqué dans un bateau en partance pour l’Asie. Après une mutinerie manquée, il est condamné aux travaux forcés pendant quinze ans, à la suite de quoi il est libéré et retourne chez sa femme : celle-ci ayant refait sa vie après l’avoir cru mort, il doit repartir pour commencer une nouvelle vie [35] . L’image de celui qu’on croyait mort et qui revient prendre possession de son foyer peut être lue comme une figure de la mauvaise conscience que la société de l’entre-deux-guerres devrait avoir, aux yeux de l’auteur, à l’égard de ses – véritables – morts. Mais on peut aussi l’interpréter d’une manière symétrique : qu’après avoir reçu un « certificat » attestant la mort de son mari, la femme de Bartok se soit reconstruit une nouvelle vie n’est pas le fruit d’une trahison, mais une conséquence naturelle de l’absence de son mari. Elle n’est pas caricaturée en épouse indigne. Le revenant se heurte à un état de fait qui n’appelle ni accusation ni vengeance. Une nouvelle vie n’est possible pour lui qu’une fois qu’il a renoncé à redevenir celui qu’il était et à forcer ses anciens proches à effacer les quinze ans écoulés.

Une autre histoire de revenant, « L’histoire d’amour d’Annette » (1931), adoptant le point de vue symétrique de la femme du combattant et exploitant un autre registre, celui du mélodrame, interroge d’une manière analogue la place paradoxale des morts et de leurs proches. Dans cette nouvelle, Annette est en complet décalage avec son fiancé mobilisé : lors de la permission de celui-ci, elle se révèle incapable de comprendre son inquiétude, son empressement à se marier, son idéalisme passionné qui se traduit par l’évocation fébrile, exaltée, de leurs jeux d’enfants. Lorsque son jeune mari meurt quelques semaines après cette permission, le deuil semble glisser sur elle : « Elle était trop jeune, et les quelques jours passés avec Gerhard n’avaient pas suffi à le lui faire considérer comme son mari. » [« She was too young, and the few days they had passed together had not been sufficient for her to look upon Gerhard as her husband [36]  »] Ce n’est que plusieurs années après que cette perte l’atteint, lorsque, revenant avec son nouveau fiancé sur les lieux de son enfance, elle entrevoit ce qu’a tenté de lui dire Gerhard. C’est seulement à ce moment-là qu’elle est prise de la même exaltation passionnée que lui, en repensant aux jeux qu’ils avaient partagés enfants : « elle qui avait si vite oublié, qui s’en était à peine souvenue, se mit soudain à aimer – à aimer une ombre. » [« […] she who had so quickly forgotten, who had hardly remembered it at all, now began suddenly to love – to love a shadow [37]  »] Dès lors, elle se replie sur elle-même, se réfugie dans une secte de spiritisme pour tenter de communiquer avec son fugitif époux, et finit par « cesser de vivre [38]  ». Remarque, s’interrogeant sur la place spectrale que le vétéran occupe dans la société de l’après-guerre, finit par renverser le schéma : celle-là même qui n’avait pas été capable de donner toute sa place à l’homme terrorisé par la mort toute proche, finit, habitée par le spectre de celui-ci, par glisser à son tour dans une existence fantomatique. Le fantôme du mort défait de l’intérieur les fondements de la société qui semblait l’avoir oublié. Mais la narration ne fait pas pour autant porter à la jeune Annette la responsabilité de n’avoir pas pu comprendre le cataclysme qui s’abattait sur eux : seul est souligné le décalage tragique, absurde, entre l’expérience de l’un et celle de l’autre. La pathétique mort d’Annette n’est en rien une expiation : c’est seulement un effet différé de l’énorme gâchis de la guerre, qui ne peut recevoir aucun sens.

Ces différentes configurations narratives convergent toutes vers une même interrogation. Le revenant n’y est pas accusateur : il invite plutôt à questionner les fêlures que les sociétés d’après-guerre ignorent d’elles-mêmes.

 

Si, pour restituer le deuil de guerre, les registres diffèrent du tout au tout, depuis une esthétique du silence, apte à suggérer le manque par une stricte mention elliptique, jusqu’à une forme de présence-absence spectaculaire dans l’hallucination, c’est sans doute que la position du vétéran fracassé par le traumatisme et celle des proches dévastés par une disparition sans corps et sans mot impliquent des traitements différents ; mais dans les années 1920 et 1930, les enjeux de l’une et de l’autre sont parents, et les écritures du fantôme qui les donnent à voir ont en commun de s’émanciper des topoï politiques de l’après-guerre. La nouveauté de cette représentation romanesque de la guerre, qui se détache des appels à la fidélité vis-à-vis des soldats morts, tient peut-être à un paradoxe qui rejoint les découvertes de la récente psychanalyse : rien, peut-être, n’est plus aveuglant que le vide révélé en creux par la perte ; et les tensions intérieures provoquées par le traumatisme, si invisibles soient-elles, correspondent à une réalité qu’on peut rendre tangible par la parole. Mais les écrivains précèdent les psychanalystes dans la mise au jour de cette « clinique du fantôme ». Si celle que leurs œuvres révèlent ne s’assimile pas entièrement à celle que théoriseront les héritiers de Sandor Ferenczi, Nicolas Abraham et Maria Torok, dans les années 1970, elle la préfigure en partie [39] . Pour ces derniers, c’est l’abîme de l’extermination qui sert de déclencheur, obligeant à repenser les moyens de l’analyse pour accueillir des souffrances qui n’ont rien à voir avec une fantasmatique œdipienne. Mais dès les années 1920, les romanciers sentent et expriment à quel point les sociétés qui survivent à l’hécatombe de 1914 sont malades des fantômes qui les peuplent : à l’époque, cette conscience ne contrebalance certes pas l’usage politique que fait une droite radicalisée, notamment en Allemagne, du culte des morts de la guerre [40]  ; mais elle permet d’entrevoir les obscurs tunnels qui se creusent entre les tranchées meurtrières de 1914 et les « terres de sang » où seront perpétrés les crimes de la Seconde Guerre mondiale.

Notes

  • [1]

    Walter Benjamin, « Le conteur », traduction de Maurice de Gandillac revue par Pierre Rusch, dans Œuvres, t. III, Paris, Gallimard, « Folio », 2000, p. 116.

  • [2]

    Ibid.

  • [3]

    Ce choix ne vient pas d’une incapacité de ces romanciers à restituer la violence vécue au cours d’une bataille : parmi les auteurs étudiés, Céline, Remarque, Dorgelès s’y sont livrés avec succès.

  • [4]

    Voir George L. Mosse, De la Grande Guerre au totalitarisme. La brutalisation des sociétés européennes, traduction Édith Magyar, Paris, Hachette littératures, « Pluriel », 1999, p. 83-123.

  • [5]

    Voir notamment Karen L. Levenback, « Virginia Woolf’s “War in the village” and “The War from the street” », dans Virginia Woolf and War. Fiction, Reality, and Myth, Mark Hussey (éd.), Syracuse, New York, Syracuse University Press, 1991, p. 40-57.

  • [6]

    The Essays of Virginia Woolf, t. III, 1919-1924, Andrew McNeillie (éd.), London, The Hogarth Press, 1988, p. 3-4.

  • [7]

    The Essays of Virginia Woolf, t. II, 1912-1918, Andrew McNeillie (éd.), London, The Hogarth Press, 1987, p. 291.

  • [8]

    Ibid., p. 293.

  • [9]

    Ibid.

  • [10]

    Mrs Dalloway, traduction Marie-Claire Pasquier, dans Virginia Woolf, Œuvres romanesques, t. I, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2012, p. 1119. « The solitary traveller is soon beyond the wood; and there, coming to the door with shaded eyes, possibly to look for his return, with hands raised, with white apron blowing, is an elderly woman who seems (so powerful is this infirmity) to seek, over the desert, a lost son; to search for a rider destroyed; to be the figure of the mother whose sons have been killed in the battles of the world », Mrs Dalloway, Penguin Books, 1992, p. 63.

  • [11]

    Voir la notice d’Adolphe Haberer, dans Virginia Woolf, Œuvres romanesques, t. I, op. cit., p. 1411. Adolphe Haberer note par ailleurs que Jacob Flanders est l’exact contemporain de Rupert Brooke, l’ami de Woolf tué au front (ibid., p. 1412).

  • [12]

    La Chambre de Jacob, traduction d’Adolphe Haberer, ibid., p. 1040. « The battleships ray out over the North Sea, keeping their stations accurately apart. At a given signal all the guns are trained on a target which (the master gunner counts the seconds, watch in hand – at the sixth he looks up) flames into splinters. With equal nonchalance a dozen young men in the prime of life descend with composed faces into the depths of the sea; and there impassively (thought with perfect mastery of machinery) suffocate uncomplainingly together », Jacob’s Room, Penguin Books, 1992, p. 136.

  • [13]

    Jacob’s Room, op. cit., p. 136, La Chambre de Jacob, op. cit., p. 1040.

  • [14]

    Jacob’s Room, op. cit., p. 136-137, La Chambre de Jacob, op. cit., p. 1040.

  • [15]

    La Chambre de Jacob, op. cit., p. 1061., Jacob’s Room, op. cit., p. 155.

  • [16]

    Vers le Phare, traduction Françoise Pellan, dans Virginia Woolf, Œuvres romanesques, t. II, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 2012, p. 120, To the Lighthouse, Penguin Books, 1992, p. 145.

  • [17]

    Vers le Phare, op. cit., p. 121, To the Lighthouse, op. cit., p. 145.

  • [18]

    Voir Notice de Françoise Pellan, dans Virginia Woolf, Œuvres romanesques, t. II, op. cit., p. 1295-1297.

  • [19]

    Vers le Phare, op. cit., p. 121, To the Lighthouse, op. cit., p. 146.

  • [20]

    Vers le Phare, op. cit., p. 121, To the Lighthouse, op. cit., p. 146.

  • [21]

    « On not knowing Greek », The Essays of Virginia Woolf, t. IV, 1925-1928, Andrew McNeillie (éd.), London, The Hogarth Press, 1994, p. 48.

  • [22]

    Sigmund Freud, « Deuil et mélancolie » (1915), dans Métapsychologie, traduction collective, revue et corrigée par Jean Laplanche et J.-B. Pontalis, Paris, Gallimard, « Folio », 1986, p. 148.

  • [23]

    Carine Trévisan, Les Fables du deuil. La Grande Guerre : mort et écriture, Paris, Presses Universitaires de France, « Perspectives littéraires », 2001, p. 65.

  • [24]

    Voir tout le chapitre « Le retour des morts » du livre de Carine Trévisan, p. 65-71.

  • [25]

    Après, traduction Raoul Maillard et Christian Sauerwein (1931), Paris, Gallimard, « folio », 2014, p. 60-61. « Da stehen unsichtbar, viele Reihen tief, die Toten. / Heel geht die Kompanie entlang. Aber mit ihm geht lautlos der gespenstische Zug seiner Vorgänger », Der Weg zurück, Cologne, Kiepenheuer und Witsch, 1998, p. 44.

  • [26]

    Guignol’s band, dans Louis-Ferdinand Céline, Romans, t. III, Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1988, p. 265.

  • [27]

    Voir Macbeth, acte III, scène 4, Penguin, 1995, p. 97, et Hamlet, acte I, scène 1, Oxford University Press, 1987, p. 145-147.

  • [28]

    Abel Gance, J’accuse, Lobster films, 2014, Troisième partie, 2e DVD, 29e min 25 s.

  • [29]

    Ibid, 45e min.

  • [30]

    Roland Dorgelès, Le Réveil des morts, Paris, Albin Michel, 1923, p. 282-283.

  • [31]

    Ibid., p. 305.

  • [32]

    Der Weg zurück, op. cit, p. 275. Après, op. cit., p. 352, ponctuation modifiée.

  • [33]

    Après, op. cit., p. 353 ; Der Weg zurück, op. cit, p. 276.

  • [34]

    J’accuse, op. cit., 32e min.

  • [35]

    « The strange fate of Johann Bartok », traduction anonyme, Collier’s Weekly, 5 décembre 1931, p. 18-19 ; « L’étrange destin de Johann Bartok », dans L’Ennemi, traduction de l’anglais par Frédérique Campbell-Nathan (1994), Paris, Le Livre de poche, 2013, p. 53-63.

  • [36]

    « L’histoire d’amour d’Annette », dans L’Ennemi, op. cit., p. 74, « Annette’s Love Story », Collier’s Weekly, 28 novembre 1931, p. 10.

  • [37]

    « L’histoire d’amour d’Annette », dans L’Ennemi, op. cit., p. 78, « Annette’s Love Story », op. cit., p. 11.

  • [38]

    « L’histoire d’amour d’Annette », dans L’Ennemi, op. cit., p. 79. « One day she was no more… », « Annette’s Love Story », op. cit., p. 11.

  • [39]

    Voir Nicolas Abraham et Maria Torok, L’Écorce et le noyau (1987), Paris, Flammarion, « G-F », 2009, notamment « Notes du séminaire sur l’unité duelle et le fantôme » (1974-1975), p. 393-425, et « Notules sur le fantôme » (1975), p. 426-433.

  • [40]

    Voir notamment George L. Mosse, De la Grande Guerre au totalitarisme, op. cit., p. 122-123.

Pour citer cet article

Alexandre SEURAT, "La guerre rendue présente par ses fantômes : Virginia Woolf, Erich Maria Remarque et Louis-Ferdinand Céline", in M. Finck, T. Victoroff, E. Zanin, P. Dethurens, G. Ducrey, Y.-M. Ergal, P. Werly (éd.), Littérature et expériences croisées de la guerre, apports comparatistes. Actes du XXXIXe Congrès de la SFLGC, URL : https://sflgc.org/acte/alexandre-seurat-la-guerre-rendue-presente-par-ses-fantomes-virginia-woolf-erich-maria-remarque-et-louis-ferdinand-celine/, page consultée le 19 Avril 2024.